Toutes les raisons étaient bonnes d'aller faire une virée à Québec le week-end dernier, d'autant que l'été y offrait le meilleur de lui-même. Le premier incitatif était la présentation de Starmania opéra dans le cadre du Festival Opéra de Québec. Je n'avais pas vu cette adaptation de l'oeuvre de Luc Plamondon et Michel Berger lors de sa présentation en 2008 et 2009, à Québec et Montréal. La production est reprise avec les mêmes voix et dans la mise en scène et le dispositif visuel imaginés par Michel Lemieux et Victor Pilon.

Je faisais partie de ceux qui, dans les années 90, trouvaient que cette oeuvre avait perdu de sa pertinence. Ne restait que la beauté de ses chansons phares. Ce qui est bien, avec les grandes oeuvres, c'est qu'elles ont la chance de refaire surface au gré de l'actualité. C'est exactement ce qui se produit en ce moment avec Starmania. Comment ne pas faire de liens avec ce que nous vivons en ce moment et le climat terroriste qui règne sur scène, les propos de droite de ce candidat présomptueux (Donald Trump) ou cette envie irrépressible de connaître la gloire à tout prix (La voix)?

La représentation de samedi, sous le regard bienveillant de Luc Plamondon, a été un véritable triomphe.

Le public applaudissait la magnifique performance des interprètes (Marie-Josée Lord, Étienne Dupuis, Marc Hervieux, Lyne Fortin, Raphaëlle Paquette, Pascal Charbonneau, Krista de Silva) et l'éblouissant travail de transposition des deux metteurs en scène, mais il acclamait aussi une oeuvre qui, à l'approche de ses 40 ans, a basculé dans la postérité.

Il y a quelques jours, Juste pour rire annonçait que la comédie musicale Footloose serait montée l'été prochain dans la métropole. Je trouve qu'en pleines célébrations du 375e anniversaire de Montréal, on a raté une belle occasion de redonner vie à l'une des plus grandes oeuvres théâtrales et musicales jamais créées chez nous. J'espère que d'autres producteurs auront les sens plus aiguisés.

Starmania opéra, à la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec, les 3 et 4 août

Le pavillon Lassonde

J'ai évidemment profité de cette visite dans la Vieille Capitale pour aller voir le nouveau pavillon Pierre Lassonde du Musée des beaux-arts du Québec. Son architecture mérite les superlatifs entendus lors de son inauguration il y a quelques semaines. Fait de verre et de matériaux qui n'aiment que le gris, ce cube contemporain se conjugue parfaitement à l'architecture environnante, y compris l'ancienne église, située juste à côté, et dans laquelle il se fond.

La vocation de ce pavillon est d'accueillir l'art contemporain des artistes québécois, ceux des années 60 à de nos jours, ainsi que les arts décoratifs et le design. Une grande salle au rez-de-chaussée sert aux expositions temporaires. Ne manquez pas celle qui est consacrée en ce moment aux installations. Il est rare de voir autant d'oeuvres gigantesques dans un même lieu.

Après la visite des trois étages, empruntez le tunnel souterrain baptisé passage Riopelle. En effet, il abrite le légendaire Hommage à Rosa Luxemburg du célèbre peintre. Enfin, cette oeuvre (plusieurs fois déménagée) respire et jouit d'un lieu qui lui convient. J'aurais souhaité un éclairage plus tamisé dans le tunnel pour mieux l'apprécier, mais bon, c'est déjà mille fois mieux.

Le tunnel vous amène à l'édifice principal (à moins que vous n'y commenciez votre visite). Dans le pavillon Charles-Baillairgé (ancienne prison), on a fait un réaménagement important qui mérite d'être souligné. Quatre grands peintres québécois ont maintenant leur propre salle. Les joyaux du musée tirés des collections Pellan, Riopelle, Lemieux et Leduc sont mis en valeur et proposent un parcours riche et instructif pour qui veut découvrir ces quatre maîtres.

Bref, avec l'ajout de ce pavillon et les changements apportés, le Musée national des beaux-arts du Québec prend du galon et devient à lui seul une raison de se rendre à Québec.

Riopelle au Cap Tourmente

Dans le charmant quartier de Sillery, on retrouve la maison Hamel-Bruneau, charmante demeure historique où l'on présente des expositions dans les nombreuses pièces et des concerts dans le jardin. Jusqu'au 18 décembre, on présente l'exposition Riopelle au cap Tourmente. Au début des années 80, le peintre vivait en France, mais il avait en tête les fameuses oies des neiges qui viennent chaque année à cet endroit du Québec. Il a conçu une série de 13 lithographies, l'une des plus belles et des plus fortes qu'il ait réalisées. Le galeriste montréalais Simon Blais a réuni les treize lithos. Un moment rare.

L'expo, réalisée par l'une des filles du peintre, Yseult Riopelle, montre aussi une série de 18 assemblages (des techniques mixtes et des collages) que le peintre a exécutées à partir de fragments de ces lithos. Ici et là, on reconnaît des oies provenant de la série de lithos. Riopelle fait la démonstration qu'à partir de la même matière, un artiste peut tout réinventer. N'est-ce pas là la preuve de son génie et de son infatigable besoin de chercher et de se renouveler? À voir absolument.

Maison Hamel-Bruneau, 2608, chemin Saint-Louis, Québec,  418 641-6280