La valeur du huard face au dollar américain diminue-t-elle temporairement l'appétit de Québecor pour une équipe de la LNH? Les propos de Brian Mulroney à mon collègue Vincent Brousseau-Pouliot, hier, autorisent la question.

Pour la deuxième fois depuis mars dernier, le président du conseil d'administration de Québecor a mis un bémol à la renaissance prochaine des Nordiques. Même s'il laisse une porte ouverte, il qualifie les chances à court terme de «minces». En clair, à moins d'une surprise, il ne croit pas que la LNH accueillera bientôt Québec en ses rangs.

Si la LNH ne veut pas de Québec à l'heure actuelle, c'est son droit le plus strict. Elle est libre de prendre les décisions qu'elle estime les meilleures pour son avenir économique. En revanche, le fait que M. Mulroney évoque de nouveau le poids de notre monnaie comme un «défi» à la réalisation du projet ouvre la porte à plusieurs interprétations.

Pourquoi? Tout simplement parce que le contraste avec sa déclaration du 29 septembre dernier est saisissant. Ce jour-là, après avoir présenté le plan d'affaires de Québecor aux autorités du circuit, M. Mulroney avait affirmé que la valeur du dollar canadien ne constituait pas un obstacle aux intentions de l'entreprise. «C'est un facteur important, mais même avec le taux de change, nous pouvons supporter une équipe», avait-il dit.

À ce moment-là, le huard cotait au même niveau qu'aujourd'hui. Alors, que s'est-il produit depuis ce temps? Pourquoi une situation ne posant pas d'ennuis l'automne dernier devient-elle inquiétante ce printemps?

Bien sûr, le dollar canadien a plongé très bas en janvier, ce qui a créé un effet psychologique évident. Mais il s'est ensuite relevé, au même rythme que les cours du pétrole.

Une explication plausible est que la LNH se soucie aussi des effets de notre devise. 

Le circuit n'a pas oublié la période noire du début des années 2000, lorsque le dollar canadien a valu à peine 62 cents US. Avant d'ajouter une équipe canadienne, la LNH veut peut-être voir si son récent rebond se poursuivra.

Même si les dirigeants de Québecor indiquent que le retour des Nordiques demeure dans leurs plans, leur ton s'est légèrement modifié. Comme si l'enthousiasme ayant suivi l'ouverture du Centre Vidéotron en septembre dernier s'était refroidi.

Le coût d'une équipe de l'expansion est important, c'est vrai: plus de 655 millions CAN si la transaction était bouclée cette semaine. Québecor ne s'attendait pas à un prix si élevé en embrassant le projet il y a cinq ans.

Hélas pour Québec, la valeur des équipes professionnelles a bondi depuis cette époque. Winnipeg, qui a payé 170 millions US les Thrashers d'Atlanta en 2011, est la dernière ville à avoir profité d'un prix d'ami.

***

À défaut d'un club de l'expansion, Québec pourrait-elle accueillir une équipe de la LNH en difficulté? Les Hurricanes de la Caroline sont les premiers candidats. Cette saison, l'équipe a attiré une foule moyenne de 12 200 spectateurs par match, la plus faible du circuit.

Plus encore: Pete Karmanos, le propriétaire des Hurricanes, tente depuis deux ans de vendre une partie de ses actions. À ce jour, aucun investisseur sérieux ne s'est manifesté, ce qui est révélateur des perspectives financières de l'organisation. Et voilà qu'une chicane de famille s'ajoute au tableau.

Trois des fils de M. Karmanos ont déposé un recours en justice contre lui devant un tribunal du Michigan. Ils lui reprochent de ne pas avoir remboursé les intérêts sur des prêts contractés auprès d'une fiducie créée à leur intention. À leur avis, ce défaut de paiement rend le capital et les intérêts immédiatement exigibles, une affaire de plus de 100 millions US.

La poursuite allègue aussi que M. Karmanos, de 2000 à 2013, aurait obtenu des prêts et des avances d'une valeur de plusieurs dizaines de millions, à la suite d'accords passés avec des banques et la LNH, afin d'assumer les obligations des Hurricanes. La fiducie aurait servi de sûreté.

Bill Daly, le commissaire adjoint de la LNH, a déclaré jeudi à Sportsnet que cette affaire ne devrait pas avoir d'impact sur l'organisation. Il y voit plutôt une «querelle de famille». Peut-être. Mais cette histoire ne donne pas une image de force aux Hurricanes. Hier, le News-Observer, le grand quotidien local, s'inquiétait déjà de ses répercussions.

La LNH a prouvé en Arizona et en Floride qu'elle multipliait les efforts pour éviter le déménagement de ses équipes américaines.

On peut croire que Gary Bettman utilisera de nouveau l'artillerie lourde pour s'assurer que les Hurricanes ne quittent pas la Caroline-du-Nord si Karmanos devait un jour, par choix ou par obligation, se défaire de l'équipe.

Et si les Hurricanes devaient déménager, rien ne dit que ce serait dans une ville canadienne. En clair, jusqu'à preuve du contraire, l'expansion semble une façon plus logique pour Québec d'obtenir une équipe qu'un hypothétique transfert de concession. À moins que la situation en Caroline-du-Nord ne devienne rapidement aussi désespérée qu'à Atlanta à l'époque.

***

Si, comme semble nous le dire M. Mulroney, Québec ne reçoit pas une équipe d'expansion ce mois-ci, espérons que Québecor fera ensuite publiquement le point sur le dossier. Aux quatre coins du Québec, des amateurs de hockey croient au retour des Bleus, surtout depuis que Pierre Karl Péladeau s'est engagé dans ce projet en 2010. Et ils aimeraient avoir plus de précisions.

M. Mulroney dit croire que Québec obtiendra « éventuellement » une équipe. Il serait bon de connaître quels critères devront être atteints, notamment au niveau du taux de change, pour concrétiser ce rêve.



Un entraîneur «associé»?

Kirk Muller est de retour dans l'organisation du Canadien. Mais que veut dire exactement ce titre d'entraîneur «associé»? Cela laisse croire que son statut, son influence et son salaire seront nettement plus élevés que ceux des autres adjoints de Michel Therrien. On en saura plus long aujourd'hui lors du point de presse du Canadien.

Souhaitons que Muller ait de bonnes idées pour relancer l'avantage numérique. Un regard frais ne nuira certes pas.