Le parcours est conçu pour la bagarre: un virage en épingle, une courbe rapide, une montée suivie d'une descente abrupte, une longue ligne droite menant au fil d'arrivée...

Non, je n'évoque pas un nouveau circuit de Formule 1. Mais plutôt la piste de ski de fond créée aux abords du Parlement, à Québec, pour la Coupe du monde présentée ce week-end.

Vous avez sans doute vu les images: le coup d'oeil est sensationnel. Ce projet audacieux met en valeur la beauté de la capitale nationale. Et s'inscrit au sein d'une tendance émergente dans le sport mondial: présenter des compétitions extérieures au coeur de la ville.

Pour Québec, cette visite des meilleurs sprinteurs du monde couronne une année sportive exceptionnelle. La région utilise ce créneau comme pôle de développement. Au-delà des retombées économiques et du rayonnement international, elle en récoltera d'autres bénéfices.

Pierre Harvey, dont l'engagement envers le sport a inspiré des milliers de gens, l'a bien expliqué à mon collègue Michel Marois, cette semaine. La pratique du sport doit être encouragée chez les jeunes. Et un événement comme celui-là influencera peut-être des enfants à essayer le ski de fond.

«On part de loin, a dit Harvey. Moi, mes parents ne faisaient pas de sport. Au Québec, la pratique sportive ne date que de deux ou trois générations, et il y a encore beaucoup de travail à faire.»

Faire du sport, c'est investir dans sa santé. L'impact est individuel, bien sûr, mais les effets sont collectifs. La sédentarité entraîne en effet l'explosion des coûts du système de santé.

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En grandissant à Québec dans les années 70, nous avions souvent les yeux tournés vers Montréal. La métropole en imposait: arrivée des Expos dans le baseball majeur, Jeux olympiques d'été, victoires du Canadien en finales de la Coupe Stanley...

L'entrée des Nordiques dans la LNH, en 1979, a concrétisé un grand rêve. Enfin, Québec affrontait Montréal au plus haut niveau du hockey. Mais en 1995, l'équipe a quitté pour le Colorado. Et quelques jours plus tard, le rêve de Québec d'organiser les Jeux d'hiver de 2002 s'est brisé.

Une longue période sombre a suivi. Même si la ville s'est graduellement transformée sous l'administration du maire Jean-Paul L'Allier, les grands projets collectifs n'étaient pas au rendez-vous. Le 400e anniversaire de la ville, célébré en 2008, a tout changé.

Aujourd'hui, Québec multiplie les initiatives. Et le sport n'est pas en reste. Ainsi, en mai dernier, des dirigeants des fédérations internationales se sont réunis dans la capitale nationale à l'occasion du congrès SportAccord. Ce fut une belle source de réseautage pour les promoteurs québécois.

En marge de l'événement, un banquet présidé par Jacques Rogge, le président du Comité international olympique, a permis de récolter 800 000 $ à l'intention des athlètes.

Sur le terrain, le Rouge et Or de l'Université Laval a poursuivi sa domination au football. Et sur la glace, les Remparts s'imposent de nouveau comme l'une des meilleures équipes juniors au pays. Patrick Roy, snobé par le Canadien en mai dernier, récolte toujours du succès.

Québec ne rêve plus aux Jeux olympiques d'hiver. Le maire Régis Labeaume a écarté cette idée. Mais la vie sportive de la région est vibrante. Et la stratégie d'attirer de grands championnats mondiaux, qui stimule la pratique du sport chez les plus jeunes, produit d'excellents résultats.

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Le Québec a besoin d'une capitale dynamique. Mais sa métropole ne peut demeurer en reste.

Or, à ce niveau, il faudra s'armer de patience. Au plan du développement sportif, les attentes envers la nouvelle administration municipale sont modestes.

Michael Applebaum est un maire de transition. Son rôle est d'assurer l'intendance plutôt que de suggérer une nouvelle vision.

Cela dit, la Ville a mis sur pied une initiative intéressante: identifier des pistes pour intégrer l'activité physique et le sport à notre quotidien.

La consultation «Montréal, physiquement active» a recueilli cet automne les mémoires des groupes intéressés et tenu trois jours d'audience. Ses recommandations seront connues au printemps.

«Tous les acteurs du sport, du loisir et de l'activité physique se sont mobilisés autour de cet exercice», explique Sylvie Bernier, dont le groupe Québec en forme a témoigné cette semaine.

«Suggérer aux gens de bouger plus et de manger mieux, ce n'est pas suffisant, ajoute-t-elle. Il faut offrir un environnement propice. Adopter un mode vie actif, ce n'est pas seulement faire du sport. C'est aussi marcher ou même prendre le transport en commun, puisqu'il faut se rendre à la station. L'idée est de faciliter les choix sains.»

Plusieurs suggestions ont été émises, comme l'utilisation des plateaux sportifs des écoles en dehors des heures de cours.

Mais il faut d'abord changer nos habitudes. Un exemple: les normes internationales recommandent 60 minutes d'activité physique quotidienne pour les jeunes. Au Québec, 65 % des adolescentes et 47 % des adolescents n'atteignent pas ce seuil.

Bref, un gros travail de sensibilisation reste à faire. Et si un rendez-vous comme cette étape de la Coupe du monde de ski de fond, à l'ombre du magnifique Parlement, donne le goût du sport à quelques jeunes, Pierre Harvey et Sylvie Bernier seront les premiers à s'en réjouir.