L'après-Marc Trestman s'annonçait une période délicate pour les Alouettes. Mais personne n'avait prévu pareil dérapage. L'embauche de Dan Hawkins comme entraîneur-chef a constitué une gaffe majeure. Le nouveau venu n'avait pas le coffre pour relever ce défi.  

Comment le DG Jim Popp a-t-il pu se tromper à ce point?

Le talent de communicateur de Hawkins, qui a habilement vendu sa candidature, l'explique en partie. Cet homme est un champion pour se présenter, comme il l'a démontré le jour de sa nomination. Les yeux droits dans ceux de ses interlocuteurs, il a répondu aux questions avec aplomb, distillant au passage quelques anecdotes.

Mais ne négligeons pas un autre facteur. L'hiver dernier, Popp souhaitait graduer dans la NFL et a discuté avec certaines équipes, dont les Panthers de la Caroline. Cette ambition, au demeurant fort légitime, l'a manifestement déconcentré.

Dans le sport professionnel, une saison mal préparée est à coup sûr source d'ennuis. Les Alouettes n'ont pas échappé au phénomène.

Dans ce contexte, ne nous étonnons pas que le propriétaire Robert Wetenhall ait demandé à Popp de réparer lui-même les dégâts en prenant les rênes de l'équipe. Le DG passera ainsi plus de temps à Montréal, ce qui n'était pas dans ses habitudes.

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Chez les Alouettes, Mark Weightman est le secret le mieux gardé. Le chef des opérations, à l'emploi de l'organisation depuis près de 20 ans, en connaît tous les rouages. Parfaitement bilingue, il en est le plus efficace porte-parole. Dommage qu'il soit si discret.

«OK, on a commis une erreur avec Dan Hawkins, reconnaît-il. Son approche n'a pas fonctionné. Mais je suis très fier de la façon dont on a réagi. Notre début de saison a été tumultueux, mais on sent un vent de renouveau. »

Cette analyse est intéressante. Les Alouettes, reconnaissons-le, ont agi décisivement lorsqu'il est apparu clair que l'aventure Hawkins constituait un échec. Ce coup de barre était nécessaire pour sauver la saison et garder l'harmonie dans le vestiaire.

Le receveur éloigné Éric Deslauriers, qui s'aligne avec les Alouettes depuis sept ans, rappelle que succéder à Trestman, embauché par les Bears de Chicago l'hiver dernier, n'était pas une mince commande.

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«Habituellement, lorsqu'un entraîneur quitte une équipe, c'est parce qu'il est congédié, qu'il ne fait pas la job. Dans le cas de Trestman, il faisait la job et était apprécié des joueurs. Son départ a été un peu dur à prendre.»

Dans la LCF, seules deux équipes sur huit sont éliminées à l'issue du calendrier régulier. Compte tenu de la faiblesse des Blue Bombers de Winnipeg et des Eskimos d'Edmonton, les Alouettes devraient participer aux séries éliminatoires. Cela diminue la pression et permet à Popp de redresser la barque dans une relative sérénité.

«J'aime notre personnel d'entraîneurs et nos joueurs, dit Popp. On aura besoin de l'effort de tous pour se donner une chance de gagner chaque match. On joue avec énergie, mais il faut diminuer les erreurs, notamment les revirements.»

Les Alouettes devront aussi répondre à une question: qui remplacera Anthony Calvillo lorsque celui-ci accrochera ses crampons? Âgé de 41 ans, victime de plusieurs commotions cérébrales durant sa carrière, il ne peut plus porter l'équipe sur ses épaules.

Les Alouettes fondent de grands espoirs en Troy Smith, gagnant du trophée Heisman en 2006, embauché cet été. Le jeune Tanner Marsh montre aussi de l'ambition. L'un d'eux possède-t-il le talent et le cran pour devenir leader de l'équipe? Faudra-t-il plutôt regarder ailleurs?

Chose sûre, les Alouettes devront mieux gérer l'après-Calvillo que l'après-Trestman.

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La tempête de début de saison chez les Alouettes a généré une abondante couverture médiatique. Pour une organisation qui a longtemps estimé ne pas profiter de sa juste part de retombées sur ce plan, il s'agit d'un curieux paradoxe.

Mark Weightman espère maintenant que cet intérêt, tout comme celui des fans, se maintiendra. À ses cinq matchs d'été, l'équipe a attiré en moyenne 22 527 spectateurs au stade de l'Université McGill, une légère hausse de 700 personnes par rapport à 2012. Il a confiance que le stade sera rempli à quelques reprises cet automne.

Parallèlement, les Alouettes continuent avec succès leur engagement communautaire. L'équipe a renouvelé son association avec la Fédération de l'athlète d'excellence du Québec. Au cours des trois prochaines années, elle remettra 120 000 $ en bourses à des étudiants-footballeurs.

«Nous avons aussi poursuivi notre tournée dans les écoles l'hiver dernier, ajoute Mark Weightman. Nos joueurs ont visité 126 établissements et rencontré plus de 60 000 jeunes.»

Tout cela est très bien. Mais le premier objectif d'une équipe est le succès sur le terrain. Éric Deslauriers croit toujours aux chances des siens.

«Tu sais, les Lions de la Colombie-Britannique ont perdu leurs cinq premiers matchs en 2011. Et ils ont remporté la Coupe Grey! Il ne faut pas brûler les étapes. Mais on doit travailler dur chaque jour pour atteindre ce but.»

Les Alouettes font penser à un étudiant dont la sesssion démarre mal. Ce n'est jamais une bonne idée, mais il est toujours possible de redresser la situation et obtenir une note globale intéressante. On verra si l'organisation relèvera ce défi.

Note des Alouettes cet été

D

Les +

- Le problème Hawkins a été réglé

- Les joueurs demeurent enthousiastes

- Bonnes foules à domicile

Les -

- L'ère Hawkins a retardé l'équipe

- L'attaque est brouillonne

- L'après-Calvillo n'est pas clair