Pour les golfeurs professionnels de 50 ans et plus, le Circuit des Champions a l'effet d'un coup de baguette magique.

À cet âge où leurs camarades des autres sports ont pris leur retraite depuis longtemps, l'univers de la compétition s'ouvre de nouveau à eux. Avec, à la clé, des bourses alléchantes, des foules nombreuses pour les applaudir et, bien sûr, un traitement de star.

Hier, par exemple, les organisateurs du Championnat de Montréal ont nolisé un avion pour faciliter le déplacement à Montréal d'une poignée d'entre eux. Une voiture de service les attendait à l'aéroport de Saint-Hubert. Les plus grands noms rouleront en Lexus durant leur séjour parmi nous. Et le gagnant repartira avec une bourse de 270 000 $.

Au club de la Vallée du Richelieu, tout est en place pour bien les accueillir. Comme à chaque terrain où le circuit s'arrête, la PGA a dépêché à Sainte-Julie d'immenses camions servant de gymnase et de clinique ambulante de physiothérapie.

Pour rendre les joueurs heureux, David Skitt, directeur du tournoi, multiplie les efforts.

Tenez, Tom Lehman, qui occupe le deuxième rang du classement cette saison, avait manifesté le désir de souper à Québec ce soir en compagnie de son épouse. Pour faciliter son excursion, Skitt avait réservé un hélicoptère. Ce qui n'a pas empêché Lehman de déclarer forfait sans motif sérieux.

Originaire de Saint-Lambert, Skitt est un promoteur de 37 ans. S'il a contribué à l'organisation de nombreux événements sportifs au Québec, le golf demeure sa passion.

«Mon mentor, c'est Ronald Corey, dit-il. Il est notre président d'honneur. Mais son engagement dans le tournoi est beaucoup plus profond. Il n'hésite pas à nous chicaner lorsqu'il pense qu'on peut faire mieux. Et il nous rappelle toujours l'importance du contact personnel. Parfois, il nous dit d'oublier le courriel et de parler directement aux gens...»

Ronald Corey a été président du Canadien pendant près de 17 ans. Sous son règne, l'équipe a remporté deux fois la Coupe Stanley et le Centre Bell a été construit.

Cet excellent bilan a été entaché par des dernières années difficiles. Mais l'expertise et le dynamisme de Ronald Corey n'ont jamais fait de doute.

David Skitt et ses jeunes collègues - des dizaines d'amis et de membres de sa famille lui donnent un coup de main cette semaine - ne peuvent espérer meilleur professeur.

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Les désistements tardifs de Nick Price, Kenny Perry et Fred Couples, en plus de celui de Tom Lehman, font mal au Championnat de Montréal.

Des communiqués de presse enthousiastes avaient annoncé leur participation au tournoi. La campagne de publicité a été bâtie sur leur renommée. Leurs photos ornent les panneaux de signalisation à l'entrée du parcours.

Les organisateurs ont annoncé leur absence lundi matin alors qu'ils connaissaient la nouvelle depuis 17h vendredi. Tenir le public dans l'ignorance d'un rebondissement majeur représente pourtant une mauvaise idée. Ce silence de 48 heures a été une erreur.

Skitt n'analyse pas les choses ainsi. À son avis, un communiqué publié vendredi en fin de journée aurait eu moins d'impact que celui de lundi matin.

«On ne voulait pas faire comme en politique, lorsqu'une mauvaise nouvelle est annoncée le vendredi soir. Je préférais qu'on commence ouvertement la semaine avec ça.»

Cela dit, comme ses collègues des Internationaux de tennis du Canada avant lui, Skitt a compris que confirmer la présence de joueurs de premier plan longtemps avant le tournoi comporte des risques. Au bout du compte, le public peut être déçu.

«On va modifier notre stratégie de relations publiques l'année prochaine, dit-il. On ne peut pas annoncer la présence des joueurs en février...»

La direction du circuit des Champions aurait pu mettre un peu de pression pour aider les organisateurs montréalais dans cette affaire. Mais leur pouvoir d'intervention est limité. Aussi longtemps que des règlements plus rigoureux ne seront pas adoptés, comme ce fut le cas au tennis masculin, de mauvaises surprises attendront les organisateurs.

Le contrat de trois ans entre la PGA et le groupe de Skitt prend fin cette saison. «Les deux parties souhaitent renouveler l'entente, dit-il. Il suffit de trouver le bon modèle économique.»

La présentation du Championnat de Montréal est une affaire d'environ 6 millions. La vente des billets ne compte que pour 7% des revenus. La commandite, qui constitue le poste budgétaire le plus important, permet de boucler les frais.

Le tournoi mise aussi sur l'appui des gouvernements du Québec et du Canada, qui ont conjointement versé une enveloppe globale de 4,7 millions de 2010 à 2012. Skitt a bon espoir de voir cet appui reconduit.

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Il existe plusieurs différences entre un tournoi régulier de la PGA et une manche du Circuit des champions.

L'une des plus importantes est le nombre de rondes - trois au lieu de quatre. Résultat, tous les joueurs participent à l'ensemble du tournoi. Un règlement les oblige aussi à disputer un ou deux pro-ams, selon leur classement.

Comme ce fut le cas au cours des deux dernières années, la compétition sera relevée. Les 81 inscrits ont collectivement remporté 333 victoires sur le circuit régulier de la PGA et 222 sur le Circuit des Champions. Ils revendiquent aussi 19 titres majeurs.

Bref, malgré l'absence de grands noms, les amateurs de golf auront du plaisir. Il suffisait de voir quelques joueurs frapper la balle, hier après-midi, pour s'en convaincre. Le Circuit des Champions, malgré ses défauts, représente une formule gagnante.