Appelez ça un vol qualifié. Appelez ça une très grande performance. Appelez ça une inspiration pour une équipe. Appelez ça une Halakerie...

D'ailleurs, les 21 300 spectateurs qui ont fait éclater le Centre Bell hier soir l'ont bien reconnu. Ils sont restés jusqu'à la toute fin. Ils ont attendu que l'on présente la première étoile, Jaroslav Halak, pour lui rendre un dernier hommage 53 fois mérités.

Et avant eux, tous les joueurs du Canadien ont accompagné Halak jusqu'au banc de l'équipe au son de la sirène. Il y avait des gestes d'affection qui ne mentent pas. Ces hommes aiment le discret Slovaque. Ce sont des professionnels et ils savent reconnaître les grands dans leur profession. Et Jaroslav Halak est devenu un grand professionnel pour ses coéquipiers.

D'ailleurs, même si le Canadien a été outrageusement dominé sur la patinoire, l'équipe n'a que très rarement joué cette saison comme elle l'a fait hier contre les Capitals de Washington. Le talent n'était peut-être pas toujours là, mais les efforts et le désir compensaient.

C'est sûr que Jaroslav Halak a sauvé les meubles. Il avait effectué 30 arrêts après 30 minutes et c'est un euphémisme que de dire qu'il a sauvé le match pour la Flanelle.

Mais les attaques furieuses des Capitals étaient contrées par des efforts tout aussi déchaînés des joueurs de Jacques Martin. Pour un Alexander Ovechkin qui a travaillé et relancé les attaques pour les Caps, il y avait un Maxim Lapierre qui a sans doute disputé son meilleur match de l'année. Et son but en troisième était une récompense bien méritée. C'est le but qui mettait le match hors de portée de la puissante attaque des Caps.

C'est l'émotion qui fait la différence. Souvent cette saison, le Canadien a été une équipe indifférente. On jouait par séquences, on en gagnait trois ou quatre, on en perdait trois ou quatre et finalement, ce n'est qu'après les Jeux olympiques qu'on a senti du feu dans cette équipe.

Et même là, le feu brûlait surtout devant le but. J'ai vu de nombreux gardiens voler des séries au cours des trois ou quatre dernières décennies. Bernard Parent avec les Flyers de Philadelphie, Ken Dryden contre Boston, Billy Smith contre les Oilers d'Edmonton, Patrick Roy, José Théodore contre Boston, Cam Ward avec les Hurricanes de la Caroline et j'en oublie quelques-uns. Mais Halak, au cours de cette série, a mérité le droit de faire partie du groupe des voleurs de grand chemin. Il a été formidable et a mérité les trois victoires du Canadien.

Le simple fait de compter sur un gardien de ce calibre libère les joueurs du Tricolore. Ils peuvent se permettre de prendre un petit risque supplémentaire en se fiant sur Halak pour fermer la porte derrière eux. C'est arrivé à plus d'une reprise dans les deux premières périodes.

Ce qui m'a le plus impressionné hier soir, c'est l'aplomb du Slovaque. Sa technique est impeccable, il ne pose pas de gestes inutiles, il n'essaie pas d'être spectaculaire. Il fait ce qu'il a à faire. Il arrête des pucks.

Et puis, il faut le répéter. Certains le savent depuis deux ans déjà, Jaroslav Halak est beaucoup plus fort mentalement que Carey Price. Même quand il est bombardé comme c'est arrivé trop souvent cette saison, il reste dans sa bulle. Concentré, il ne se laisse pas distraire par la circulation devant lui ni par les charges des adversaires qui foncent sur son filet.

Je ne sais pas comment Pierre Gauthier va régler la situation de ses gardiens pendant l'été, mais il ne peut laisser partir Halak. Et comme il ne peut prendre le risque d'échanger Price qui va se développer, espérons-le, au cours des prochaines années, Jacques Martin devra gérer une situation qui va devenir explosive. Halak va exiger avec raison d'être le vrai numéro un et Price, gâté par les années Gainey, va finir par se plaindre. C'est écrit dans le ciel.

Et le septième?

Bon. Et le septième match? Il n'y a pas moyen de prédire l'issue d'un septième match. La foule ne compte pas. Tout se joue sur la glace. Mais la confiance acquise au cours des deux dernières victoires va jouer en faveur du Canadien. Et puis, Ovechkin, Semin, Backstrom, Green et les autres doivent voir Halak comme un mur infranchissable. Assez pour les faire hésiter avant de lancer.

On ne sait jamais. Rien ne dit que les partisans ne sont pas partis pour un printemps mémorable.

DANS LE CALEPIN - Quelle façon de tuer l'ambiance naturelle d'un match. Quand Maxim Lapierre a écopé d'une pénalité pour plongeon en troisième, la foule était furieuse. Elle huait et grognait avec raison et les fans ont lancé des objets sur la patinoire. On a choisi ce moment précis pour qu'une animatrice déconnectée fasse des sparages souriants avec Youppi. Les gens ont continué à huer et l'animation au grand tableau du Centre Bell a continué d'être débilitante.

Photo: André Pichette, La Presse

Le simple fait de compter sur un gardien du calibre de Jaroslav Halak libère les joueurs du Tricolore.