On s'inquiète beaucoup du leadership de Max Pacioretty ces jours-ci. Mais qu'en est-il de celui de ses deux patrons, Marc Bergevin et Michel Therrien?

Depuis deux jours, j'attends que l'un d'eux se porte de manière claire et ferme à la défense de Pacioretty et démente les allégations du collègue Michel Villeneuve. Celui-ci soutient que Therrien, plus tôt cet été, a tenu des propos d'une sévérité absolue à propos du travail du numéro 67 à titre de capitaine.

Par solidarité avec Pacioretty, le DG et l'entraîneur-chef auraient dû publiquement éteindre cette controverse dans l'oeuf. D'autant qu'ils savent très bien qu'en raison de la Coupe du monde, l'histoire fait des vagues sur toute la planète hockey.

Face à leur silence, Pacioretty a dû réagir seul aux questions à ce sujet, hier. Pendant que Therrien se terre dans un mutisme regrettable, Bergevin joue la carte du gars pas trop au courant de l'histoire, ce qui revient à prendre les amateurs pour des naïfs, évidemment.

Devant les journalistes hier, Pacioretty a fait preuve de leadership, comme le démontrent les nombreuses dépêches à ce sujet. Il a répondu aux questions avec doigté et sans faux-fuyant. Il a reconnu avoir discuté avec Therrien depuis le déclenchement de cette affaire, qu'il a qualifiée de manifestement fausse.

Michel Villeneuve, à qui j'ai parlé hier, assure qu'elle est au contraire très vraie. Ses propos ont du poids, car on ne bâtit pas une carrière aussi solide que la sienne sur des informations erronées. Mais en l'absence de précisions additionnelles sur les circonstances de l'affaire, attendons avant de trancher. On verra la suite des évènements.

Il reste que ce n'est pas la première fois que le duo Bergevin-Therrien laisse Pacioretty seul dans l'eau bouillante. La saison dernière, lorsqu'Alex Galchenyuk s'est retrouvé au coeur d'une nouvelle embarrassante, ils ont préféré se réfugier dans leurs bureaux plutôt que de commenter. Ce fut donc au capitaine, et à Brendan Gallagher, de représenter l'organisation ce jour-là. Les deux ont très bien parlé. Du grand leadership, à mon avis.

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Max Pacioretty est-il le pire capitaine de l'histoire du Canadien ? Il faut espérer que Therrien n'a jamais prononcé pareille absurdité. Car prétendre une chose comme celle-là est complètement loufoque.

Apprivoiser le rôle de capitaine est une affaire complexe pour laquelle il n'existe pas de véritable préparation. Encore plus lorsqu'il est question d'une organisation aussi prestigieuse que celle du Canadien, qui génère un formidable intérêt dans son marché. Un nouveau capitaine a sûrement le souffle un peu coupé en scrutant la liste de ses prédécesseurs. 

Même Jean Béliveau a eu besoin de temps avant de saisir toutes les nuances de la tâche.

Pacioretty, ne l'oublions pas, a eu le malheur d'étrenner le «C» sur son maillot durant une saison catastrophique. Tenaillé par une double pression, marquer des buts et inspirer ses camarades, il a lui-même joué largement en deçà de son potentiel. Malgré les défaites, il s'est tenu debout devant les journalistes et s'est comporté avec dignité.

Cela dit, Michel Therrien a-t-il été déçu de la manière dont ses jeunes leaders ont réagi à l'adversité la saison dernière? Aucun doute là-dessus!

En avril dernier, la saison terminée, j'ai longtemps discuté avec lui dans son bureau de Brossard. Il a reconnu que son équipe avait manqué de maturité dans le vestiaire. «J'aurais pensé qu'on aurait mûri, m'a-t-il dit. Mais dans les épreuves, on ne l'a pas toujours fait de la bonne manière.»

Therrien n'a pas émis ces propos sur un ton de reproche. Et il n'a pas évoqué le nom de Pacioretty en évoquant ce sujet. Il déplorait un problème d'attitude collectif, sans cibler un joueur en particulier. À son avis, le groupe ne s'était pas montré assez fort mentalement pour stopper la dégringolade ayant suivi la blessure de Carey Price.

Comme tous les entraîneurs dirigeant une équipe désorientée, Therrien aurait sûrement aimé qu'un joueur, le capitaine ou un autre, soit en mesure de rallier les troupes. À l'évidence, cela ne s'est pas produit. Et l'entraîneur a très bien réalisé que son équipe ne comptait pas un assez grand nombre de joueurs ayant vu neiger, capables de freiner une glissade avant qu'il ne soit trop tard. Ce constat explique d'ailleurs plusieurs gestes de la direction au cours de l'été. Il fallait renforcer la fibre psychologique de l'équipe.

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Obtenir la promotion souhaitée est toujours une bonne nouvelle dans une carrière, peu importe son secteur d'activité. Le seul ennui, c'est qu'on a une seule journée pour célébrer, celle où la nomination est annoncée! Ensuite, le travail commence. Et il n'est pas toujours facile de s'adapter à des responsabilités accrues. On commet des erreurs, il faut du temps pour s'ajuster. Mais les gens avec du potentiel trouvent inévitablement leurs repères.

C'est en plein l'expérience que Pacioretty vit depuis l'automne dernier. Et il réussira parce qu'il est un homme réfléchi, avec le coeur à la bonne place, et capable de tirer des leçons de ses expériences passées. Et il jouit manifestement du respect et de l'appui de ses coéquipiers.

En tardant à réagir officiellement à cette «affaire Pacioretty», le Canadien commet une erreur. Elle continuera d'alimenter les conversations au moins jusqu'à mardi prochain, lorsque se tiendra le tournoi de golf de l'organisation, manière symbolique de marquer la rentrée.

En l'absence de Bergevin, qui sera à Toronto pour la Coupe du monde, Therrien se retrouvera devant des dizaines de journalistes. Je vous laisse deviner la première question qui lui sera posée...