Pour M - Mathieu Chedid de son vrai nom - Montréal est la ville des débuts ou des éternels recommencements. C'est à Montréal que le chanteur, compositeur, multi-instrumentiste et transformiste porté sur le rose et les accoutrements à la Flash Gordon, a donné ses premiers shows. C'était il y a un peu plus de 15 ans et M était un illustre inconnu en France comme chez nous.

Et c'est à Montréal qu'il revient ce soir et demain soir au Métropolis dans le cadre de Montréal en Lumière avec un spectacle qu'il n'a présenté que deux fois en France il y a à peine quatre jours.

«Ma dernière tournée en 2009 a débuté ici. J'ai été en résidence (en rodage) à La Tulipe pendant 4 soirs. Ici, on dirait que c'est toujours le début de quelque chose, lance-t-il au milieu du hall de l'hôtel du centre-ville où il est arrivé hier soir en compagnie de ses nombreuses guitares mais de ses deux seuls musiciens: Brad Thomas Ackley à la basstar (un croisement de race entre une guitare et une basse) et Laurence Clais à la batterie. C'est ce que M nomme son power trio.

«Bizarrement, explique-t-il en commandant un thé, à trois on n'a pas le droit à l'erreur. C'est presque guerrier comme truc. Faut qu'on performe à tout prix. On ne peut pas se planter, mais l'avantage c'est que quand ça fonctionne, c'est plus puissant que n'importe quoi».

Nouveau trio, nouveaux musiciens, nouveau spectacle et nouveau CD - îl - paru en novembre dernier, M étrenne bien des choses à Montréal. Mais la plus importante pour lui, c'est la nouvelle énergie qui l'habite.

«C'est une énergie très positive et plus physique que mentale. Ça vient du fait que je me suis mis à avoir une vie plus saine, à laisser tomber les excès. Ma drogue en ce moment, c'est le sport. Je fais du jogging trois, quatre fois par semaine. Je suis beaucoup plus en forme et ma musique s'en ressent.»

Lâcher prise

Sur Îl, la chanson Mojo très rythmée et funky, est à l'image du changement de cap. Inspiré à la fois par le classique du blues Got my mojo workin de Muddy Waters, mais aussi par le Mister Mojo Risin de Jim Morrisson, M raconte qu'il est parti à la recherche de son mojo intérieur, ce qui pour lui se résume à deux mots: lâcher prise.

«On évolue, on se réinvente. Dans mon cas, j'essaie d'être plus masculin, plus un homme et moins un adulescent. Au départ, M pour moi était un personnage asexué. J'ai vieilli, j'ai une petite fille de 10 ans, c'est ma petite fierté. C'est elle qui a dessiné la pochette de mon CD avec son iPad. Il y a 15 ans, un dessin d'enfant sur iPad, ça n'existait pas. Et j'ai fait le disque dans cet esprit-là: l'esprit de maintenant, pas d'hier ni de demain.»

Hier encore, M ne pouvait monter sur scène sans s'entourer d'une foule d'accessoires, de gadgets, de costumes extravagants et de coiffures en pointes infernales comme si M n'était pas tant le fils du chansonnier Louis Chedid que l'enfant adopté de Kiss. Le tout n'était pas toujours du meilleur goût.

Fils de poète

Depuis, M a enlevé quelques pelures, quelques parures et laissé ses cheveux vivre et pousser en paix. La sobriété serait-elle sa nouvelle alliée?

Le mot sobriété le fait grimacer. C'est un concept qui ne semble pas faire partie de son univers. «Je suis le fils et le petit fils de poètes. Je ne peux pas concevoir la vie et la scène sans fantaisie. Je veux rendre le quotidien spectaculaire. C'est aussi une manière de ne pas trop se prendre la tête. La dérision dans ce métier-là, c'est important. Et puis oui, je pourrais très bien me présenter sur scène en jeans avec ma guitare, mais tout le monde le fait. Moi, j'ai envie d'être différent».

M n'a pas à s'inquiéter. Il est un cas à part. Reste à voir si son nouveau mojo fait ou non, une différence.

Dans l'iPod de M

Radiohead (album In Rainbows)

Sixto Rodriguez

Al Green

Jimi Hendrix, People, hell and angels (inédit)

Ariane Moffatt, Le coeur dans la tête