En sortant de l'eau turquoise, son corps sculptural moulé dans le bikini blanc qui allait en faire un des grands sexe-symboles des années 60, la Bond Girl Ursula Andress ne pensait pas qu'un jour, elle vieillirait. Ni qu'elle souffrirait d'un mal silencieux appelé ostéoporose qui rendrait ses os aussi fragiles que de la porcelaine. Et pourtant, il y a une douzaine d'années, l'ex-volcanique Honey Ryder, première Bond Girl de la série, a entrepris le virage de la soixantaine avec un diagnostic, pas très sexy, d'ostéoporose.

À l'époque, l'actrice d'origine suisse ne savait même pas ce que le mot ostéoporose voulait dire. Aujourd'hui, à 73 ans, non seulement elle connaît le mot et le mal, mais elle a accepté d'être la porte-parole et le visage d'une campagne de sensibilisation internationale, financée par Novartis; la troisième pharmaceutique du monde est établie à Bâle, en Suisse, mais elle est implantée partout dans le monde y compris à Dorval, au Québec.

 

C'est donc l'ostéoporose et non le cinéma qui a amené Ursula Andress hier à Montréal, avec deux messages pour les femmes de plus de 50 ans. Le premier, c'est que pour éviter les fractures et la maladie paralysante et parfois mortelle de l'ostéoporose, les femmes doivent sans faute, au tournant de la ménopause, passer un test de densité osseuse. Le deuxième message, c'est que si, d'aventure, ce test se révèle positif, que les femmes sachent qu'il y a désormais toute une panoplie de médicaments sur le marché. On peut recevoir, une fois par année, une injection d'un produit créé par une entreprise dont elle a préféré taire le nom. Il s'agit bien sûr de Novartis.

Mais surtout, que les femmes sachent que le stéréotype de la vieille mémé toute voûtée et clouée à son fauteuil roulant ne correspond plus à la réalité de la femme moderne atteinte d'ostéoporose. L'Ostéoporose Girl d'aujourd'hui ressemble à s'y méprendre à Ursula Andress. Elle n'a peut-être pas joué aux côtés de Sean Connery ni vécu d'histoire d'amour avec James Dean et Marlon Brando, mais l'Ostéoporose Girl d'aujourd'hui nage, marche, court et voyage. Elle est active et autonome et, quand elle descend une volée de marches en talons hauts comme l'a fait Ursula, hier à l'hôtel Opus, elle le fait avec une belle vigueur et sans se casser la figure ni les os.

Reste qu'après avoir été le fantasme torride de toute une génération d'hommes qui s'endormaient en rêvant à ses splendides courbes, c'est tout un choc qu'Ursula Andress administre à ses fans en revenant sous les projecteurs avec une cause qui n'a rien de sexy ni d'émoustillant. N'a-t-elle pas peur qu'au contact de l'ostéoporose, son image iconique en prenne un coup et se fissure? En écoutant la question, Ursula Andress n'a pas perdu son sourire ni l'étonnante bonne humeur qui la fait souvent rire comme une jeune fille.

«Je ne pense pas à ce que j'étais avant, mais à ce que je suis devenue, soutient-elle. Et ce qui est épatant, c'est de constater que 45 ans après Dr. No, je ne marche pas avec une canne, le dos tout courbaturé. Non. Je suis active et toujours en mouvement comme avant. L'exploit, il est là, dans le fait de pouvoir tous les jours marcher, jardiner, nager.»

Nager. L'occasion est trop belle pour ne pas revenir sur ce célèbre bikini blanc, immortalisé au grand écran dans Dr. No et qui a été vendu à prix fort aux enchères, récemment. Contre toute attente, celle qui, aujourd'hui, ne porte plus que des maillots une pièce, affirme que ce bikini est en quelque sorte son oeuvre.

«Ce bikini, c'est une amie et moi qui l'avons dessiné et cousu, la veille du tournage, raconte-t-elle. Dans le roman de Ian Fleming, mon personnage était une Jamaïcaine qui portait des paréos très colorés. Moi, la couleur et les froufrous, ce n'était pas mon style. Alors j'ai proposé au réalisateur ce bikini blanc cassé.»

Le reste, comme on dit, appartient à l'Histoire et se décline dans une trentaine de films, des liaisons amoureuses avec des monstres sacrés comme James Dean, Brando et Sinatra, un Golden Globe pour sa performance dans le premier James Bond et des voyages aux quatre coins du monde qu'elle se rappelle avec une nostalgie assumée.

«J'ai eu la chance inouïe de vivre la grande époque de Hollywood, de voyager partout à un moment où la globalisation et l'américanisation n'avaient pas encore de prise sur la diversité des cultures. Bref, jusqu'à 1980, j'ai vécu dans un monde sublime, qui a disparu depuis.»

Aujourd'hui, Ursula Andress partage son temps entre sa villa en Italie et son appartement à Monaco. Elle vit seule et sans homme parce qu'elle ne veut plus payer le prix d'une grande passion. Il y a trois ans, elle a tourné pour le plaisir, dans le film déjanté de Matthew Barney, le mari de Björk. Autrement, la Bond Girl marche, court, nage, et profite de la vie... à l'os.