Jacques-André Dupont est le roi de la commandite dans le domaine des grands évènements. C'est ainsi qu'il s'est forgé une réputation. Il a fait de Spectra un modèle dans le genre. « Quand je suis arrivé chez Spectra, on allait chercher environ 1,7 million de dollars en commandites, raconte-t-il. En quelques années, j'ai fait passer cela à 20 millions de dollars. »

Pour cela, il n'a pas hésité à revoir complètement la manière d'offrir aux généreux commanditaires la visibilité et la reconnaissance auxquelles ils s'attendent. Aujourd'hui, Spectra jongle avec 27 millions de dollars en commandites pour la tenue de ses trois grands festivals : le Festival international de jazz de Montréal, les FrancoFolies et Montréal en lumière.

Mais résumer le talent de Jacques-André Dupont à « quêteur de commandites » serait réducteur. En 28 ans de carrière chez Spectra, cet homme a su gagner la confiance d'Alain Simard et d'André Ménard, deux des fondateurs.

« J'étais responsable du marketing chez Foto Plus à 23 ans. On avait une quarantaine de magasins. Steinberg a acheté cette compagnie, la chicane a pogné et j'ai décidé de partir. J'avais trouvé un emploi, mais une amie qui travaillait chez Spectra m'a proposé de rencontrer Simard et Ménard. Le salaire qu'ils me proposaient était d'un tiers inférieur à celui qu'on m'offrait ailleurs. J'ai quand même dit oui. J'avais envie de travailler avec eux et pour Spectra. »

Au bout de cinq ans, Jacques-André Dupont est devenu l'un des quatre associés de Spectra avec Alain Simard, André Ménard et Denyse McCann. Il est rapidement devenu un atout important pour l'entreprise, qui a pris beaucoup d'ampleur dans les années 90, en ajoutant à ses activités la gérance d'artistes, la production télévisuelle et la gestion de salles.

C'est Jacques-André Dupont qui a favorisé le mariage de Spectra avec Bleublancrouge et gsmprjct pour créer X3 Productions, une compagnie qui a mis sur pied des expositions à partir des univers de Star Wars et Indiana Jones.

Ainsi, lorsque Spectra a été vendu au Groupe CH en décembre 2013 et qu'Alain Simard a décidé de prendre du recul face à la gestion, personne dans l'entreprise n'a été surpris de la nomination de Jacques-André Dupont.

« Personne ne s'est dit : "Ah ! C'est lui ?" Quand Alain partait, c'est moi qui assumais les fonctions de président. C'était écrit dans le ciel que j'allais le remplacer », raconte M. Dupont.

Cette longue expérience au sein de Spectra fait de lui un président qui a déjà une idée claire de la direction qu'il entend donner aux différentes composantes de l'entreprise. « On est un leader et il faut le rester. Il faut donner le ton. Cela dit, il y a des défis devant nous. Le contexte n'est plus le même. Il faut revoir l'offre du Festival de jazz d'ici 2018. »

Ce plan d'action, Jacques-André Dupont en a fait part à son nouveau patron, Geoff Molson. Ce dernier a donné son approbation sans hésitation.

La vente de Spectra au Groupe CH a inquiété les gens de l'industrie du spectacle. Jacques-André Dupont tient à se faire rassurant là-dessus. « D'abord, plusieurs pensent encore que c'est evenko qui nous a achetés. Ce n'est pas cela. C'est le Groupe CH. »

« Nous travaillons avec evenko, nous développons des projets avec eux. Mais mon boss, c'est Geoff Molson et j'ai toute sa confiance », explique M. Dupont.

Pendant la conversation, Jacques-André Dupont répétera à plusieurs reprises que, lorsqu'on gère des festivals, on doit se soucier de deux choses : l'artiste et le spectateur. « C'est tout ce qui compte, dit-il. Et c'est ce que j'aurai en tête lorsque je procéderai au travail de renouvellement. Je ne suis pas en mode révolution, je suis en mode renouvellement. »

Lorsque nous l'avons rencontré, le Quartier des spectacles était en pleine ébullition. La gigantesque infrastructure des FrancoFolies se mettait en place. Alors que des dizaines d'employés s'affairaient, Jacques-André Dupont gardait son calme et semblait puiser une forme d'énergie dans cette agitation. Il faut dire que cet homme, aujourd'hui âgé de 52 ans, a toujours aimé l'action.

UN HOMME PASSIONNÉ

Né à Paris alors que ses parents y étudiaient (son baptême a eu lieu à la cathédrale Notre-Dame au moment où Charles de Gaulle prononçait un discours sur le parvis), Jacques-André Dupont a grandi à Sainte-Foy. À l'aube de la vingtaine, il est venu étudier à Montréal. Mais les difficultés financières de son père l'ont forcé à quitter ses études au bout de deux ans. « Mon père était photographe. Il m'a légué son équipement. Je faisais des photos pour les circulaires de Jean Coutu afin de gagner des sous. »

Un jour, il s'est fait voler son équipement. Il n'avait pas l'argent pour tout racheter. Il s'est vu contraint de mettre sa passion en veilleuse. Pendant 25 ans, il n'a pas touché à un appareil photo. Mais il y a quelques années, il a eu envie de s'y remettre. Et comme il ne fait pas les choses à moitié, il s'est donné entièrement à ce hobby, au point de devenir un champion dans son domaine.

« Après avoir fait du nu et de la mode, je me suis tourné vers la nature et l'animalier. Un jour, National Geographic m'a appelé pour utiliser une de mes photos de fous de Bassan. Tout est allé très vite. Un agent de Londres m'a contacté pour me dire qu'il voulait s'occuper de moi. Mes photos ont été publiées dans Paris Match, The Telegrah et d'autres. » Récemment, l'une de ses photos a fait la une d'Outdoor Photographer.

L'autre grande passion de Jacques-André Dupont est la musique. « À chacun de ses voyages, mon père me rapportait un disque Barclay. C'est comme ça que j'ai découvert tous les grands de la chanson française. Cela ne m'a pas empêché de me tourner vers le rock à l'adolescence. J'étais un fan de Led Zeppelin. Le jazz et le blues sont venus plus tard. » 

Cette passion de la musique l'a amené à jouer de la guitare et, plus tard, à faire l'acquisition de guitares de collection. Il en possède aujourd'hui plus de 25.

Entre un safari photo en Tanzanie et quelques accords de guitare, Jacques-André Dupont consacrera tout son temps à faire grandir Spectra. Pour l'heure, il doit veiller à cette 28e édition des FrancoFolies, la première sous sa présidence. Quand nous l'avons rencontré mardi dernier, le temps n'était pas celui que l'on souhaite pour un festival extérieur. Mais cela n'avait pas l'air de lui causer de stress. Décidément, Jacques-André Dupont semble avoir toutes les qualités requises pour faire ce boulot.