Il y a des défaites qui grandissent un homme. Depuis deux ans, malgré une fiche de 20 victoires et aucune défaite, les amateurs de boxe doutaient de Jean Pascal. On le trouvait grand parleur, ce qu'il est sans doute, mais quand un homme est intelligent et instruit, il lui arrive d'avoir des choses à dire.

On avait peur également qu'il soit un de ces beaux boxeurs avec une mâchoire de verre. C'était une crainte que je partageais avec d'autres depuis son combat au Hard Rock Casino à Fort Lauderdale, le 11 janvier dernier. J'ai couvert ce combat et même si Pascal avait nettement remporté le match, il avait très mal réagi quand il s'était fait frapper d'aplomb en milieu de combat. Il avait baissé les bras et s'était terriblement rendu vulnérable devant son adversaire. Un meilleur boxeur l'aurait achevé.

Mais doute ou pas doute, il avait toujours bien une fiche de 20-0.

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J'ai toujours beaucoup aimé Jean Pascal. Bon joueur de hockey, il aurait aimé être le premier attaquant noir dans une série de télé. Bon gars, on jasait de hockey avant un de ses combats. Et il le faisait avec une élégance belle à partager. Dans son vestiaire, il y avait une place pour Stéphane Ouellet à qui il avait emprunté sa musique pour monter dans le ring. Et alors que tant de gens du milieu traitent Stéphane Ouellet comme un itinérant, Jean Pascal a toujours montré un respect plein de dignité et de générosité pour l'ancienne gloire locale. Un respect qui grandit celui qui le montre. Et qui fait du bien à celui qui en est le sujet.

Quand il ne jasait pas hockey, Jean Pascal parlait de son autre passion. Diplômé de l'Institut de police, c'est la profession qui l'attend quand il accrochera ses gants de boxeur professionnel. Dans la mouvance actuelle de Montréal-Nord, être un jeune Haïtien et rêver d'être un policier qui fera du bien demande une autre forme de courage.

Grande gueule, Jean Pascal ? Tant mieux, pourquoi aurait-on peur d'exprimer ce qu'on pense ? Et depuis samedi soir, Jean Pascal a parfaitement mérité de dire ce qu'il pense. Quand on montre autant de courage, quand on affiche autant de détermination dans un combat, quand on va à la limite de ses forces et de son talent, quand on fait honneur à tous ceux qui nous aiment et qui croient en nous, alors on revient auréolé parmi les siens.

Curieusement, c'est quand on va à la limite qu'on apprend à garder le silence. Après sa cruelle défaite contre le champion Carl Froch, Jean Pascal a laissé couler quelques larmes. Ça aussi, il en avait le droit. Quand on a tout donné et qu'on est battu par quelqu'un de meilleur ce soir-là, on a le droit d'être déçu. Et mieux on s'est battu et plus on a le droit de verser des larmes.

C'est une défaite qui va faire le plus grand bien à Jean Pascal. En fait, c'est faux. C'est comme une longue randonnée de moto sous la pluie. Ce n'est pas la destination qui compte, c'est le voyage. Ce sont ces 12 rounds endiablés, marqués de coups de poing et de coups de coeur qui vont transformer Jean Pascal. Le grand garçon parlait beaucoup mais je sais qu'il le faisait parfois pour camoufler le doute. Il n'avait jamais traversé l'enfer. Il n'avait jamais fait le voyage. C'est fait. Jean Pascal va gagner d'autres matchs, il va lui arriver d'en perdre. Mais il ne doutera plus jamais de lui. Il sait qu'il a le courage et le coeur d'un champion. Ça va être vrai dans un ring et ça va être vrai dans la vie.

Ce gars-là est parti pour Nottingham avec les doutes d'un grand adolescent, il en revient un homme qui sait ce qu'il a dans le ventre.

C'est le voyage qui compte, pas la destination.

DANS LE CALEPIN - Un match plate de football, c'est un match plate. Et NFL ou pas, ça reste plate. Même que je dirais qu'une platitude dans la grosse ligue des riches est encore plus plate que dans notre CFL un peu folklorique. Même les Tiger Cats de Hamilton n'ont pas été aussi ennuyants que les Bills de Buffalo ce dimanche dans ce qui devait être un match « historique « disputé à Toronto. Ceux qui croyaient qu'il suffisait d'imprimer NFL sur un ticket pour le vendre 200$ à un fan éperdu de reconnaissance devront refaire leurs devoirs. Le contrat qui lie Toronto et la NFL est valable pour cinq ans. Donc, les propriétaires des Bills vont avoir la chance de mieux étudier le grand marché de Toronto lors des prochaines présentations d'un match dans le Stade Rogers. Ce succès fort mitigé ne nuira pas aux chances de Toronto de mettre la main un jour sur une concession de la NFL. Seul Los Angeles devance Toronto comme marché potentiel. Une fois que la mégapole qu'est L.A aura son équipe, il sera sans doute possible de transplanter une équipe au Canada. Si ça fait le bonheur ($$$) des propriétaires évidemment.