Dure semaine pour Montréal : une contamination de l 'eau qui a privé 1,3 million de Montréalais d'eau potable, des pannes à répétition dans le métro, des bouchons à n'en plus finir dans les rues, des nids-de-poule comme autant de mises en abyme, des travaux paralysant tout , un temps pourri : n'en jetez plus, notre cour est pleine.

Pourtant, en même temps que s'abattaient ces calamités sur la tête des Montréalais calamités bien relatives en comparaison avec la dévastation qu'a subie l'Oklahoma, des choses réjouissantes se passaient aussi en ville.

Même qu'il y avait de l'électricité et une belle énergie dans l'air. Où? D'abord sur les rives du canal de Lachine à C2-MTL, cette conférence internationale de trois jours où se mêlent créativité et affaires.

J'y étais l'an dernier. J'y suis retournée cette année. C'était encore mieux et plus gros : 2500 participants, le double de 2012, avec 50% de gens de l'extérieur du Québec, dont 10% du Canada et 40% du monde entier.

Avec aussi quelques conférenciers qui valaient vraiment le détour : le grand Philippe Starck et ses 88 kilos d'idées folles et de paradoxes, la designer de mode Diane von Fürstenberg et sa robe portefeuille qui a garni son propre portefeuille de plusieurs centaines de millions, sans oublier le fou volant de sir Richard Branson qui rêve de nous faire voyager dans l'espace à prix plus ou moins modique.

Après seulement deux ans d'existence, C2-MTL est en train de s'imposer comme un rendez-vous original et attirant pour ceux qui croient au pouvoir de la créativité et à sa force de contamination.

Une seule réserve : pour l'instant, on a l'impression que les grosses pointures qui gratifient C2-MTL d'une visite font partie du réseau jetset de Guy Laliberté, le patron du Cirque du Soleil et un des partenaires fondateurs de la conférence.

Mais comme Laliberté ne peut pas être partout ni branché dans tous les réseaux, il va falloir que l'événement réussisse, par le seul poids de sa crédibilité, à attirer de gros noms: des gens comme Sheryl Sandberg de Facebook ou même son patron Mark Zuckerberg, comme Bill et Melinda Gates ou même Sara Blakely, la toute première selfmade-woman milliardaire qui a créé la marque Spanx et fait fortune avec une idée toute simple : des sous-vêtements amaigrissants.

Alors que les participants de C2-MTL prenaient d'assaut Griffintown, s'ouvrait dans l'est de la ville le Festival TransAmériques avec son lot de pièces audacieuses à la fine pointe de ce qui se fait de mieux en théâtre dans le monde.

Le coup d'envoi a été donné avec Un ennemi du peuple, une pièce coup-de-poing sur la corruption et la contamination de l'eau. La pièce a été créée il y a 133 ans, mais elle est tellement brûlante d'actualité qu'elle semblait avoir été écrite cette semaine à Montréal.

En même temps que le FTA prenait son envol, une autre manifestation de la créativité montréalaise commençait, le SIDIM: le Salon international du design de Montréal avec ses 500 exposants réunis autour des nouvelles tendances en design.

Et à travers tout cela, il y avait Gregory Charles qui nous ouvrait les portes de son théâtre mobile garé dans le Vieux-Port, où il s'installera à demeure jusqu'au 14 juillet.

Interrogé sur la raison qui l'a poussé à acheter cet énorme machin de plexiglas et à risquer un investissement d'environ 12 millions, Gregory avait une réponse toute prête : « Parce que je crois en Montréal et que je n'ai pas envie de verser dans le cynisme. J'ai envie de faire des projets, d'avoir de grands rêves. Et tant pis si je me casse la gueule. Au moins, j'aurai essayé.»

Il y a des contaminations qui sont toxiques et d'autres, créatives. Montréal, cette semaine, a connu les deux. On souhaite que la plus toxique des deux ne se reproduise plus jamais. Et que la contamination créative s'incruste pour de bon dans l'ADN de la ville et qu'elle devienne sa marque de commerce et sa signature.

ON N'EN PARLE PAS ASSEZ:

Du Festival de la poésie de Montréal, qui se tiendra du 27 mai au 2 juin sous le chapiteau de la place Gérald-Godin, à la sortie du métro Mont-Royal. Des dizaines de poètes, de lectures, de tables rondes en pleine ville et en pleine rue. Tant qu'il y a de la poésie, il y a de l'espoir.

ON DEVRAIT EN PARLER PLUS:

Du prix d'entrée de 25 dollars qu'il faudra payer pour aller cet été flâner, lire ou rêver au Jardin botanique de Montréal, un joyau du patrimoine montréalais détourné de sa vocation aux fins commerciales des Mosaïcultures. Le frère Marie-Victorin doit se retourner dans sa tombe, lui qui a rêvé et conçu un jardin scientifiquement organisé où l'étudiant pourrait apprendre et le peuple, goûter à cette joie pure et intime qui monte d'un grand jardin. Le frère rêvait d'un jardin, pas d'une foire.