Pourquoi assister à la Coupe Canada de plongeon, dès demain, à la piscine du Parc olympique?

Pour voir Alexandre Despatie, bien sûr, dont la passion pour son sport ne se dément pas après toutes ces années. Tenez, durant cette difficile année 2011 où une blessure au genou l'a tenu à l'écart de la compétition, une impression de vide l'a envahi. «J'ai encore le désir de m'améliorer», dit-il, des éclairs au fond des yeux.

Et Émilie Heymans, cette grande athlète aux mille réussites, qui trouve toujours autant de bonheur à accomplir le plongeon rêvé. «Quand tu réussis, c'est un sentiment incroyable, difficile à décrire...»

Et Jennifer Abel, sa partenaire en synchro, qui brille aussi en simple. À 20 ans, elle représente un des meilleurs espoirs du pays en vue des Jeux olympiques de l'été prochain.

Ces trois grands noms de la discipline seront à Londres. D'autres prétendants à une qualification olympique joueront leur va-tout au cours du mois. D'abord ce week-end à Montréal, puis en Floride la semaine prochaine, et enfin lors des essais olympiques du 25 au 27 mai.

Parmi eux, Maxim Bouchard, un jeune homme de 21 ans au parcours unique.

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Il y a trois ans, Maxim Bouchard en a eu assez du plongeon. Assez de cette vie trop axée sur son sport. Assez des heures perdues dans la voiture à faire la navette entre son domicile de la Rive-Sud et le centre d'entraînement de Montréal. Malgré ses succès au sein de l'équipe canadienne junior, il a eu le goût de vivre d'autres expériences.

Un an et demi plus tard, les tremplins ont commencé à lui manquer. C'est alors qu'une occasion s'est présentée à lui: participer à des spectacles de plongeon.

La proposition était alléchante: il serait logé, nourri et recevrait quotidiennement 100$. En retour, avec ses nouveaux collègues, il proposerait un numéro d'une trentaine de minutes, deux fois par jour. Ailleurs sur le site, les visiteurs assisteraient à des spectacles de dauphins, d'otaries, de serpents et de chauve-souris... Maxim a mis le cap sur les Philippines, à Subic Bay, où un contrat de trois mois l'attendait. La tournée s'arrêterait ensuite en Chine et aux États-Unis.

Avant l'ouverture officielle, même si les installations n'étaient pas terminées et ne semblaient pas entièrement sécuritaires, Maxim s'est entraîné à la demande des organisateurs. C'était le 26 mars 2010.

En s'élançant, la minuscule plate-forme de départ a cédé sous son poids, ce qui a diminué sa force d'impulsion. En tombant, le bras de Maxim a touché le côté de la piscine, amortissant ainsi légèrement sa chute, qui a pris fin au fond d'un trou. Il n'a jamais touché l'eau. Ce plongeon d'une dizaine de mètres aurait pu lui coûter la vie. «Je ne serais pas supposé être ici aujourd'hui, dit-il. Un ange gardien m'a protégé.»

Maxim a perdu connaissance pendant une vingtaine de secondes. Le bras et le poignet cassés, la tête en sang et la peau des jambes déchirée jusqu'à l'os, des gens l'ont aidé à sortir du trou. Il a réussi à marcher jusqu'à une voiture qui l'a conduit à l'hôpital. Il a ensuite été transféré à Manille, la capitale du pays. Heureusement, il n'a pas subi de commotion cérébrale.

À son retour au Québec, Maxim a lentement retrouvé la forme. L'accident ne l'a pas éloigné du plongeon. Au contraire, il a compris que ce sport représentait la passion de sa vie. Et réalisé que son rêve pouvait prendre fin à n'importe quel moment.

Redonner à son corps toute sa puissance a nécessité des efforts colossaux. Puis, l'hiver dernier, Maxim a obtenu la médaille de bronze aux Championnats canadiens au plongeon de 3 mètres. «L'idée d'arrêter m'a traversé l'esprit. Mais de l'autre côté, quand tu tombes de cheval, tu dois remonter en selle... Je voulais passer par-dessus l'accident. Je voulais plonger.»

Maxim ne le cache pas: il a peur chaque fois qu'il s'élance du tremplin de 10 mètres. Ce qui signifie qu'il a peur chaque jour, à l'entraînement. «C'est un peu moins pire qu'avant, mais j'ai toujours une petite crainte... Je veux passer par-dessus ça.»

Les chances que Maxim se qualifie pour Londres sont modestes. «Je vise Rio en 2016», dit-il.

On est derrière toi, Maxim.

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Si les carrières de Jennifer Abel et Maxim Bouchard demeurent en expansion, celles d'Alexandre Despatie et Émilie Heymans amorcent leur dernière ligne droite.

Les deux champions, qui ont si souvent fait honneur au Québec, attendront la fin des Jeux de Londres pour décider de leur avenir. Mais il suffit de discuter avec eux pour comprendre que le choix sera déchirant. Le plongeon fait partie de leur vie depuis l'enfance et la séparation ne sera pas facile.

Heureusement, Alexandre et Émilie ont des projets. Le premier veut faire du cinéma; la seconde travaille déjà sur une collection de maillots de bain. «À l'UQAM, j'ai fait un bac en commercialisation de la mode, explique Émilie. Je porte un maillot depuis 20 ans, assez pour connaître les coupes qui vont bien!»

Émilie dessine, taille et coud ses maillots elle-même. «J'étais capable de coudre, assez pour me faire du linge juste pour le fun. Mais j'ai suivi des cours plus spécialisés. Je suis en phase de développement de produit.»

Nos plongeurs ne sont pas uniquement inspirants en haut du tremplin.

Photo: Marco Campanozzi, La Presse

Émilie Heymans à l'entraînement avant la Coupe Canada de plongeon qui débute demain à la piscine du Parc olympique.