J'écoutais un jeune gourou des relations publiques expliquer très sérieusement que Tiger Woods avait sans doute répété plusieurs fois chacune des réponses de sa conférence de presse avec des spécialistes de l'image.

Le gourou avait raison sur certains points. Quand il s'agissait de réponses ouvrant la porte à une dimension judiciaire, Woods avait été préparé par ses avocats. Ce qui est dans l'ordre des choses.

Quand il a répondu aux questions sur les traitements reçus après sa dernière opération au genou, il s'est également tenu dans les paramètres légaux prévus par des avocats. C'était évident.

Mais pour tout le reste, le gourou fait figure de picolo. J'ai trouvé fascinante la façon dont Tiger Woods a expliqué quelle avait été sa démarche en thérapie et comment il avait dû accepter d'être confronté à une partie de lui-même qui lui avait échappé.

Woods avait déjà été une bonne personne, il s'est perdu et a commis des fautes graves qui ont blessé ses enfants, sa femme, sa famille, ses proches et il devra maintenant faire face à d'autres responsabilités. Expliquer en temps et lieu à ses jeunes enfants qu'est ce qui s'est passé dans la vie de leur père pendant ces années de galère.

Il n'est pas tombé dans le piège de l'excuse facile quand un journaliste lui a demandé s'il n'avait pas laissé toutes ces traces de ses aventures sexuelles dans le but inconscient de se faire attraper et ainsi être forcé d'y mettre fin.

Il a expliqué que lorsqu'un homme (ou une femme) est plongé dans pareille spirale, il ne pense pas qu'il puisse faire du mal autour de lui. La réponse était celle d'un individu qui a véritablement passé des heures et des heures chaque jour en psychothérapie. Ce n'était pas une réponse dictée par d'autres gourous des communications. Tiger Woods a été obligé d'aller fouiller dans son inconscient, et il est allé assez loin dans l'introspection pour donner une réponse articulée et humble à la fois.

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Il a reconnu tous ses torts. Il n'a jamais prononcé le prénom de sa femme et il n'a parlé d'elle qu'en une seule occasion. Il a plutôt parlé de la famille. Il a fait son mea-culpa et il l'a fait trois fois plutôt qu'une. Vous voulez quoi de plus?

Hier, certains spécialistes du «Tigergate» revenaient toujours avec la même complainte. On ne sait pas tout. Il n'a pas tout dit.

S'cusez, et la vie privée, ça n'existe plus? Et la vie privée des autres, ça ne compte pas? On voudrait quoi? Connaître le nom et la grosseur des seins d'une réceptionniste qu'il aurait embrassée quelque part après une soirée? Il ne vous viendrait pas à l'idée que peut-être, peut-être et peut-être, cette jeune femme n'a pas le goût de se retrouver dans la tempête médiatique? De toute façon, une fois les questions judiciaires et légales réglées, une fois que Woods a reconnu qu'il avait été indigne de son image de modèle pour les enfants et qu'il avait blessé ses proches et sa famille, que voulez-vous qu'il fasse? Se déculotter pour faire admirer l'arme du crime?

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Hier, Woods a confirmé qu'il avait entrepris une thérapie pour contrôler sa dépendance au sexe. C'est une dépendance qui ressemble à l'alcoolisme ou à la dépendance aux drogues ou au jeu. Ce qui est important, c'est qu'il a indiqué à quelques reprises que la thérapie se poursuivait et qu'il voulait comprendre ce qui s'était passé et redevenir la bonne personne qu'il avait déjà été. On ne règle pas un problème de dépendance en six semaines. C'est une démarche d'une vie.

Avant d'être alcoolique, un ivrogne a bu longtemps. Quand il entreprend une thérapie pour soigner sa dépendance, il est considéré comme un malade. Qui donc va lui poser cent questions pour savoir quand est-ce qu'il a pris sa première bière, combien il a bu de caisses de 24 et quand est-ce que l'alcool a pris le contrôle de sa vie? D'habitude, on applaudit plutôt l'effort que fait le malade pour reprendre sa vie en main.

Tiger Woods tente de soigner une dépendance qui peut être encore plus pernicieuse. Parce qu'une caisse de 24 n'envoie pas de textos et est rarement présentée avec une jupe courte sur de longues cuisses bronzées. Et qu'un sachet de coke prend rarement l'initiative d'appeler le client pour lui offrir le high de sa vie.

Tiger Woods a répondu aux questions. Il n'était pas obligé de tout étaler de ce qui demeure une question privée et surtout, il n'était pas obligé de s'incriminer dans des histoires qui risquent de se retrouver devant les tribunaux.

Il se peut que Tiger Woods sorte de ces histoires scabreuses un bien meilleur homme. Il aura du vécu et il aura été obligé d'aller voir au plus profond de lui, là où se terre l'inconscient. Il comprendra.

Même qu'un jour, il va pouvoir jouer au golf en paix.