Allons bon, Kim Jong-il est mort. Ah tiens, Vaclav Havel aussi.

Ce n'est pas pour critiquer mon journal, qui est le meilleur journal du monde, mais j'aurais fait l'inverse si on m'avait demandé de monter la une de lundi. En haut, Vaclav Havel. En bas, dans un coin, sous les nouveaux modèles de motoneiges, Kim Jong-il qui a succombé à un grand épuisement mental et physique.

J'en ai parlé aussitôt à ma fiancée: crois-tu, mon amour, que la mort me guette, moi aussi, pour cause de grand épuisement mental?

Elle ne m'a pas répondu, comme si c'était elle qui était fatiguée. On est toujours en train de déconner sur ce qu'on va écrire sur ma petite boîte quand je serai mort.Mais si jamais c'est elle qui meurt avant moi, c'est ce que j'écrirai sur la sienne: elle était épuisée comme Kim Jong-il.

Anyway. Vaclav Havel, dramaturge de l'absurde, méritait cent fois plus la manchette que l'autre absurde tôton. Vaclav Havel a été notre bonne nouvelle de l'après-communisme: héros du Printemps de Prague, puis leader de la Révolution de velours, il est devenu le premier président de la Tchécoslovaquie postcommuniste sans jamais devenir un capitaliste enthousiaste; au contraire, jusqu'à sa retraite du pouvoir en 2003, il dénoncera les outrances du capitalisme.

Mais surtout, Vaclav Havel, c'est l'écrivain qui, devenu chef d'État, continue d'affirmer la primauté de la culture, qui fait l'éloge de la pensée complexe et qui dénoncera jusqu'à la fin la bêtise, la facilité, la consommation - un chef d'État qui dénonce la consommation! - la télévision aussi, et qui ne se reniera jamais comme intellectuel, ne donnera jamais dans le populisme. Il a été notre consolation à nous, orphelins de la gauche. À la fin, nous l'aimions plus que les Tchèques eux-mêmes, qui se sont mis à lui reprocher des niaiseries comme de s'être remarié trop vite avec une actrice un an après la mort de sa femme.

Un an, fiancée, trouves-tu que c'est correct? Mettons que tu meurs, je me retrouve une fiancée en dedans d'un an, une actrice, 18 ans plus jeune que moi, ce qui lui ferait quand même 53 ans, d'après toi, Marie-Josée Croze, c'tu à peu près ce qu'elle a, 53 ans?

Anyway, Havel fait penser à Trudeau non seulement par son anticonformisme, mais aussi - nobody is perfect - par sa farouche opposition à la séparation de la Slovaquie en 1992.

Non, je n'ai jamais rien lu de Havel, et vous?

PATRICK ROY - Ce qui serait amusant, les chances que cela arrive sont très très très minces, je vous l'accorde. Ce qui serait amusant, c'est que le Canadien gagne la Coupe Stanley avec Randy Cunneyworth comme entraîneur. Ou, sans rêver aussi loin, que le Canadien aille en finale de division. Là, on aurait un vrai débat de société.

La victoire unilingue ou la médiocrité bilingue? Ah ah.

Je ne vous cacherai pas plus longtemps que je souhaite beaucoup de succès à M. Cunneyworth et cela n'a rien à voir avec son unilinguisme. Cela à avoir avec Patrick Roy.

Je trouve qu'il serait dommage qu'on enlève Patrick Roy à Québec. Patrick Roy appartient à Québec. Il en incarne l'esprit, mais surtout l'esprit de Val-Bélair, de Beauport, de Vanier, il est l'inspiration de ces dynamiques radios qui font la personnalité de la capitale, même urbanité virile, même regard sur la société. Patrick Roy n'est pas seulement de Québec, il est Québec. Il faut absolument le laisser là.

Alors on s'entend comme ça?

Patrick Roy reste à Québec.

M. Cunneyworth gagne la Coupe Stanley. Et je lui donne des cours de français. Mais si je suis capable. J'ai été prof à Berlitz deux ou trois ans. J'allais donner des cours aux cadres supérieurs dans les grandes industries à Sorel, chez Kraft, j'étais même un assez bon prof, et la méthode Berlitz est une méthode étonnamment efficace avec les élèves moyens - pas bêtes au point de ne rien comprendre, pas allumés au point de chercher à comprendre - et quelque chose me dit que M. Cunneyworth est de cette moyenne-là.

JOURNALISME - Je lisais l'autre jour dans la chronique de mon collègue Vincent Marissal qu'il s'était fait offrir un repas par M. Accurso et qu'il avait refusé, le nono. Est-ce dans le même restaurant du Vieux-Montréal où j'ai dîné avec l'avocat de ce même M. Accurso voilà quelques mois? Je ne lui ai pas demandé ce qu'il me voulait exactement, et il ne me l'a pas dit. On a fait semblant d'être deux vieux amis, même si on se voyait pour la première fois. Je sentais bien que je passais un examen, j'ai dû le rater puisqu'il ne m'a jamais rappelé.

Je peux vous dire un truc, maître? Votre invitation m'a presque insulté: ils me prennent pour un con. Mais que vous n'ayez pas donné suite aussi m'a insulté: ils me prennent pour un journaliste.

LA LOI DES CATASTROPHES - Kyoto, le registre des armes à feu, la loi sur les jeunes contrevenants, comme vous êtes indignés! Et vous m'interpellez: on ne vous entend guère sur ces dossiers qui déchirent le pays!

M'avez-vous entendu souvent sur l'environnement sauf pour parler des pesticides? Je crois n'avoir jamais prononcé le mot [ozone] de ma vie. Anyway. Combien de fois faudra-t-il vous répéter mon credo trotskiste: quand ça va très mal, c'est que ça va déjà beaucoup mieux.

J'ajoute ceci, emprunté à Annie Ernaux moins d'un an après l'élection de Sarkozy - Harper aussi ça fait moins d'un an: une catastrophe doit aller à son terme.