À l'approche de l'Euro 2016, qui sera présenté cet été en France, l'enthousiasme devrait être contagieux.

Tenez, la France profitera-t-elle de l'appui de ses partisans pour remporter ce prestigieux championnat européen de soccer? L'Allemagne montrera-t-elle le même panache que lors de la dernière Coupe du monde? La Belgique et sa cohorte de jeunes joueurs talentueux, surnommée «la génération dorée», se faufilera-t-elle jusqu'en finale?

Hélas, l'aspect sportif vient aujourd'hui bien loin dans les pensées des organisateurs du tournoi et des millions de passionnés de ballon rond.

En novembre dernier, les attentats de Paris, où les environs du Stade de France comptaient parmi les cibles, ont rappelé à quel point la sécurité représentait maintenant l'enjeu décisif dans l'organisation d'un grand rendez-vous sportif. Mardi, ceux de Bruxelles ont renforcé cette conviction.

Ce dur constat ne date évidemment pas d'hier. En février 2002, cinq mois après les attaques du 11 septembre 2001, les Jeux olympiques de Salt Lake City ont lancé une nouvelle ère à ce chapitre. Les responsables ont alors étoffé leur plan en catastrophe, notamment afin de centraliser la prise de décision en cas d'attaque.

Depuis ce temps, cette question est au coeur des préoccupations des organisateurs. On ose à peine imaginer les sommes investies par le gouvernement Poutine pour les Jeux de Sotchi en 2014. Six semaines avant leur coup d'envoi, deux actes de terreur commis à Volgograd avaient ajouté au climat de tension.

À Londres en 2012, comme à Sotchi deux ans plus tard, des «parcs olympiques» construits comme des camps retranchés ont accueilli la majorité des épreuves.

Une fois les contrôles franchis aux points d'entrée, il était simple d'aller d'un stade à un autre. Mais tout cela a coûté une fortune, en plus de créer d'immenses espaces où l'accès était sévèrement contrôlé. Les mesures de sécurité ont un prix, et celui-ci n'est pas seulement économique.

Plus que jamais, les pays souhaitant accueillir les Jeux olympiques, la Coupe du monde de soccer ou l'Euro devront bien évaluer la note potentielle avant de se porter candidats. La facture, déjà lourde, augmentera encore. En France, le budget «sécurité» de l'Euro 2016 a été revu à la hausse afin de mieux contenir les risques.

Cela avait aussi été le cas à Londres, où il a atteint 2 milliards de dollars, une somme immense. Pensons à toutes les mesures d'équité sociale qui auraient pu être implantées avec cet argent...

Depuis 2013, les citoyens de Davos/St-Moritz, Munich, Hambourg et Cracovie ont refusé par référendum de soumettre la candidature de leur ville à des Jeux olympiques d'hiver ou d'été. Ceux d'Oslo et de Boston ont rendu le même verdict dans des sondages dévastateurs pour les promoteurs.

Le coût des infrastructures et les enjeux environnementaux expliquent en bonne partie cette réaction. Mais les mesures de sécurité toujours plus lourdes ont ajouté à l'inconfort. En plus de leur coût exorbitant, elles empêchent les citoyens de s'approprier leur ville avec la même spontanéité. Cela aussi fait réfléchir.

Le plan de sécurité mis en place pour l'Euro 2016 est majeur. Les organisateurs réussiront-ils néanmoins à préserver une ambiance de fête? Lourd mandat, on en conviendra. Leur première responsabilité est d'assurer la sécurité des participants et des spectateurs. Et de faire en sorte que la peur ne triomphe pas. En France, tous les billets sont d'ailleurs vendus.

L'Euro terminé, les yeux du monde se tourneront vers le Brésil, où les Jeux d'été s'amorceront à Rio le 5 août. Dans ce pays en pleine turbulence sociale et politique, beaucoup de travail reste à accomplir avant d'accueillir «la famille olympique». Et le dossier de la sécurité représente aussi une tâche immense.

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Avant le match de mardi au Centre Bell, les partisans du Canadien ont observé une minute de silence à la mémoire des victimes des attentats de Bruxelles. Ce fut un moment émouvant de solidarité.

Le sport, dans ce qu'il a de plus beau, permet ainsi des démonstrations d'amitié. Plus tôt dans la journée, un autre exemple en a été fourni, cette fois à La Havane, où Barack Obama a assisté à un match de baseball entre les Rays de Tampa Bay et l'équipe nationale cubaine.

L'arrivée du président des États-Unis dans le grand stade a représenté un moment unique de sa présidence sur la scène internationale. Depuis 1928, aucun de ses prédécesseurs ne s'était rendu dans ce pays. Le voir ainsi saluer la foule, qui l'a chaleureusement applaudi, montre à quel point le sport peut servir de pont entre les peuples, à exprimer ce qui unit plutôt que ce qui divise.

Les plus jeunes lecteurs ne le savent peut-être pas. Mais à l'automne 1972, le hockey a permis de créer des liens entre l'URSS et le Canada. Des équipes soviétiques nous avaient déjà visités, bien sûr. Mais cet affrontement de huit matchs, opposant les meilleurs joueurs des deux pays, était d'une autre dimension.

Au fil des rencontres, les amateurs canadiens ont découvert des athlètes extraordinaires comme Vladislav Tretiak et Valery Kharlamov. Et les Soviétiques ont appris qui étaient Phil Esposito, Yvan Cournoyer, Paul Henderson... C'était une toute petite brèche, mais une brèche quand même, dans les relations entre deux pays que tant de choses opposaient.

Un an plus tôt, le tennis de table avait rapproché la Chine et les États-Unis, ce qu'on a appelé la «diplomatie du ping-pong».

Les événements sportifs sont faits pour rassembler les gens dans la joie et la paix. Le match de baseball de mardi à La Havane, en raison de sa forte charge symbolique, était un rendez-vous hors du commun. Et au terme d'une journée si éprouvante, son succès redonne espoir.