Il a gagné un Oscar l'année dernière. Et pas n'importe lequel: l'Oscar du meilleur acteur pour son rôle dans Dallas Buyers Club de Jean-Marc Vallée. Il devrait trôner au sommet de son Olympe en n'acceptant que les grands rôles offerts par les réalisateurs de catégorie A. C'est la route à suivre lorsqu'on rejoint la courte et prestigieuse liste des acteurs oscarisés.

Mais au lieu de tabler sur son nouveau statut de quasi-divinité, Matthew McConaughey a choisi de prendre une route secondaire, quitte à bousiller ce qui lui reste de prestige. Comment? En acceptant de tourner une vulgaire pub de bagnole.

Bon, OK, la Lincoln MKC, une compacte de luxe, est une belle bagnole. On peut d'ailleurs la voir briller de tous ses feux à la télé québécoise dans la version doublée de la pub. L'oeil rivé sur la route, une main sur le volant, se frottant les doigts de l'autre comme s'ils étaient poissés de sauce BBQ, Matthew McConaughey nous marmonne en voix doublée quelque chose dans le genre: «Je conduisais une Lincoln bien avant que je sois payé pour le faire. Pas pour prouver quelque chose, parce que j'aimais ça!»

Peu de temps après l'entrée en ondes de la pub aux États-Unis, Matthew McConaughey est devenu la risée d'un peu tout le monde dans le métier, à Hollywood comme à New York.

Mais ce qui a scellé son sort, ce sont les parodies dans différentes émissions de télé qui ont fait de lui la star la plus ridicule de la saison. C'est l'animateur de fin de soirée Conan O'Brien qui a lancé le bal avec un amalgame hilarant. À l'image, c'est toujours l'acteur au volant de sa Lincoln, mais, au son, c'est le texte de la série True Detective, où McConaughey, en flic désabusé, prône ni plus ni moins l'extermination de la race humaine.

Les scripteurs de la série South Park n'ont pas tardé à emboîter le pas et à se foutre de la gueule de l'acteur avec son accent texan. Ellen DeGeneres en a rajouté une couche dans un numéro désopilant et dévastateur où, par la magie des effets spéciaux, on la voit assise sur la banquette arrière de la Lincoln, demandant à l'acteur ce qu'il a mis au juste dans ses brownies au hasch. En le voyant se frotter les doigts de manière totalement absurde, elle finit par lui offrir une lingette mouillée et par le faire passer pour un parfait abruti.

Mais le coup de massue fatal est venu de Jim Carrey, qui, la semaine dernière, à Saturday Night Live, a offert quelques variations dévastatrices de la pub en imitant McConaughey au volant de sa Lincoln tout en dénonçant sa prétention, sa cupidité, son opportunisme et son très mauvais move de carrière.

On aurait envie de défendre le pauvre Matthew McConaughey, tant ses congénères s'acharnent sur lui. Mais le type est si peu sympathique et dégage un tel degré de prétention qu'on se dit qu'il mérite ce qui lui arrive. La prochaine fois, peut-être que Matthew McConaughey y regardera à deux fois avant de vendre son âme pour une Lincoln.

Vendre son âme pour un rôle

Si ça se trouve, dans quelques années, Matthew McConaughey va ressembler au personnage de Michael Keaton dans l'extraordinaire film Birdman: celui d'un acteur riche, mais déchu, qui tente de retrouver une crédibilité qu'il n'a jamais eue. Ou alors il pourrait ressembler au personnage de Julianne Moore dans Maps to the Stars de David Cronenberg, le personnage d'une actrice riche, mais vieillissante, prête à tuer pour obtenir un rôle. Ces deux films sortaient le week-end dernier et évoquent chacun à leur manière le psychopathe qui dort en chaque acteur de Hollywood. Au fond, c'est peut-être pour oublier cette part d'ombre en lui que Matthew McConaughey a fui dans une pub de Lincoln.

ON EN A BEAUCOUP PARLÉ

De l'affaire Jian Ghomeshi, l'ex-vedette de la radio de CBC, maintenant reconnue pour ses rapports violents avec les femmes. Lundi, quatre victimes anonymes ont témoigné. Vendredi, elles étaient une dizaine, dont l'actrice Lucy DeCoutere. Si le recours collectif contre un type violent qui se prend pour un autre n'existe pas encore, elles vont peut-être l'inventer.

ON N'EN PARLE PAS ASSEZ

Du conflit qui dure depuis trop longtemps entre les librairies Renaud-Bray et le distributeur Dimedia, pénalisant de nombreuses petites maisons d'édition québécoises et leurs auteurs. Qu'est-ce que quelqu'un en autorité attend pour s'en mêler?