Il était huit heures et quart, hier matin, quand Georges Laraque m'a appelé. Georges s'en allait rejoindre ses coéquipiers pour une journée consacrée à la communauté et à l'entraînement.

Il était visiblement bouleversé par ce qui se passait dans la patrie de ses parents. «C'est terrible, on est sans nouvelle. Mes parents sont nés en Haïti, nous y avons encore de la parenté et tout le monde est inquiet», de dire Big Georges.

Je sais à quel point la tragédie haïtienne, une autre de plus, touche Laraque. L'homme est fier de ses origines et a lu une pile de livres traitant de l'histoire des Noirs en Amérique. Comme il est un de ceux qu'on peut consulter si on veut écrire sur Herbie Carnegie, l'ancien des As de Québec et un des tout premiers Noirs à avoir joué chez les professionnels.

Comme je sais à quel point Joachim Alcine et Jean Pascal sont bouleversés. Le père de Jean Pascal vit encore à Port-au-Prince. Les deux sont des figures de proue de la diaspora haïtienne au Québec et c'est vers eux que se tournent de nombreux Haïtiens pour obtenir du réconfort.

Tout de suite après l'appel de Laraque, c'est Varda Étienne qui me trouvait. «Je voulais te rassurer, j'ai pu contacter mes parents à Port-au-Prince. Ils sont sains et saufs», m'a juste dit la grande Varda avant de répondre à un autre téléphone.

Il faut que je vous dise que j'ai vécu plus de quatre ans avec une Haïtienne. Pendant ces quatre ans, j'ai eu l'occasion de connaître ses parents et amis. Dans le temps des Fêtes, ses oncles passaient toute la soirée à discuter de la situation politique «au pays». Sa mère et sa tante Marie Carmel se rendaient régulièrement en Haïti avec des médicaments pour essayer d'aider les plus démunis.

Même dans le confort de l'Île-des-Soeurs, je pouvais quand même sentir le poids épuisant sur la diaspora de la misère des parents, proches ou amis qui étaient restés en Haïti. Ce poids, si ce que j'ai ressenti est juste, chaque fils et fille de Haïti vivant à Montréal et au Québec en porte une partie. Malgré leurs succès et leurs réussites.

Et personne n'a encore évalué le poids de cette misère sur tous ces jeunes qui choisissent la voie des gangs de rue pour rompre avec leur passé. Tant qu'à porter le poids de tant de malchances, de tant de criminalité, de tant de misère et de désespoir, aussi bien rompre complètement avec une société qui contribue à les tolérer.

D'ailleurs, le seul bon côté de la dernière tragédie haïtienne, c'est que certains bandits, qui étaient en attente d'expulsion, auront la chance de rester plus longtemps au Canada.

Au cours des quinze derniers mois, je suis allé trois fois à Ouagadougou, au Burkina Faso. C'est un des pays les plus pauvres de la planète. Mais le Burkina jouit de vraies structures politiques. Il y a de l'ordre et il y a de l'espoir. Même si la vie est épouvantablement difficile dans un pays où on ne gagne pas1000$ dans une année.

Mais comparé à Haïti, c'est le plus meilleur des pays pauvres.

Depuis Carbo

Le Canadien a fait un autre beau geste, hier, en inaugurant sa deuxième patinoire extérieure avec glace artificielle. C'est une belle façon de rendre à la communauté l'amour et l'argent reçus depuis des décennies.

Pierre Boivin, le président de l'équipe, a fait un travail colossal pour rentabiliser l'entreprise de George Gillett. Et on présume qu'il va continuer à le faire pour Geoff Molson.

Ce dernier a exprimé le souhait que M. Boivin reste en fonction quand je l'ai rencontré tout juste avant les Fêtes. Il avait profité de cette entrevue pour préciser deux fois plutôt qu'une que Bob Gainey relevait de Pierre Boivin. C'est donc Pierre Boivin qui a le mandat et le devoir de demander des comptes au directeur général des Glorieux.

J'aimerais savoir si M. Boivin est satisfait de voir que son équipe est passée de 104 points et d'une première position au classement de la conférence de l'Est en 20 ans sous la gouverne de Guy Carbonneau à 94 points la saison dernière à sans doute 84 points cette saison. Comme dirait Bernard Derôme, si la tendance se maintient, ça ne sera pas drôle à la fin du deuxième plan quinquennal.

J'aimerais savoir également ce que M. Boivin pense du rendement de ses Canadiens depuis le congédiement de Guy Carbonneau. Selon les chiffres colligés par François Fournier, de La Presse, le Canadien a gagné 28 des 68 matchs disputés depuis l'entrée en scène de Gainey derrière le banc. Si on ajoute les quatre défaites collées et gênantes contre les Bruins de Boston, on arrive à 28 victoires en 72 matchs. Et ça inclut les «victoires» en prolongation et en fusillade. Comme dirait Pierre Bruneau, rigueur, rigueur, M. Boivin. Où est-ce que vous êtes en train de laisser aller votre équipe? Êtes-vous satisfait? Êtes-vous inquiet? Pensez-vous pouvoir endormir un million de partisans avec du marketing comme c'est le cas depuis dix ans? La recette va fonctionner encore longtemps?

L'Organisation est choyée et privilégiée. Elle peut compter sur des fans merveilleux. Ils sont loyaux et sont prêts à accepter et à justifier les pires décisions des dirigeants de leurs chouchous.

Quand même, des fans, ça peut se tanner. Et M. Molson l'a dit, c'est vous qui êtes responsable de Bob Gainey. Autrement dit, si le Canadien continue d'être une petite équipe moyenne, presque médiocre encore trop longtemps, celui qui laisse faire pourrait-il sauter?

Personnellement, ça me ferait de la peine.