Lundi, un comité entreprenait une tournée d'une vingtaine de villes québécoises. Le but ultime de ce vaste exercice? Revoir la politique culturelle du Québec. Rendu ici, je sais que vous y allez d'un solide bâillement, ou que vous êtes tenté de faire glisser votre doigt pour passer au prochain écran. Vous auriez tort. Ce qui va se passer au cours des prochaines semaines est primordial pour l'avenir de notre culture, pour la survie des artistes et créateurs et pour le futur de notre société.

La meilleure façon de s'en rendre compte est de lire un ouvrage qui était lancé mercredi et qui a pour titre La culture, un capital à faire fructifier. L'auteur, Gérald Grandmont, a été pendant plus de 30 ans sous-ministre adjoint au ministère de la Culture et des Communications. Il est aujourd'hui professeur à HEC Montréal en gestion des institutions culturelles. Cet homme a vu passer plusieurs ministres de la Culture, des tonnes de gestionnaires, et a rencontré de nombreux grands penseurs de la culture. Cela lui procure un regard d'ensemble rare et fabuleux sur la manière dont les fondements de notre culture se sont établis.

Je souhaite que tous les membres qui font partie du comité de consultation et tous ceux qui s'intéressent à ce qu'on s'apprête à faire lisent ce livre. Ses repères historiques nous font découvrir comment, au fil des décennies, nous avons pris en main la «gestion» de notre culture. Il nous fait surtout prendre conscience de l'importance de la culture dans le développement de notre société.

Du début du XXe siècle, lorsque l'Église contrôlait tout y compris notre développement intellectuel - les protestants anglophones auront d'ailleurs une longueur d'avance sur la création d'un système d'institutions culturelles à cause de cela -, jusqu'à la mise sur pied d'une première politique culturelle en 1992, en passant par la création des premiers organismes, le livre de Gérald Grandmont ne laisse rien au hasard. 

C'est la première fois au Québec que quelqu'un ose raconter l'histoire de nos institutions culturelles. Je salue cette démarche qui est le fruit de toute une carrière.

La politique culturelle actuelle date donc d'il y a plus de 20 ans. Trois objectifs avaient été fixés à l'époque: définir l'identité québécoise à travers une politique culturelle, soutenir les artistes dans leur démarche et rendre accessible la culture à un maximum de Québécois, peu importe leur situation géographique.

Les membres du comité étudieront tous ces aspects, mais s'attarderont sans doute au troisième point. Rendre accessible la culture aux gens veut dire adapter la diffusion ou la mise en marché des produits culturels, particulièrement dans le domaine du disque et du cinéma, aux nouvelles réalités d'aujourd'hui. Le nerf de la guerre se trouve là, à mon avis.

Ces objectifs, je les ai entendus de la bouche de Monique Simard, directrice de la SODEC, lors de deux rencontres que j'ai eues avec elle au cours de la dernière année. Elle ne cesse de répéter qu'on doit revoir notre manière de distribuer les produits culturels, d'imaginer leur accessibilité et de concevoir les plans de mise en marché. Elle a entièrement raison. La vente ou la location de disques ou de films en ligne (streaming) a complètement bouleversé cette industrie au cours des 10 dernières années. Il est grand temps d'adapter notre approche à cette nouvelle réalité afin de protéger notre industrie culturelle et ses créateurs.

On a eu la bonne idée d'inviter Liza Frulla à faire partie de ce comité. Elle sera la mémoire du groupe, car c'est elle qui était ministre de la Culture et des Communications au moment où a été adoptée la première politique, en 1992.

Après une première journée d'audience à Québec lundi dernier, le comité commence sa tournée officiellement aujourd'hui. Pendant que vous serez en vacances à lire, écouter de la musique ou regarder des films, des gens du milieu culturel viendront présenter leur mémoire à un comité qui aura ensuite la responsabilité de redéfinir notre politique culturelle. Ayons une pensée pour eux sur la plage.

Débattons de la question!

Dans le cadre des consultations sur le renouvellement de la politique culturelle du Québec, la Chaire de gestion des arts Carmelle et Rémi-Marcoux organise une discussion avec quatre jeunes gestionnaires qui vont expliquer ce que seraient leurs priorités dans cette nouvelle politique. Au cours de cet événement, le livre La culture, un capital à faire fructifier de Gérald Grandmont sera officiellement lancé. L'événement a lieu mercredi à 17 h, à la salle Investissement Québec de HEC Montréal, 3000, chemin de la Côte-Sainte-Catherine. C'est gratuit.