L'année dernière à pareille date, le maire Labeaume devait venir à Montréal vendre le 400e aux Montréalais. Il a plutôt laissé Daniel Gélinas, le directeur du 400e, mais aussi le ministre Couillard, qui n'avait pas encore vendu son âme au dieu du privé, aller à Montréal à sa place.

Cette année, le maire a pris sa revanche et s'est pointé en ville, jeudi, afin d'assurer personnellement la prévente de l'été 2009 à Québec, été qui en principe ne devait pas tant être un été qu'un lendemain de veille. Mais avec le retour du Moulin à images, l'arrivée du Cirque du Soleil sous la bretelle de l'autoroute Dufferin et avec Sting, Placido Domingo et Kiss sur les Plaines, autant dire que le lendemain de veille de Québec s'est mué en fête du 401e.

 

Jeudi, dans les locaux de Loto-Québec en compagnie de Daniel Gélinas, le directeur du Festival d'été de Québec, c'est tout juste si le maire n'a pas sorti une billetterie portative de son sac, tant il avait l'âme vendeuse. Comment le lui reprocher? Après tout, voilà un homme qui a réussi à redonner la fierté à une ville qui ne savait plus à quoi la fierté ressemblait. Voilà un homme prévoyant qui s'est démené comme un damné pour éviter à sa ville un lendemain de brosse carabiné et une dépression. Grâce à ses efforts et à ceux de Daniel Gélinas, l'été 2009 à Québec sera à coup sûr le contraire d'un été morne ou meurtrier.

Reste que malgré ses qualités, le maire fait parfois trop dans l'enflure et le « marketing-ting». À l'entendre, le Festival d'été de Québec sera « le plus meilleur festival « de musique au monde. Je caricature. Le maire n'a pas employé ces termes, mais il a fait valoir que le Festival frapperait plus fort que jamais avec des têtes d'affiches exceptionnelles. Je veux bien, mais en quoi un spectacle de Sting est-il si exceptionnel? Ce dernier est venu des dizaines de fois à Montréal, y compris avec The Police en 2007. Le retour de Kiss, ces vieux guignols maquillés à la tronçonneuse? Ils seront au Centre Bell le 13 juillet. Placido Domingo? Il a chanté au Forum et dirigé l'OSM il n'y a pas si longtemps. Bref pour l'exception, il faudra repasser. Côté concerts et spectacles, l'offre montréalaise est plus abondante et diversifiée que celle de Québec. Mais Québec a quelque chose que Montréal n'a pas et n'aura jamais : un site immense et extraordinaire qui, les soirs d'été, rend n'importe quel spectacle spectaculaire. Je parle bien sûr des plaines d'Abraham où même le groupe rock le plus poche finit par être moins poche sous sa bienfaisante influence.

Cet amphithéâtre naturel est un des grands atouts de Québec. L'autre grand atout de la ville est l'optimisme entêté de son maire. Alors que toutes les instances touristiques montréalaises multiplient les prévisions à la baisse en raison de la récession, le maire Labeaume refuse obstinément d'entrer dans une logique récessive. Idem pour Daniel Gélinas, celui qui a convaincu le Cirque du Soleil de créer un spectacle extérieur unique et gratuit pour Québec. Pourtant, Gélinas a essuyé plusieurs refus de la part de la direction du Cirque. Lui aussi a rêvé d'une salle et d'un spectacle permanents du Cirque à Québec. Lui aussi s'est fait dire non, ce n'est pas rentable. Sauf qu'au lieu de baisser les bras comme on a baissé les bras à Montréal quand le projet avec le Cirque est tombé à l'eau, Gélinas a cherché une alternative et il a fini par la trouver.

Résultat : cet été, l'indécrottable Montréalaise que je suis ira très certainement faire un tour au 401e de Québec. Ce n'était pas dans mes plans, mais avec tout ce qui se passe à Québec et tout ce qui ne se passe pas Montréal, j'ai besoin de changer d'air. Si tous les Montréalais en font autant, qui sait, peut-être ceux qui dirigent notre ville vont finir par se réveiller.