Si on se fie aux rumeurs du week-end dernier, Pierre Boivin sera un homme occupé en 2012. Non seulement prendra-t-il la tête de Maple Leafs Sport&Entertainment (MLSE), mais il conseillera aussi Graeme Roustan dans son projet de construction d'un nouvel amphithéâtre en banlieue nord de Toronto!

Ces deux scénarios, intrigants à première vue, ne se matérialiseront pas. «Pas question de quitter Montréal, ni le Québec, explique Boivin. En 1999, j'ai accepté l'offre du Canadien parce que c'était l'équipe de mon enfance. J'ai vécu des années fantastiques au Centre Bell et j'ai adoré le travail. Mais je n'ai pas le goût de recommencer.»

Contrairement à un gestionnaire comme Tony Tavares, qui fut président des Ducks d'Anaheim, des Expos de Montréal, des Stars de Dallas et qui rêve aujourd'hui de sauver le hockey à Phoenix, Boivin n'a jamais limité sa carrière au sport professionnel. Il a d'ailleurs refusé deux fois les avances du chasseur de têtes avant de dire oui au Canadien.

Aujourd'hui âgé de 58 ans, il amorce son mandat à la présidence de Claridge, une société d'investissement. Ceux qui le connaissent savent qu'il dit vrai en affirmant: «J'ai toujours voulu terminer ma carrière dans ce secteur et au Québec».

Cela dit, il n'est pas étonnant que des rumeurs aient circulé à propos de Boivin. En 12 ans à la barre du Canadien, il a transformé une organisation sur le déclin en leader de l'industrie. Si l'équipe n'obtient guère de succès sur la glace, elle occupe le sommet du classement au plan des revenus.

En juillet 2010, lorsque le Canadien a annoncé que Boivin quitterait son poste un an plus tard, Richard Peddie a déclaré que la famille Molson commettait une «grosse erreur».

Peddie est le président de MLSE, le conglomérat regroupant les Maple Leafs, les Raptors, le Toronto FC et l'Air Canada Center. Sa remarque, qui a pris l'allure d'un jab à Geoff Molson, ne brillait pas par sa diplomatie. Mais elle en disait long sur la réputation de Boivin dans le sport professionnel.

L'automne dernier, Peddie a annoncé qu'il prendrait sa retraite le 31 décembre prochain. Boivin a été approché pour savoir s'il était intéressé à compter parmi les candidats à la succession. Il a refusé net et sec.

«Je veux demeurer près de ma famille et de mes amis, explique-t-il. Mes critères de décision ne sont pas les mêmes que lorsque j'étais plus jeune.»

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Le sport professionnel est en ébullition à Toronto. Après avoir songé à se départir de ses actifs dans le sport professionnel, le Fonds d'investissement des enseignants de l'Ontario (Teachers') a retiré Maple Leafs Sport&Entertainment du marché. Le prix de vente évoqué, 1,5 milliard, était colossal.

Au même moment, Graeme Roustan, actionnaire de contrôle de Bauer, a annoncé son intention de bâtir un amphithéâtre de 19 500 sièges à Markham, au nord de Toronto. Son associé est Rudy Bratty, un promoteur immobilier crédible.

Roustan connaît bien Boivin. Une de ses compagnies a contribué à la construction des patinoires communautaires du Canadien. Et en 2009, lorsque George Gillett a mis l'équipe en vente, Roustan a participé aux enchères, mais n'a pas atteint la ronde finale.

Cet historique a laissé croire que Roustan avait peut-être fait appel à Boivin comme conseiller dans le dossier de Markham. «C'est absolument sans fondement, rétorque Boivin, qui est toujours membre du conseil d'administration du Canadien. Je n'ai jamais été impliqué là-dedans.»

Lorsque le projet de Roustan a été éventé la semaine dernière, une question est venue à l'esprit de tous les partisans du retour des Nordiques à Québec. Si cet amphithéâtre voit le jour, la ville de Markham concurrencera-t-elle Québec pour l'obtention d'une équipe de la LNH?

En entrevue à thehockeynews.com, Roustan a soutenu ne pas rêver à la LNH. «Nous voulons construire un centre multifonctionnel axé sur les concerts et les événements culturels. Je n'ai aucune attente par rapport au sport professionnel.»

Dans ce cas, pourquoi avoir mis Bill Daly, commissaire adjoint de la LNH, au courant du projet? Faut-il sa permission pour construire une salle culturelle en Ontario? Et, si le hockey ne fait pas partie de l'équation, pourquoi bâtir un amphithéâtre plutôt qu'un édifice conçu sur mesure pour les spectacles?

Malgré tout, les chances que la LNH accorde, à court ou moyen terme, une deuxième concession à la grande région de Toronto sont presque nulles.

Contrairement à l'opinion répandue, la protection des droits territoriaux n'est pas un concept clair dans la LNH. Mais MLSE se battrait bec et ongles pour défendre ses intérêts. Si Teachers' a conservé son investissement dans MLSE, ce n'est pas pour partager ce lucratif territoire.

Dans sa quête d'obtenir une équipe de la LNH, Québec n'a pas encore remporté la mise. Mais ce n'est pas Markham qui brisera ses espoirs.

Photo: André Pichette, La Presse

Aujourd'hui âgé de 58 ans, Pierre Boivin amorce son mandat à la présidence de Claridge, une société d'investissement.