Les Anciens auraient parlé du fatum. De la fatalité. On dirait que des individus, parfois des familles, portent le poids d'un destin maudit.

Arturo Gatti est mort assassiné dans une chambre d'hôtel au Brésil. Son ex-conjointe Amanda Rodrigues est détenue et a été formellement accusée de meurtre par la police brésilienne. Elle aurait reconnu avoir attiré Gatti dans un piège alors qu'il se préparait à se rendre au mariage de sa soeur Anna-Maria Gatti à Miami.

Anna-Maria est l'ex de Davey Hilton Jr et la mère des deux filles du boxeur déchu.

Le fatum. Le poids du destin. On dirait que le malheur prend possession de familles au grand complet et pèse sur l'existence et la mort de ses membres.

Certains hommes sont rongés par une violence qu'ils ne peuvent maîtriser. Surtout quand ils ont bu ou qu'ils ont consommé des drogues. Même si Arturo Gatti était reconnu pour être un homme charmant, il avait été arrêté lui aussi pour avoir violenté sa femme.

Je ne l'ai pas connu d'aussi près que les frères Hilton. J'ai couvert un de ses combats de championnat du monde contre Leonard Dorin à Atlantic City. Même si Dorin était un homme courageux et un très bon boxeur, il avait cédé en quelques rounds devant la sauvagerie de Gatti. Emporté par un ouragan.

Avant et après le match, Gatti nous avait rencontrés. Il avait été gentil, affable, souriant et généreux dans la victoire. Le promoteur Yvon Michel se retrouvait dans une drôle de situation. Dorin était son poulain mais Gatti aurait été son protégé s'il avait accepté son offre. Il avait préféré rester loyal à son entourage du New Jersey avec qui il était devenu champion du monde et multimillionnaire.

Ce n'est qu'à sa retraite qu'il est revenu s'établir à Montréal. Comme s'il avait donné rendez-vous au fatum.

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Ses intimes pourront mieux parler de l'homme. Que s'est-il passé pour qu'une femme en vienne à attirer un ancien conjoint dans pareil traquenard? Et est-il possible d'imaginer les effroyables tempêtes qui se levaient dans le coeur, la tête et l'âme tant de Gatti que de Mme Rodrigues? Les colères, les crises, les scènes épouvantables, les départs en coups de vent, les rages incontrôlables, les fuites dans la nuit, les remords, la peine et à travers ce maelström, sans doute l'amour, et un enfant, presque un bébé.

Je peux vous parler du champion. Arturo Gatti a été l'un des meilleurs boxeurs de son époque. Encore plus qu'un bon boxeur, c'était un fou de courage et de détermination dans un ring. Il a livré des combats qui finissaient immanquablement «combats de l'année» selon les votes des experts à la fin de l'année. Il était incroyable. Dix fois donné pour battu, dix fois vainqueur, le visage ensanglanté, à bout de force mais encore debout dans les trente dernières secondes du dernier round, en train de faire pencher la décision de son côté.

Un grand champion, un des plus spectaculaires des dernières décennies, a été assassiné au Brésil. Mais qu'était l'homme pour qu'une femme en vienne à un tel extrême?