C'est un livre essentiel. Un livre-référence. Un livre qu'il faut avoir sous la main pour ne pas rester une patte en l'air quand vous entendrez le ministre des Ressources naturelles, ou M. Lucien Bouchard, ou quelque autre Facal dire que c'est bien beau, la répartition de la richesse, mais pour la répartir, il faut d'abord en créer... cette immense tarte à la crème des idéologues de droite.

Ce livre essentiel, c'est De colère et d'espoir de Françoise David, publié chez Écosociété.

Si vous êtes de ces gens, comme moi, plus ou moins analphabètes politiques, complètement nuls en économie et néanmoins convaincus que le bien-être des humains ne peut pas dépendre de la course effrénée aux profits, ni de la consommation, pour qui le «go shopping» du 12 septembre de M. Bush était une indignité presque aussi grande que celle à laquelle elle répondait...

Alors vous devez lire De colère et d'espoir, de Françoise David.

Même si vous n'êtes pas de gauche vraiment, si vous pensez comme beaucoup que le capitalisme est sans doute incontournable sauf qu'il ne doit pas, qu'il ne peut pas être toute la société, que le rôle de la société est justement de civiliser le capitalisme, de le faire cohabiter avec les droits fondamentaux des individus, droit au logement, droit à l'éducation gratuite parce que si elle n'est plus gratuite, elle devient un privilège, même chose pour la santé, bref, si vous croyez que l'égalité n'est pas l'égalitarisme...

Alors vous devez lire De colère et d'espoir de Françoise David.

Si vous n'avez rien compris aux récentes crises financières mondiales, sauf que vous avez très bien compris que les profits des banques étaient privés mais que leurs pertes étaient publiques, si vous vous posez ce genre de question: être de gauche a-t-il encore un sens? Alors vous devez lire De colère et d'espoir.

Mais je dois vous avertir: ce n'est pas un thriller. C'est même un peu plate. Plus qu'un livre, on est devant un dictionnaire, un répertoire, qui aurait gagné à s'adjoindre un index qui eût renvoyé aux mots-clés, féminisme voile gaz de schiste travail au noir précarité syndicalisme salaire minimum-maximum guignolée immigrants engagement - langue française personnes âgées - commerce de proximité économie plurielle, etc.

Un répertoire à annoter pour retrouver l'endroit quand le ministre des Ressources naturelles assène à Maisonneuve qu'avant de répartir la richesse, il faut la créer. Ah voilà! Pages 164-165, économie alternative. Le voile, page 120, l'immigration, page 111, etc.

Cela dit, il y a des erreurs, petites mais qui disent pourquoi Françoise ne sera jamais Amir Khadir, pourquoi j'entretiens les plus grandes craintes quant à ses chances de se faire enfin élire dans Gouin (troisième tentative) aux prochaines élections.

Page 171, ceci: Nous (Québec solidaire) avons un député, Amir Khadir. Il est populaire. Parce qu'il dérange l'establishment. Françoise, je vais oser, par amitié, ce qu'aucun de tes conseillers n'oserait, par respect: déranger l'establishment, c'est seulement la moitié de la popularité d'Amir. L'autre moitié, c'est son show. Amir donne un super bon show, sans cabotiner (ou à peine), et c'est parce qu'il donne un très bon show qu'il dérange l'establishment.

Il manque à ton livre la moitié spectacle. Je crains qu'elle ne soit pas dans ta nature. Je crains que tu n'y condescendes jamais. Je crains, pour tout dire, qu'aux prochaines élections, il te manque «la part du show».

MAXIME Dans ces histoires de «nous sommes maintenant sept milliards, pis après?», le Japon se distingue par son taux d'accroissement annuel extrêmement bas, le Japon qui ne fait presque plus d'enfants, c'est la mauvaise nouvelle pour les Japonais. La bonne? Vous vous rappelez mon ami Maxiiiiime qui vit au Japon? Sa femme, japonaise, est enceinte.

Un des derniers courriels de Maxiiime commençait à peu près comme ceci, «tout en vous écrivant, j'écoute du Nicola Ciccone sur YouTube».

Je lui réponds un peu vivement, arrête donc de déconner, Maxiiime, hipster comme tu l'es, tu n'écoutes certainement pas du Ciccone.

Je ne suis plus hipster, proteste-t-il dans son dernier courriel. Je l'ai été de 17 à 21 ans, je m'étais fait faire un t-shirt qui disait «I just need a nuclear job», c'est ma femme qui le porte comme pyjama.

À part ça, monsieur le chroniqueur, ça ne va pas trop bien, mon projet d'écrire des chansons western en japonais piétine, heureusement j'ai des lectures inspirantes, je viens de commander deux livres dont j'attends qu'ils me redonnent le goût de m'éclater, Modern Carpentry et How to Land Helicopters... Et je vous jure que c'est totalement vrai, j'écoute du Nicola Ciccone, vous ne faites jamais ça, vous, plonger dans la merde pour vous rassurer sur la vôtre?

Je fais ça tout le temps, Maxime, mais ça ne me rassure pas du tout.

UN AUTRE HIPSTER Parlant de ce qui est hip, hipster, déliquescent (mais déliquescent à force de normalité), vous devriez essayer Hongrie-Hollywood Express, un petit roman d'Éric Plamondon (Le Quartanier), une vraie-fausse biographie de Johnny Weissmuller. Réjouissant. On pense au Brautigan de Willard et ses trophées de bowling, en moins sauté quoique avec les hipsters on ne sait jamais, moins, c'est sauté, plus ça l'est.

Tant qu'à ça, dans le genre moins c'est sauté, plus ça l'est, le pompon irait, sans aucune contestation, à mon amie Françoise.