Les Alouettes ont-ils embauché un bon entraîneur? On le verra bien assez vite. Mais, chose sûre, ils ont mis la main sur un champion de la communication.

À sa première rencontre de presse hier, Dan Hawkins en a mis plein les oreilles aux dizaines de personnes réunies dans la salle de bal du Château Champlain. Le gaillard de 52 ans a démontré pourquoi le réseau ESPN l'avait recruté après son congédiement de l'Université du Colorado, en novembre 2010.

Dan Hawkins répond en effet à toutes les questions avec assurance et a le mot pour rire. Gagne ou perd, on ne risque pas de s'ennuyer après les matchs des Oiseaux la saison prochaine.

Tenez, lorsque je lui ai demandé s'il voyait d'abord ce poste comme un tremplin vers la NFL ou un grand collège américain, il a rétorqué d'un seul trait: «Un jour, un de mes mentors m'a dit: Hawk, n'accepte jamais un boulot que tu n'aurais pas le goût de conserver toute ta vie.

«Je vis dans le présent et je m'imagine très bien être ici pour toujours, si les choses vont bien. Mais la réalité du monde du divertissement, c'est que même de grands spectacles comme Cats, sur Broadway, ou des shows de télé comme MASH ont été annulés...»

En clair, l'expérience a appris au nouvel entraîneur des Alouettes que rien n'est éternel dans cette business. Ce qui ne l'empêchera pas de savourer au maximum son séjour montréalais.

«J'aime la vie, je suis heureux d'aller travailler le matin, j'ai de l'énergie... J'ai apprécié mon passage à ESPN, mais la camaraderie d'une équipe de football me manquait.»

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Après plus de 15 ans à la tête des Alouettes, le directeur général Jim Popp est toujours incapable de dire autre chose en français que «bonjour» et «merci beaucoup».

Il l'a de nouveau démontré durant son allocution de dix minutes d'hier. Cela explique en partie pourquoi les Alouettes semblent si souvent déconnectés de leur milieu.

Dan Hawkins n'est évidemment pas bilingue, mais il a eu le mérite de dire quelques mots de français. Et il a juré d'apprendre.

Bon, je sais, il faut prendre ce genre de promesse avec des pincettes dans le sport professionnel. Sauf que Jesse Marsch, le premier entraîneur de l'Impact en MLS, était en voie de relever le pari avant de quitter Montréal, l'automne dernier. On verra si Hawkins est bâti dans le même moule.

Chose sûre, ses motivations pour découvrir la langue officielle du Québec semblent sincères.

«J'ai fait un pèlerinage en Espagne, où j'ai rencontré des gens de partout au monde. Je me souviens de Luigi, un Italien capable de se débrouiller dans plusieurs langues. S'il croisait un Français ou un Allemand, il pouvait converser avec lui.»

Cette expérience a marqué Hawkins. Être polyglotte, dit-il, c'est une manière «d'être connecté au reste de la planète». Avec fierté, il mentionne que sa fille de 28 ans s'exprime très bien en français. «Elle l'a appris à l'école, et a ensuite séjourné en France et en Belgique.»

Des trois équipes professionnelles de Montréal, les Alouettes sont la seule dont l'état-major sportif est unilingue anglophone. Mark Weightman, le directeur des opérations, est conscient des implications. Il a d'ailleurs rappelé le plan de l'organisation pour renforcer les liens avec les amateurs.

Souhaitons que Hawkins y contribue en fournissant un réel effort pour apprivoiser le français. Il s'agirait d'une marque d'amitié envers sa société d'accueil.

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Pourquoi Jim Popp a-t-il ressenti le besoin d'en barbouiller si épais sur les succès des Alouettes au début de la conférence de presse? Voulait-il faire oublier les échecs des deux dernières années en séries éliminatoires? Ou plutôt impressionner le nouveau personnel d'entraîneurs?

«Nous sommes les Alouettes de Montréal et nous en retirons beaucoup de fierté, a-t-il lancé. Au cours de la dernière décennie, et même des dix-sept dernières années, nous sommes l'équipe sportive professionnelle ayant connu le plus de succès au Québec, dans la Ligue canadienne de football et partout au Canada», a-t-il lancé.

Popp a raison d'être heureux de la performance des siens au fil des années. Mais ce jeu de comparaisons est aussi maladroit qu'inutile. Après tout, les Alouettes évoluent dans une ligue de huit équipes qui ne représente pas le plus haut niveau de football en Amérique du Nord.

Cela dit, il est clair que l'embauche de Marc Trestman par les Bears de Chicago le mois dernier a représenté une consécration pour les Alouettes. Si leur entraîneur des cinq dernières saisons est assez solide pour diriger une concession prestigieuse de la NFL, c'est signe que l'organisation est solide.

Dan Hawkins semble posséder les atouts pour succéder avec succès à Trestman. Et il n'est pas gêné d'afficher sa personnalité.

«Hé, je n'ai qu'une seule chance de faire une première impression! a-t-il lancé. Si je vous disais simplement que la preuve est dans le pouding, vous écririez que je suis aussi excitant que de la peinture qui sèche. Je dois vendre ma vision... et livrer la marchandise!»

Un jour, a ajouté Hawkins, un collègue lui a expliqué que les dirigeants sportifs étaient des «courtiers en espoir». À lui maintenant de combler ceux des partisans des Alouettes.