Il fut un temps où mes cartes de Claude Provost, Bobby Baun et Stan Mikita étaient certaines de mes possessions préférées, avec mon gant de baseball. Elles venaient avec une plaquette de gomme à mâcher que je n'aimais pas, mais que je mâchais quand même parce... parce qu'elle était là.

Et puis, j'ai oublié mes cartes, je n'avais pas l'âme d'un collectionneur, jusqu'à ce que mon père, dans une rage de ménage, vide le hangar de la deuxième avenue à Rosemont et mette les cartes aux poubelles. Je n'ai rien dit, mais je n'avais pas trouvé ça sympathique de sa part. Il aurait pu m'en parler, des fois que j'aurais eu un regain d'intérêt, mais bon...

Les cartes de hockey ont réapparu dans ma vie quand mon fils a grandi dans les années 80 et, déjà, le marché était inondé. Il y avait des Wayne Gretzky partout, alors qu'un Rocket ou un Gordie Howe était un petit trésor.

La rareté avait disparu. En 1990, me dit un collectionneur de carrière qui désire garder l'anonymat, il y avait 100 cartes différentes de Saku Koivu.

Nous voilà en 2011 et les cartes de hockey ont atteint le fond du baril avec la série Enforcers, maculée de sang. Pas très subtil. Je comprends la colère de Georges Laraque.

Selon mon informateur, la compagnie In The Game, qui a produit ces horreurs, est dirigée par de véritables amants du hockey qui ont fait de belles choses dans le passé.

«Mais, cette fois, ils ont été maladroits, nous dit notre homme.

«Le marché des cartes de hockey est presque mort. Il reste peut-être trois boutiques à Montréal où vous pouvez en acheter. Le marché a été tué autour de 1990, il ne représente pas le dixième de ce qu'il était il y a 20 ans.

«Il n'y a plus assez d'enfants. Les cartes produites sont destinées à des collectionneurs de longue date, des adultes qui ont des moyens. Le coffret Enforcers se vend quelque chose comme 100 dollars...»

Et je vous parie qu'il n'y a même pas de gomme.

RoboCop

Lors d'une récente visite dans un vestiaire de hockey universitaire, je me suis attardé aux pièces d'équipement qui étaient pendues à des crochets. Comme elles sont belles quand on n'a pas acheté de gants ou d'épaulières depuis des décennies. Belles, légères... et dures comme des pièces d'armure.

Certains observateurs mentionnent ces nouveaux équipements qui représentent un danger dans des discussions sur les commotions cérébrales. Mais cet argument tellement simple n'est jamais retenu. Tous n'ont peut-être pas envie de se mettre à dos les fabricants.

Il ne s'agit plus de coussins pour se protéger, mais de matériaux très durs qui deviennent des armes offensives, les cubitières et les épaulières surtout. Nous sommes bien au temps de RoboCop et les jeunes doivent raffoler de ces beaux objets hi-tech.

On sait que celui qui porte une armure se croit indestructible, ce qui le porte à frapper très fort. C'est le principe du rugby et du football américain: il y a beaucoup moins de blessures au rugby où l'on doit faire preuve de retenue si l'on veut survivre.

De là à remettre en question les fabricants qui font partie du business, il faudra beaucoup de courage et d'honnêteté.

Distraction

Vous regardez des matchs de football universitaires ou professionnels américains et les commentateurs et analystes vous en parlent comme s'il s'agissait de l'événement le plus important sur la planète. Les Américains ont ce petit défaut: ce qui se passe chez eux est plus important que tout et le sport est plus important que tout ce qui se passe chez eux.

Il y aurait un tsunami au Canada, mais il ne faudrait pas que les bulletins de nouvelles interrompent le match alors que les Patriots et les Lions sont nez à nez... On s'en fout du tsunami et de tous ces morts, il y a un match crucial qui se déroule, les Lions pourraient rater les séries...

Don Cherry, à la CBC, a le même pli. Nous savons maintenant qu'il s'était senti insulté et avait piqué une colère quand un bulletin spécial l'avait interrompu.

Mais revenons au football américain, à LSU-Penn State ou Seattle-San Diego... Supposons que nous ayons appris, quelques jours plus tôt qu'un des entraîneurs impliqués est accusé de 50 actes de pédophilie, comme c'est le cas pour Jerry Sandusky, cet ancien de Penn State.

Il y a des chances que les commentateurs et analystes soient fâchés si on en parlait... Ils se demanderaient peut-être pourquoi on gâche le reportage d'un match si important pour une telle distraction... Ils seraient mal à l'aise et voudraient parler d'autre chose...

Je me trompe peut-être, mais si je me fie au ton de leurs analyses et commentaires, il faudrait que les preuves soient nombreuses et immédiates, sinon le score est de 17-17 et ne nous interrompez plus...

Photo Martin Chamberland, archives La Presse

Le marché des cartes de hockey est presque mort...