«Les conservateurs sont rendus trop conservateurs. Ils sont dépassés!»

C'était hier, dans un cours de journalisme à l'école secondaire Monseigneur-Richard, à Verdun. Une école au coeur de la circonscription Jeanne-Le Ber, où le bloquiste Thierry St-Cyr a été réélu. 

J'avais demandé aux élèves de me dresser leur bilan de la campagne. Je m'attendais à des soupirs et à des bâillements. Erreur. Ces jeunes avaient pour la plupart suivi la campagne, que ce soit à la télé ou dans les journaux, en regardant Infoman, Gérard D. Laflaque ou Tout le monde en parle.

Dans la classe, les points de vue s'entrechoquaient, sauf quand il était question de Stephen Harper. Là, tout le monde était d'accord. Le jugement était sans appel. Harper avait mené une très mauvaise campagne et allait devoir payer pour son arrogance en n'obtenant pas la majorité espérée.

Que reprochent ces jeunes au chef du Parti conservateur? Ils lui reprochent ses idées trop conservatrices. «On s'est battus contre l'Église et là, Harper débarque en pape!» lance une élève.

Ils lui reprochent le durcissement de la loi sur les jeunes contrevenants, qui pourrait envoyer des jeunes de 14 ans en prison pour la vie. «On dirait qu'il veut faire reculer la société!»

Ils reprochent aussi à Harper ses positions anti-Kyoto irresponsables. Ils lui reprochent de tourner le dos de façon hautaine aux médias. «Si Harper voulait des votes au Québec, il aurait dû aller à Tout le monde en parle

Ils n'ont pas été trop impressionnés non plus quand ils ont appris que Harper avait plagié un discours du premier ministre australien pour la guerre en Irak. «Il est hypocrite. Il copie des textes!» a dit une élève qui voit en Harper «un deuxième Bush».

On aura compris que, même comme président de son école, Harper n'aurait eu absolument aucune chance ici.

Qui donc a l'assentiment de ces jeunes ? Jack Layton, disent les uns. Gilles Duceppe, disent les autres.

Pourquoi Layton? Parce qu'il a l'air d'un «bon monsieur», d'un «papy cool» à qui on aurait envie d'offrir une bière, par opposition à Harper, à qui on offrirait au mieux un verre de lait.

Et Duceppe? «C'est lui qui défend le mieux nos valeurs» a lancé une élève. «C'est aussi lui qui a le mieux répondu aux questions à Tout le monde en parle.» «Les gens se disent: si on n'a pas la souveraineté, au moins, on a le Bloc», a dit une autre.

Cela dit, les points de vue demeurent partagés quand il est question de Duceppe ou de Layton. Certains se demandent quelle est l'efficacité réelle de Duceppe à Ottawa. «Je voterais pour lui s'il avait une chance dans le pays au complet», a dit une élève. D'autres accusent Layton d'être à la tête d'un «parti de rêveurs» aux propositions irréalistes.

Et Stéphane Dion? Il provoque des haussements d'épaules. «Au début, il faisait pitié. Après, il s'est rattrapé», a observé une élève. «Il est trop théorique, il parle trop la langue des chiffres.»

Une élève qui avait vu Dion en entrevue à MuchMusic a trouvé que son anglais laissait à désirer. En français à MusiquePlus, ce n'était guère mieux : le chef du Parti libéral a remercié un animateur de lui avoir donné la chance de participer à «l'émission préférée» de sa fille. Le hic, c'est que l'émission en question n'avait encore jamais été en ondes.

Ces analystes politiques en herbe n'avaient qu'un souhait. «Tant que ce n'est pas conservateur majoritaire, on est correct!»

Ils ont eu ce qu'ils voulaient. De justesse.