Shelly Glover, la nouvelle ministre du Patrimoine, ne le sait pas encore, mais elle est attendue au TNM. Tous les soirs de première à compter de septembre, deux fauteuils lui seront réservés avec, bien en évidence, la mention : réservé à la ministre du Patrimoine canadien et des langues officielles.

Ma main au feu que ces deux fauteuils vont rester résolument vides pendant toute la saison théâtrale. Au pire, ce seront deux places de perdues. Au mieux, deux étudiants en théâtre, choisis parmi ceux qui attendent des billets de dernière minute, en hériteront.

Pourquoi une telle mise en scène ? D'abord pour protester contre ce que Lorraine Pintal qualifie de censure par l'argent : les coupes en culture du gouvernement Harper, qui totalisent presque 300 millions, dont une somme assez minime (66 000 $) pour le TNM. Mais aussi parce que depuis que les conservateurs sont au pouvoir, pas un diable de ministre n'a mis les pieds au TNM, y compris l'ex-ministre du Patrimoine, James Moore.

On ne parlera même pas de Stephen Harper. Quand il se mêle de théâtre, c'est soit pour supprimer des subventions comme il l'a fait pour le festival Summerworks de Toronto, puni pour avoir présenté Homegrown, une pièce qui, selon le bureau du PM, glorifiait le terrorisme. Soit pour terroriser les directeurs de théâtre et les pousser à l'autocensure, comme c'est arrivé au Tarragon de Toronto. Le directeur a refusé de présenter Proud, une pièce librement inspirée du premier ministre Harper par l'auteur en résidence, Michael Healy, de peur de représailles du gouvernement.

Pour en revenir au TNM, les libéraux n'avaient aucun problème à aller y faire un tour de temps à autre. Marcel Masse des conservateurs de Brian Mulroney, non plus. J'imagine qu'il savait que le TNM est une institution culturelle et théâtrale qui existe depuis 62 ans. Vu son âge vénérable, mais aussi la nature de sa vocation à la fois classique et contemporaine, c'est le théâtre national du Québec. Ce n'est pas tout à fait la Comédie-Française, mais presque.

Bref, un gouvernement qui se respecte serait mal avisé d'ignorer une telle institution et devrait se faire un devoir de lui rendre visite à l'occasion. Malheureusement, je doute que la ministre Shelly Glover ait assez de flair politique pour le reconnaître.

De ce que j'ai lu à son sujet depuis sa nomination, sa pratique culturelle se résume à chanter dans la chorale de la police. C'est un bon début, mais disons que c'est loin d'être suffisant.

L'ex-policière qui a été dans la police de Winnipeg pendant 19 ans a pourtant quelques qualités. Elle est parfaitement bilingue ou presque. C'est une métisse franco-manitobaine qui connaît d'expérience les problèmes des minorités culturelles. Elle n'a pas eu une vie facile, vient d'une famille dysfonctionnelle plombée par la violence et l'alcool.

Elle est tombée enceinte à l'âge de 18 ans d'un fils - Michael Strickland - qui est aujourd'hui un acteur diplômé de l'Acting Studio de Winnipeg. Le théâtre devrait donc normalement intéresser la nouvelle ministre. Ce serait sans doute le cas si l'élan théâtral de la ministre n'était pas sérieusement freiné par sa gratitude.

Shelly Glover n'en revient tellement pas d'avoir été nommée ministre, sa reconnaissance envers Stephen Harper est si grande, qu'elle ne fera rien, absolument rien, pour contredire ses politiques, quitte à gaspiller deux bons sièges les soirs de première au TNM.

Mais tout n'est pas perdu. Prévoyant l'absence de Shelly Glover, la bande du TNM va descendre à Ottawa la retrouver. Profitant de la rentrée parlementaire, la troupe improvisée présentera sur la colline des extraits de L'avare de Molière, un choix pour le moins judicieux. Lorraine Pintal fera appel à un florilège d'acteurs pour l'occasion. Si j'étais elle, je songerais sérieusement à recruter le fils de Shelly Glover. C'est difficile d'émouvoir une ministre. Mais pas le coeur d'une mère...

On en parle trop

Des trémoussements mécaniques et faussement sexy de Miley Cyrus aux Video Music Awards. Une guerre contre la Syrie est en gestation, le monde court à sa perte et ce qui fait jaser, twitter et capoter la stratosphère est le numéro raté d'une jeune écervelée. Franchement.

On n'en parle pas assez

Des fausses pistes de Twitter. Cette semaine, un abonné met en ligne une fausse photo diffusée par BBC News pour illustrer le massacre des enfants en Syrie. Le problème ? La photo avait été prise en Irak en 2003. Le 2e problème ? L'histoire des fausses photos est sortie il y a un an et demi. L'abonné a oublié de le préciser. Pas brillant.