On appelle ça la magie de la télévision, je crois. Mardi, lors des épreuves féminines de plongeon, on pouvait voir à la télé une foule réunie au Stade olympique, autour des piscines, pour regarder les plongeons de Londres sur écran géant. Et les gens criaient, secouaient de petits drapeaux dans ce qui semblait être une ambiance d'enfer.

Mon patron m'a dit que c'était bien, et que je devrais y aller. J'ai répondu: «Bonne idée, j'y vais pour Despatie. Ça va être l'enfer...»

Une fois sur place, j'ai dû suivre les cameramen et les reporters pour trouver la dizaine de personnes présentes. Il y avait plus de médias que de spectateurs...

Le truc consiste à demander aux gens de se tasser les uns sur les autres, d'entrer parfaitement dans le plan de la caméra, de s'énerver et de secouer les petits drapeaux quand Despatie se présente sur le grand écran. Ce que les spectateurs ont fait avec plaisir, parce que nous vivons dans une époque où les caméras sont reines.

Et voilà comment on crée un événement quand il n'y en a pas... On pourrait appeler cela la menterie de la télévision.

Je m'ennuyais un peu - d'autres bonnes idées, boss? -, Despatie n'allait pas fort à Londres, son copain et lui étaient derniers à un moment de la compétition... Jusqu'à ce qu'un groupe d'enfants de 5 ou 6 ans d'un camp de jour se présente à la spectaculaire pataugeoire olympique. Il n'y avait de l'action que dans ce coin-là.

Si on allait les voir, leur demander ce qu'ils pensent des Jeux olympiques et d'Alexandre Despatie?

«Vous ne pouvez pas vous approcher des enfants, monsieur», me dit la dame à l'entrée.

J'insiste, et on fait venir un responsable des lieux. J'attends plusieurs minutes, et le gentil monsieur me dit qu'il faut la permission de la chef du camp de jour. Il va aller la trouver...

Après une quinzaine de minutes d'attente et de palabres, c'est non. Les responsables du camp de jour ne veulent pas que je parle aux enfants, et surtout pas de photos.

Bon... Je comprends qu'il faut être prudent. Mais si je m'approchais en compagnie d'un responsable du camp de jour?

C'est non.

On dirait qu'il faudrait la permission des parents et de la GRC pour interviewer des petits...

J'étais un peu fâché et je suis parti comme une flèche vers la sortie. C'est là que je me suis perdu dans ces labyrinthes qui sont la règle au Stade olympique. Je tournais en rond, et plus je tournais, plus je bougonnais...

De retour dans les gradins avec la fausse foule et les vrais cameramen, j'ai vu que Despatie, que j'aime beaucoup, n'allait pas vraiment mieux. La journée s'annonçait ratée...

Puis, le responsable des lieux rencontré à mon arrivée est apparu avec un groupe de jeunes. «Ce sont les enfants des entraîneurs du club. Leurs parents sont d'accord pour que vous leur parliez.»

Gentil monsieur, il m'a pris en pitié...

Alors Philippe, 12 ans, est déterminé à devenir nageur. «Je m'entraîne six fois par semaine, je fais toutes les nages, sauf le 100 mètres, parce que je suis trop jeune.»

Trop jeune? Un entraîneur m'a expliqué que si on laissait les jeunes faire du 50 ou du 100 mètres, ils délaisseraient tous les plus longues distances, qui demandent beaucoup plus de travail et, surtout, de souffrance.

Sara, 11 ans, semble aussi très déterminée. «Je viens m'entraîner cinq fois par semaine et je suis toujours contente d'arriver ici.» Une vraie de vraie.

Son frère Vincent, 11 ans, est moins catégorique. «J'aimerais devenir nageur olympique, mais je sais que ça demande beaucoup de discipline et de temps. Je ne sais pas si j'aimerais ça...» Le message est clair. À mon avis, Vincent est un artiste.

Finalement, Despatie et son collègue ont terminé au sixième rang, mais on les aime quand même. C'est peut-être à cause de lui qu'il y avait de jeunes athlètes dans toutes les surfaces d'eau du Stade olympique hier. Des jeunes qui s'entraînaient plutôt que de regarder l'écran.

Je suis retourné à la maison en prenant le métro à la station Viau. Quand les familles de visiteurs sortent de terre, elles s'écrient toutes «wow!» en voyant le Stade et la tour.

Est-ce que vous vous écriez «wow!» quand vous arrivez au Stade olympique?

Pourtant, le coup d'oeil est vraiment unique. Prenez le temps de voir la prochaine fois...