Ce ne sont plus des chroniqueurs de sport que ça prend pour couvrir le Canadien de Montréal, ce sont des reporters de faits divers.

Dans la seule journée d'hier, j'ai reçu des appels de policiers, d'un avocat et d'un proche des joueurs de l'équipe.

Les histoires qu'on m'a racontées sont juteuses. Et les sources sont suffisamment crédibles pour que je les croie. Elles concernent des dirigeants de l'organisation et des membres des Amigos, ce groupe de fêtards que Jean Perron a fustigé.

Ceux qui pensent alcool à profusion ont raison. Mais ils n'ont pas le portrait global de la situation. Ce qu'on m'a raconté, hier, était bien plus sérieux. Et je comprends Jean Perron d'avoir pris sur lui d'appeler Bob Gainey pour le prévenir de ce qu'il avait appris.

Sergei Kostitsyn a pris le chemin de Hamilton où la vie mondaine est moins turbulente qu'à Montréal. Alex Kovalev, un monsieur qui n'a certainement pas fait honte à l'uniforme et à la réputation du Canadien, est chez lui... en repos complet pour quelques jours. Kostitsyn n'a pas à s'inquiéter, Bob Gainey l'a déjà rassuré. Il va revenir vite avec le grand club. Quand on ne s'appelle pas Lapierre, c'est plus facile.

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Ce n'est pas la première fois que vos p'tits gars se saoûlent et sautent des filles dans les bars de la ville. C'est la première fois que ça semble aussi sauvage et débridé. Faut dire que vos jeunes millionnaires sont lâchés lousse dans la ville pleine de tentations. Quand c'est rendu que Carey Price se promène dans les bars avec un gars qui se dit son garde du corps, faut que les filles soient dangereuses.

Les temps changent. Il y a quelques conquêtes de la Coupe Stanley, un gars comme Peter Svoboda, fringant et fougueux, demeurait chez Larry Wilson, le président du parti libéral du Québec, ami de Serge Savard et père de Paul Wilson, le Paul Wilson qui faisait les communications dans la crise du Grand Prix. Les amis de Serge Savard avaient tous un rôle dans l'encadrement des p'tits boeufs testostéronés qui débarquaient dans la grande ville.

Ailleurs, Sidney Crosby a demeuré chez Mario Lemieux, Vincent Lecavalier a créché chez Jacques Demers et de nombreux jeunes ont eu droit à des pensions protégées contre les tentations.

Malgré toutes ces précautions, malgré Pat Burns et Ronald Corey, les Chris Chelios, Peter Svoboda, Shayne Corson et compagnie arrivaient encore à se mettre dans le pétrin. Imaginez comment ça se passe en 2009 sans cet encadrement!

Ça serait bon que Pierre Boivin réponde à quelques questions sur le sujet. L'organisation est quand même sa responsabilité.

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Bob Gainey a pris une étrange décision dans le cas d'Alex Kovalev. C'est une profonde humiliation qu'il a fait endurer à son joueur-vedette.

Gainey et Kovalev se sont rencontrés hier. Je sais que Gainey aime beaucoup Kovalev, je sais aussi que Guy Carbonneau n'a jamais digéré les accusations lancées contre lui à un journal russe par Kovalev il y a trois ans.

Il n'y a pas de joueurs aussi talentueux que Kovalev sur le marché. Si Bob Gainey le laisse aller dans une transaction ratée, c'est encore une fois le Canadien qui en sera affaibli. Comme c'est arrivé avec Mike Ribeiro.

En principe, les jours de Kovalev sont comptés à Montréal. Mais j'ai quand même bon espoir de revoir le grand Russe sur la patinoire du Centre Bell pas plus tard que samedi. Les propos de Gainey et de Kovalev semblent ouvrir une porte. Ce sera à Carbo de faire son bout de chemin, demain, et le Canadien pourrait se retrouver dans une bien meilleure forme qu'actuellement. Le soubresaut d'hier ne garantit pas une place dans les séries éliminatoires.

Le ministre Dupuis suit le dossier

Le départ de Mario Latraverse a bouleversé les habitudes de la Régie de la sécurité dans les sports. M. Latraverse était la personne compétente dans le nid douillet des bureaucrates. Son successeur, Réjean Thériault, s'est vite mis les pieds dans le plat dans le dossier des sports extrêmes. Ça fait 10 ans que la Régie tolère et supervise les soirées de combats extrêmes. En plus, 22 000 spectateurs ont assisté à une victoire de Georges St-Pierre, un magnifique athlète, sans doute le Québécois le plus connu sur la planète sport. Et on attend 22 000 spectateurs pour le prochain spectacle en avril. Sans compter que le réseau TQS présente tous les vendredis en soirée des combats extrêmes.

M. Thériault a déclaré à CKAC que la réglementation était plus importante que les retombées provoquées par ces soirées fort bien organisées et bien arbitrées. C'est un réflexe de nomenklatura. Ce qui est important, ce n'est pas le bon sens, c'est la réglementation. Heureusement, le ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, a suivi le dossier de très près. Sans commettre d'ingérence au sein de la Régie, il s'est tenu au courant de tout le feuilleton. Il se retrouvait dans une étrange situation. Personne ne veut prendre le risque d'une mort dans une arène, et c'est compréhensible. Mais il y a des morts dans la boxe, dans le parachutisme et dans le hockey. En même temps, si Thériault avait raison, ça voulait dire que la régie avait fait preuve d'incompétence et d'insouciance crasses pendant dix ans.

Il y a eu des meetings, mardi soir, et tout semble se diriger vers une solution de bon sens.

Le départ de Gobeil...

Pierre Gobeil n'est plus. Gobeil est celui qui a inventé l'expression «écrire debout devant le Forum» pour souligner qu'il refusait de jouer les petites combines imposées par l'organisation dans les années 60. C'était un boss incroyable. Un vrai voyou attachant, féroce compétiteur et un leader incomparable. Quand on était à l'étranger et que le téléphone sonnait à 8h et qu'on entendait la voix déjà enfumée de Gobeil: «Mon Bleuet, t'as une calvaisse de chronique à matin. Sont tous torchés!», on était prêt à repartir pour une autre journée de 16 heures. J'allais le voir parfois en Floride, quand il venait y passer quelques semaines. Depuis qu'il avait pris sa retraite, je l'appelais dès que je voulais savoir quelque chose sur la boxe. C'était ma façon d'avoir de ses nouvelles. C'est lui qui a convaincu la direction de La Presse d'ouvrir un poste de columnist au sport. Les autres columnists ont suivi. C'est lui qui critiquait chacune de ces premières chroniques, matin après matin. En me faisant lire de temps en temps des textes de Dick Young et de Jimmy Breslin, ses idoles. Méchantes bottines à remplir.

Je l'aimais profondément.