Il y a eu le but de Matteo Mancosu, inscrit d'un tir sec et puissant. Et les arrêts d'Evan Bush, auteur d'un ou deux miracles. Et l'aplomb des défenseurs, imperturbables face aux assauts des Red Bulls. Et la pugnacité des milieux de terrain, énergiques de bout en bout. Oui, Mauro Biello avait plusieurs raisons d'être heureux, hier.

C'est pourtant un autre évènement, n'ayant rien à voir avec des considérations techniques ou stratégiques, qui expliquait l'étincelle dans ses yeux après le match: la manière dont ses joueurs ont célébré le seul but de la rencontre, tous ensemble, dans un élan de joie irrésistible.

«Ce lien, c'est quelque chose de très fort, a estimé l'entraîneur de l'Impact. Quand une équipe a ça, elle devient puissante. Ça m'a démontré que nous sommes unis. C'est ce que j'ai dit aux joueurs. Quand on a cette solidarité dans le groupe, on est difficile à battre.»

- Leur réaction t'a étonné, Mauro?

- Non, mais elle m'a fait grand plaisir. Elle est le résultat de tout leur travail de l'année. C'est ce qui permet de réussir dans des moments pas faciles. Et ils l'ont fait ensemble.

Ensemble. Dans la bouche de Biello, le mot n'est pas banal. Il traduit un état d'esprit essentiel pour surprendre en séries éliminatoires.

On le comprend mieux aujourd'hui: en éliminant D.C. United à Washington jeudi dernier, l'Impact a fait beaucoup plus que remporter une victoire inattendue. L'équipe a grandi en confiance. Et cela lui a permis d'aborder le match d'hier avec sérénité, malgré le court repos et la puissance de l'adversaire. Imaginez: le dernier échec des Red Bulls remontait au 3 juillet dernier! Ils sont des candidats logiques à l'obtention du championnat de la Major League Soccer (MLS). Et voilà que l'Impact, contre toute attente, complique leur tâche.

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Les Red Bulls sont dirigés par Jesse Marsch, qui était à la barre de l'Impact en 2012. Après le match, il avait répondu aux questions des journalistes dans la même salle où, quatre ans plus tôt, il a annoncé la fin de son association avec l'équipe. Entre le duo Joey Saputo-Nick De Santis et lui, le courant ne passait plus.

Marsch n'a pas vraiment changé depuis cette époque. Sympathique et élégant, tout en lui respire l'assurance. Le résultat d'hier? «Nous n'en sommes qu'à la mi-temps d'un match qui se poursuivra dimanche prochain», a-t-il répondu, semblant davantage croire à l'accident de parcours qu'à une tendance lourde.

Marsch ferait peut-être mieux de se méfier. L'Impact n'est sûrement pas le meilleur club de la ligue. Mais l'histoire du sport professionnel est pleine d'exemples où des équipes négligées, se regroupant au bon moment, accomplissent un exploit à la surprise générale.

On verra bientôt si le bleu-blanc-noir concrétisera l'opération amorcée hier. Chose certaine, les joueurs y croient à fond.

«C'est bien d'être vus comme des outsiders, dit Hassoun Camara. On ira à New York avec beaucoup d'humilité, mais dans l'intention de faire un résultat. On a vu beaucoup de scepticisme autour de nous, par rapport à certaines histoires ou même à la qualité de jeu. Des gens nous pensaient incapables de faire ce genre de performance. Mais nous, on est sûrs de nous, très solidaires et on sait où on veut aller. On vit une belle aventure.»

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Didier Drogba? Toujours ennuyé par un malaise au dos, il n'était pas en uniforme. Ironiquement, son absence a sans doute simplifié la tâche de Biello.

Avec l'Impact en avance 1-0 après une heure de jeu, l'important était d'empêcher les Red Bulls de marquer. En séries, une prime est associée aux buts inscrits à l'étranger. Ils servent de bris d'égalité dans les confrontations aller-retour. Dans les circonstances, Biello aurait-il envoyé Drogba dans la mêlée alors qu'il ne s'est pas entraîné depuis plusieurs jours et que sa forme n'est pas optimale? Et s'il ne l'avait pas fait, une autre crise aurait-elle éclaté?

Drogba a retrouvé ses coéquipiers dans le vestiaire après la rencontre. On verra s'il sera suffisamment rétabli pour participer au match à New York.

Malgré le succès de Mancosu, l'Impact a besoin de son numéro 11, même si ce n'est qu'en relève. S'il accepte ce rôle, son expérience des grands matchs servira bien l'équipe.

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À peine 15 000 personnes ont assisté à la rencontre, un chiffre décevant pour l'Impact. L'organisation croyait en attirer au moins 2000 de plus. La température était fraîche, mais acceptable pour cette période de l'année. Et le coup d'envoi a été donné en milieu d'après-midi, un moment idéal pour les jeunes familles.

Évitons cependant d'en tirer de grandes conclusions sur la popularité de l'Impact. Le problème est d'abord dû au format des séries de la MLS. Les équipes remportant un match de barrage ont très peu de temps pour vendre leurs billets en vue de la ronde suivante. La direction du circuit devra se pencher sur ce problème récurrent qui conduit, année après année, à une anomalie: des équipes attirent des foules moins nombreuses en séries que durant le calendrier régulier.

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«Chaque match a son histoire et sa vérité», a dit Hassoun Camara, qui résumait ainsi de manière magnifique la beauté des séries éliminatoires.

On verra quelle histoire et quelle vérité s'écriront à New York dimanche prochain. Mais si l'Impact joue «ensemble», pour reprendre le mot-clé de Biello, on verra peut-être encore du soccer au stade Saputo cet automne. Après une saison en demi-teinte, cette équipe est animée d'une fougue étonnante.