Bombardier Aéronautique a un nouvel ambassadeur. Et pas n'importe qui! Une vedette de Hollywood, acteur de cinéma et pilote à ses heures! Je parle de nul autre que John Travolta qui, depuis mardi, est le visage et l'image des jets d'affaires Challenger, Global et Learjet.

La nouvelle m'a étonnée et encore davantage quand j'ai appris que ce n'était pas la première fois que la vedette de Saturday Night Fever et de Pulp Fiction héritait du titre d'ambassadeur de l'air. Il y a un peu plus d'un an, la ligne australienne Qantas l'avait recruté pour la même fonction.

Or, si je me fie à ce qui s'est passé chez Qantas, pas sûr que ce soit une si bonne affaire que ça que d'associer son nom et son produit à Travolta. Car chez Qantas, l'arrivée du nouvel ambassadeur de l'air a mis les pilotes de très mauvaise humeur.

Tout a commencé par une vidéo de sécurité enregistrée par Travolta et présentée en cabine aux décollages des vols. «Je pilote depuis 40 ans et je peux vous assurer qu'il n'y a rien de mieux qu'un pilote de Qantas aux commandes», lançait Travolta, portant fièrement l'uniforme des pilotes de la ligne. Le problème, ce n'était pas tant l'uniforme que la réplique prédécente où Travolta vantait les mérites des équipes et non des équipages de Qantas.

Les pilotes, tout comme tout le personnel de cabine, n'ont pas apprécié d'être décrits en termes aussi sportifs, pour ne pas dire réducteurs. «Quand on l'entend parler de notre 'équipe', on a l'impression de travailler chez McDonald's», a affirmé un membre de l'équipage.

Mais ce reproche technique n'était peut-être qu'un prétexte. Dans le fond, les pilotes de Qantas en voulaient à Travolta d'avoir volé la vedette au vrai héros de la ligne aérienne: le capitaine Richard de Crespigny qui a sauvé la vie de 466 passagers lors d'un atterissage d'urgence à Singapour. Un sauvetage qui, pour une fois, n'était pas arrangé avec le gars des vues.

Malgré cela, Qantas a préféré associer sa marque à une vedette de Hollywood pluôt qu'à un vrai héros. Les choses se sont corsées avec la renégociation des contrats de travail. Lorsque Qantas a émis le souhait de sous-traiter les emplois de pilotes, la vidéo de Travolta est devenue subitement désuète, puisque les pilotes pouvaient maintenant provenir de n'importe quelle autre ligne aérienne. Sa vidéo a finalement été retirée des avions, juste à temps pour le déclenchement chez Qantas de la première grève en 45 ans.

Évidemment, John Travolta n'y était pour rien et je doute que son arrivée chez Bombardier ait un effet aussi néfaste. N'empêche. Je m'interroge sur la pertinence de son association avec la marque de Bombardier. Quel lien symbolique peut-il y avoir entre un acteur d'Hollywood né dans le New Jersey et une entreprise plus canadienne que la feuille d'érable, née en partie à Saint-Laurent?

La question vaut autant pour Travolta que pour le maestro Valery Gergiev et pour le pianiste Lang Lang, tous deux ambassadeurs de la marque Bombardier.

La vraie question, c'est pourquoi faire appel à des vedettes internationales venues d'ailleurs quand nous avons chez nous, une flopée de vedettes internationales allant de Céline Dion à Yannick Nézet-Séguin, qui seraient des associés naturels? J'ai posé la question à la porte-parole de Bombardier qui m'a assuré que plusieurs de nos grands noms avaient été pressenti, mais qu'aucun n'était disponible.

Dans le fond, peut-être ont-ils compris que faire faire des tours d'avion à des clients riches à craquer et capables de se payer des jets à 10, 20 et 50 millions, c'était peut-être glamour au début. Mais qu'à la longue, ambassadeur de l'air, c'était aussi éreintant qu'agent de bord.