Le scénario se répète chaque année. Le Canada envoie ses superbes étoiles du hockey junior au championnat mondial, après un camp d'entraînement médiatisé comme l'événement du siècle. Chaque fois, les jeunes nous font honte avec du jeu violent, digne des pires matchs professionnels. Autant ils sont talentueux, autant ils sont détestables, antisportifs, mesquins.

Lorsque Nail Yakupov a déclaré que les juniors canadiens étaient «salauds», nos médias ont parlé de guerre psychologique... Il serait temps d'ouvrir les yeux, mes amis, et de laisser vos préjugés et les clichés de côté: Yakupov disait ce qu'il pense vraiment, ce que pensent les joueurs de toutes les autres équipes, ainsi que les vrais amateurs de hockey - ce sport si beau quand il est pratiqué par des gens civilisés.

Déjà deux joueurs canadiens suspendus, un troisième expulsé d'un match. Je ne blâme surtout pas ces jeunes hommes, à qui l'on demande de se comporter en matamores, de prouver qu'ils sont des durs, à la canadian.

J'accuse plutôt les adultes qui les dirigent. Le Canada a d'ailleurs choisi, pour le championnat de 2012, un véritable dinosaure comme entraîneur. Steve Spott a tout de suite protesté avec un des clichés les plus éculés du hockey international: «Les arbitres européens ne sont pas de notre niveau, ils sont incompétents.» Dans les années 70, on disait déjà la même chose... après une défaite.

Et pourtant, un coup à la tête est un coup à la tête, un contact sur un joueur qui n'a pas la rondelle est une infraction et un assaut (charging) est illégal sur tous les continents.

Voilà pourquoi - ajoutons le chauvinisme gênant des médias canadiens -, cette année encore, je souhaite un échec retentissant à Team-Canada-Équipe.

J'ai honte... Pauvre petit peuple complexé.

Khaos et Thunder

Nos amis Khaos et Thunder, les deux garçons handicapés devenus lutteurs, étaient en action la semaine dernière.

Il fallait les voir, ces deux bonshommes toujours enfermés dans leur bulle, incapables de communiquer avec le reste du monde il n'y a pas si longtemps, faire des high five aux spectateurs (dans le cas de Thunder, le bon) ou menacer la foule entière de 3000 personnes (dans le cas de Khaos, le méchant).

J'étais à Boisbriand pour assister à leur deuxième performance en deux soirs, vendredi dernier. Un bon combat, avec une longue chorégraphie qu'ils ont mis des mois à apprendre. Je n'ai vu qu'une seule erreur, vers le milieu du combat, lorsqu'ils se sont brièvement demandé lequel des deux devait lancer l'autre dans les câbles...

Pour le reste, tout s'est passé comme prévu, et très bien.

Après le combat, je suis allé les rejoindre dans leur vestiaire, où ils étaient occupés à analyser leur performance.

Simon Roy (Khaos), qui a beaucoup souffert d'anxiété et de bien d'autres choses dans sa vie, en avait long à dire. «Ça s'est mieux passé qu'hier [à Joliette]. Nous étions moins nerveux ce soir. Nous avons commis moins d'erreurs, beaucoup moins d'erreurs.»

Steve Corbeil (Thunder), qui est aphasique, se tenait adossé contre un mur, les bras croisés, et il approuvait les propos de son partenaire. Et, surtout, il avait le sourire d'un homme parfaitement heureux. Les autres lutteurs lui offraient de l'eau ou des boissons, mais il refusait. «Ça va, merci, je suis très bien.»

Khaos, qui est rondelet, parlait de faire un régime. Nous étions d'accord.

Et puis il a précisé: «Un régime, O.K., mais juste un peu.»

Les deux reprendront les combats en mai prochain pour la suite de la tournée de Jacques Rougeau et de ses élèves.

Photo : Bernard Brault, La Presse

Simon Roy (Khaos)  et Steve Corbeil (Thunder)  ont offert un beau spectacle de lutte, vendredi à Boisbriand.