Le maire de Montréal Gérald Tremblay a commencé le ménage.

Premier coup de balai: la Société d'habitation et de développement de Montréal (SHDM) qui va redevenir publique.

Je ne sais pas si la SHDM va se comprendre avec tous ces changements. Elle a d'abord été fusionnée à la SDM (Société de développement de Montréal), puis elle a été transformée en organisme privé. Pas de doute, le brassage de structures est une spécialité montréalaise.

Munie d'un avis juridique tarabiscoté, la Ville a changé le statut de la SHDM. Elle a contourné sa charte et passé par-dessus la tête du gouvernement du Québec. Buts officiels: réaliser des économies en fusionnant deux sociétés paramunicipales et économiser du temps en ne demandant pas l'autorisation de Québec. But réel: rendre moins transparentes les transactions de la SHDM, qui gère le parc immobilier de la Ville évalué à plus de 300 millions.

 

Aucun élu ne siège au conseil d'administration de la nouvelle SHDM qui n'est plus assujettie à la Loi sur l'accès à l'information.

Les avocats de la Ville n'étaient pas d'accord avec ces «sparages» juridiques, mais leur voix discordante a été grossièrement noyée. Depuis que la SHDM a été transformée en organisme privé, des transactions douteuses ont été conclues et l'intégrité du directeur général, Martial Fillion, a été remise en question.

Le 20 novembre, le maire a convoqué les médias. Il était furieux. Il a défendu la SHDM et juré qu'elle était assujettie à la Loi sur l'accès à l'information en dépit de son statut d'organisme privé. Ce qui est faux. M. Tremblay était mal informé. Hier, il l'a reconnu.

Question: comment pouvait-il soutenir que la SHDM était assujettie à la Loi sur l'accès à l'information alors qu'un simple coup de fil au ministère des Affaires municipales m'a permis de constater le contraire?

Hier, le ton avait changé. Le maire a de nouveau convoqué les médias. Le point de presse était minimaliste. Pas de chaises, des journalistes debout, un micro, quelques questions en français, quelques questions en anglais. Le tout a été bouclé en moins d'une demi-heure.

Le maire avait délaissé son ton offusqué. Il a présenté les premières manoeuvres de son ménage: la SHDM redevient publique et des élus siégeront désormais au conseil d'administration.

Il a fait son mea, mais pas son culpa. Ce que le maire a dit, en gros, c'est O.K., O.K, je plie, parce que je veux que vous arrêtiez de m'achaler avec ça.

Il a refusé de dire qu'il avait commis une erreur, comme si le mot erreur lui écorchait la bouche. Pourtant, c'était bel et bien une erreur.

Les résultats de l'enquête de KPMG ont été dévoilés, hier. Le directeur de la SHDM, Martial Fillion, qui avait été suspendu avec solde le 10 octobre, a été mis à la porte. Son contrat a été résilié.

L'enquête conclut que M. Fillion a envoyé une série de chèques au promoteur Frank Catania, impliqué dans le projet Contrecoeur, sans consulter son conseil d'administration.

La SHDM a vendu le terrain de Contrecoeur à Catania pour la somme nette de 4,4 millions. Pourtant, il était évalué à 31 millions.

Le maire est resté extrêmement prudent. Il a pris acte de la décision, point final.

Par contre, il ne s'est pas gêné pour critiquer deux membres de l'exécutif de son parti politique qui ont siégé au comité de sélection de la SHDM lors de l'octroi du projet Contrecoeur. Ils ont choisi, oh! surprise, le groupe Catania.

Le maire a émis une directive défendant aux membres de son parti de siéger à un comité de sélection qui a un lien avec la Ville de Montréal. Il a ajouté: «Je ne pensais pas être obligé d'émettre une telle directive.» En d'autres mots, c'est tellement évident que ça n'a pas de bon sens, un peu de retenue!

Pourquoi ne fait-il pas preuve de la même lucidité pour la SHDM?

michele.ouimet@lapresse.ca