Quand est-ce qu'un jeune coach de 38 ans a-t-il autant bouleversé la quiétude bien établie de la Ligue nationale ?

Quand Boucher a demandé quelques jours de réflexion aux Blue Jackets de Columbus, c'était clair comme de l'eau de roche. Il avait une autre offre d'une organisation de la Ligue nationale. Sinon, ça ne fonctionnait pas. Un jeune homme de 38 ans qui a choisi de faire carrière comme entraîneur-chef dans la Ligue nationale n'aurait pas attendu plus que 10 minutes pour signer le contrat.

C'est le temps que Michel Bergeron a pris pour accepter l'offre de Maurice Filion la toute première fois. Et sans doute que ce fut la même chose pour Michel Therrien ou Alain Vigneault quand on leur a offert le poste de coach du Canadien. Même chose pour Pat Burns ou pour Jean Perron.

J'ai beau chercher, je ne me rappelle pas d'un coach demandant quelques jours de réflexion après sa toute première offre d'emploi dans la Ligue nationale.

Certains, comme Michel Langevin de CKAC, ont drôlement réagi. On aurait dit que Langevin était mal à l'aise avec la position de Boucher. Je l'ai entendu à quelques reprises montrer son malaise avec le fait que Boucher pouvait négocier un meilleur salaire et de meilleures conditions, fort qu'il était de sa position.

Comme si les directeurs généraux et les propriétaires montraient autant de compassion et de retenue quand vient le temps de congédier un coach. Et comme si dans les affaires, ce n'était pas la responsabilité d'un futur employé de négocier ses conditions de travail et de salaire au mieux des conditions du marché. Pensez-vous que les propriétaires des Blue Jackets de Columbus et du Lightning de Tampa Bay ne savent pas comment se négocient des contrats d'affaires? Comment ont-ils fait pour devenir propriétaires d'équipes dans le hockey professionnel? Ils ont écrasé des plus faibles qu'eux lors de centaines et de milliers de négociations.

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Guy Boucher s'est retrouvé dans cette position enviable parce qu'il le méritait. Il avait réussi lors de son stage comme coach des Redmen de McGill dans le hockey universitaire, il avait réussi dans le hockey junior tant dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec qu'au niveau international et aux Championnats du monde. Et en plus, il a réussi chez les pros avec les Bulldogs de Hamilton.

Doté d'une maîtrise en psychologie sportive, il a fait la preuve qu'il était capable d'allier compréhension des individus, jeu collectif et discipline tant individuelle que collective. Quand un homme de ce type arrive sur le marché du coaching, on le prend. Et Steve Yzerman, fort de son passage à la direction générale de l'équipe nationale du Canada et instruit par Mike Babcock, coach des Red Wings de Detroit, a très bien saisi le potentiel de Boucher. Il s'est arrangé pour lui offrir des conditions que l'autre ne pouvait refuser. Comme d'amener ses deux adjoints québécois, Martin Raymond et Daniel Lacroix, avec lui à Tampa Bay.

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Le hockey fonctionne par cycles. J'espère que Guy Boucher connaîtra du succès à Tampa Bay et que d'autres directeurs généraux, les yeux ouverts par la nouvelle recrue, se diront que peut-être, après tout, y a-t-il de bons hommes de hockey au Québec et dans les Maritimes...

De plus, il faut se rappeler que Guy Boucher a été nommé coach à Hamilton par Bob Gainey après l'arrivée du nouveau propriétaire Geoff Molson dans l'entourage du Canadien. Même s'il n'avait pas encore été présenté officiellement aux médias, Geoff Molson était en position pour faire connaître ses priorités. Et un retour de l'équipe vers ses partisans en faisait partie.

L'accession à la Ligue nationale de Guy Boucher ne fait que confirmer l'importance du Canadien pour les Québécois. Sans l'ouverture d'esprit et l'aide de l'organisation montréalaise, il est presque impossible d'émerger du hockey amateur. La barrière de la langue est trop élevée.

Il aura suffi d'une seule année avec les Bulldogs pour permettre à Guy Boucher d'atteindre un de ses objectifs et de réaliser le rêve de tout entraîneur de carrière. Et dire que pendant toutes ces années, Don Lever bouchonnait tous les espoirs des francophones à Hamilton.

Bravo à Guy Boucher et bravo à Pierre Gauthier et au Canadien qui ont montré une belle classe dans ce dossier. Un jour, ça va leur revenir.

DANS LE CALEPIN - Reste maintenant le cas Michel Therrien à régler. J'espère qu'il obtiendra le poste de coach avec les Devils du New Jersey. Therrien est de cette étoffe dont on fait les entraîneurs dans le hockey professionnel. Quant à Bob Hartley, il est tellement bon comme analyste et commentateur à la télé et à la radio, que je souhaite presque qu'il puisse continuer encore son travail. Mais c'est de l'égoïsme et il ne faut pas. Enfin, fidèle à mes vieilles habitudes, j'ai trouvé le moyen de commettre deux fautes dans les noms des firmes d'avocats qui ont oeuvré dans les phases finales du retour du Grand Prix du Canada. Il s'agissait de Stikeman Elliott (et non Stackman) et d'Ogilvy Renault. Je corrige donc avant d'avoir des poursuites sur le dos. Des avocats, faut qu'ils gagnent leur vie...

Photo: Ivanoh Demers, La Presse

À 38 ans, Guy Boucher, le nouvel entraîneur-chef du Lightning, a bouleversé la quiétude bien établie de la Ligue nationale.