Est-ce bien vrai? Un gars de 52 ans est co-meneur du Tournoi des Maîtres? Dites-moi, comment ne pas trouver ce tournoi inspirant?

Voici donc Fred Couples, le golfeur que tout le monde aime, à l'élan si fluide, qui nous fait un numéro pour la troisième année consécutive. Lors des deux derniers printemps, il avait aussi impressionné en rondes d'ouverture, mais n'avait pas tenu le coup.

Couples est désormais le favori sentimental. Il ne s'en cache pas: le Tournoi des Maîtres est le seul des quatre majeurs qu'il peut encore gagner. «J'espère que les jeunes joueurs aimeront Augusta autant que moi», a-t-il dit, hier.

L'attitude de Couples est merveilleuse. Voilà un joueur qui s'amuse et savoure chaque moment de ce tournoi. Bien sûr, il n'est pas au même stade de sa carrière que Tiger Woods. Mais si celui-ci montrait sur le terrain le dixième du plaisir manifesté par Couples, il jouerait sûrement mieux.

À partir du 13e trou hier, Tiger s'est lentement désintégré. Le point culminant est survenu au 16e, une normale 3. Après avoir expédié son coup de départ dans une fosse de sable, il a laissé tomber son bâton, puis lui a donné un coup de pied. Jack Nicklaus, celui dont il chasse le record de 18 titres majeurs, n'aurait jamais montré pareille colère sur le terrain.

Au hockey et au football, l'emportement est parfois source d'exploit. Pas au golf, où la maîtrise de soi est essentielle.

Au cours des derniers mois, Tiger a amélioré son jeu. Mais il n'a pas encore atteint le niveau de confiance lui permettant de lutter jusqu'au bout pour un titre majeur.

Woods demeure néanmoins une formidable carte d'attraction. J'ai déjà hâte de voir comment il réagira aujourd'hui. Son retard sur les meneurs est de huit coups.

Le printemps dernier, j'étais à Augusta pour couvrir le Tournoi des Maîtres. Phil Mickleson, trois fois vainqueur, a éprouvé des difficultés. N'empêche que j'ai été impressionné par sa prestance unique sur le terrain.

Je le vois encore, foulant les allées de son pas pesant, pendant que la foule l'applaudissait. Mickelson, d'un geste presque machinal, saluait les gens à intervalles réguliers. Comme un roi devant sa cour.

Mickelson est chez lui à Augusta. Jeudi, il est venu près de rater sa rentrée, commettant un boguey au 9e et un triple boguey au 10e. Mais il est revenu en force. Et le voici à trois coups des meneurs, avec 36 trous à jouer. Ses rivaux devraient se méfier.

Au Tournoi des Maîtres, Mickelson invente même de nouveaux mots. Après sa ronde d'hier, il a dit que les verts, trop souples, n'étaient pas «augustaesques». Et qu'une vingtaine de joueurs lutteraient jusqu'au bout pour le titre s'ils n'étaient pas plus rapides ce week-end. «Les verts doivent être plus fermes pour nous départager.»

Ils le seront. On n'annonce pas de pluie à Augusta.

De Sergio Garcia, on dit souvent qu'il est le meilleur joueur à n'avoir jamais remporté un tournoi majeur.

Réalisera-t-il son rêve ce week-end? Pas sûr qu'il croie lui-même en ses chances. Aux plans sportif et émotif, Garcia revient de loin. Mais c'est tout de même bien de le voir en si bonne place au classement, un coup derrière les meneurs.

«C'était froid et venteux au début de ma ronde», a-t-il dit, hier. Et Sergio, bien sûr, n'aime ni le froid ni le vent.

Lorsqu'on voit à la télé les splendides images du parcours, on croit parfois que c'est déjà l'été à Augusta. Ce n'est pas tout à fait vrai, comme je l'ai constaté l'an dernier. À midi, sous le soleil, il fait très chaud. Mais la nuit, le mercure chute brutalement.

Les petits hôtels situés près du parcours, dont le tarif quotidien gonfle de 40$ à 250$ durant la semaine, ne se signalent pas tous par la qualité de leurs matériaux isolants, ni la fiabilité du système de chauffage!

Bien sûr, les joueurs n'habitent pas là. La plupart louent une maison aux alentours.

Il y a des événements sportifs que je ne veux pas rater. Les finales masculine et féminine de l'Omnium américain de tennis. Le derby du Kentucky. Le Super Bowl. Un gros match éliminatoire du Canadien (oui, mon calendrier s'est allégé cette année...). Et les neuf derniers trous du Tournoi des Maîtres.

Le golf est le plus particulier des sports. Des champions se décomposent lorsque la pression devient trop forte. Et elle ne l'est jamais autant qu'à Augusta. La quête du veston vert fragilise les nerfs des meilleurs joueurs du monde. Rory McIlroy, Greg Norman et plusieurs autres peuvent en témoigner.

Voilà pourquoi les neuf derniers trous, le dimanche après-midi, constituent un si grand spectacle. Ce n'est pas toujours le meilleur joueur qui gagne. Mais assurément celui qui, ce jour-là, montre le plus de cran.

Ne manquez pas ça, demain, en mangeant du chocolat.

Ma prédiction? Rory, bien sûr...