Entre les vagues de chaleur extrême et les autres événements météo hors normes, il y a de quoi s’inquiéter, cet été, de l’arrivée plus que concrète des changements climatiques.

Et il y a de quoi déprimer. Certains diront paniquer.

Mais en même temps, si on lit un peu le journal sur le bord de la piscine ou du lac, et qu’on s’informe, on ne peut plus dire que personne ne fait rien.

La population est peut-être actuellement en pleines vacances de la construction, mais globalement, quand même, elle se mobilise.

Les consommateurs demandent des comptes à leurs fournisseurs. Les entreprises bougent. Les travailleurs exigent des changements.

PHOTO PAUL CHIASSON, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Plus de la moitié de la nourriture qu’on produit n’arrive jamais dans notre assiette, rappelle notre chroniqueuse.

C’est du moins l’impression que m’ont laissée deux nouvelles très intéressantes cette semaine.

D’abord, on a appris que le grand syndicat représentant les fonctionnaires de la Colombie-Britannique, le British Columbia Government and Service Employees’ Union (BCGEU), avait demandé à Saputo, qui doit tenir son assemblée annuelle la semaine prochaine, un rapport sur ses efforts pour diminuer le gaspillage alimentaire.

De façon générale, ce type de gaspillage est un vrai scandale au Canada. Plus de la moitié de la nourriture qu’on produit n’arrive jamais dans notre assiette. 

Donc, ce syndicat agit pour attirer l’attention sur la nécessité de mieux utiliser nos ressources.

Et hier, on a pu voir que le grand épicier Sobeys, à la demande de ses marchands, passant eux-mêmes le message des clients, avait décidé de retirer totalement les sacs de plastique de ses 37 établissements IGA et Rachelle Béry de l’île de Montréal. La chaîne de détaillants, a expliqué Anne-Hélène Lavoie, responsable des communications externes d’IGA, estime ainsi retirer 12 millions de sacs dans la prochaine année. Oui, vous avez bien lu. C’est énorme.

Et en janvier prochain, Sobeys cessera l’utilisation des sacs d’épicerie en plastique dans l’ensemble de ses 225 magasins au Canada. L’entreprise estime à 225 millions par année le nombre de sacs de plastique utilisés.

On a beau faire des efforts pour ne pas oublier ses sacs d’épicerie à la maison avant de partir, on en consomme encore beaucoup.

En outre, la semaine prochaine, ai-je appris en discutant avec Mme Lavoie, la chaîne va aussi annoncer qu’elle déploie dans l’ensemble des IGA ce qui était jusqu’à présent uniquement un projet-pilote permettant aux clients d’apporter leurs contenants réutilisables pour acheter notamment du prêt-à-manger, des viandes, des poissons.

L’expérience a été un succès. « On l’a bien testé », dit-elle.

Donc on pourra aller à l’épicerie avec ses contenants, à faire peser et inspecter pour s’assurer notamment qu’ils sont en bon état et bien propres. Tout doit respecter les cadres sur la santé du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, notre cher MAPAQ.

« On est rendus là », a ajouté la porte-parole de la chaîne d’épiceries.

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Stephanie Smith croit elle aussi que les demandes des travailleurs, de la population, pour changer nos habitudes de consommation nuisibles à l’environnement sont incontournables.

« Nous sommes poussés par nos membres », dit la présidente de la BCGEU, un syndicat de 80 000 travailleurs, qui a acheté assez d’actions chez Saputo pour demander, à la rencontre annuelle des actionnaires, que l’entreprise soit plus transparente au sujet de ses efforts pour lutter contre le gaspillage alimentaire.

Saputo a demandé que la résolution soit défaite, mais l’entreprise a néanmoins fait savoir qu’elle travaillait sur la question et qu’elle était en train d’établir un plan. La porte-parole de la société a confié plus tôt cette semaine au Globe & Mail qu’elle lancerait un projet-pilote de diminution du gaspillage.

Ce n’est pas la première fois, explique Mme Smith, que le syndicat cherche à attirer l’attention des grandes entreprises et du public sur les sujets qui touchent ses membres, en amenant des questions et des résolutions aux assemblées annuelles.

La sécurité des travailleurs, l’environnement, les iniquités sociales font partie des thèmes que le syndicat soulève par différentes actions de ce type.

L’an dernier, par exemple, il a demandé à Dollarama de faire rapport sur ses efforts en matière de durabilité. Et Restaurant Brands International, qui chapeaute notamment Tim Hortons et Burger King, a été enjointe de parler de déforestation.

Pourquoi Saputo, cette fois ? Parce que Sustainalytics, une entreprise qui évalue la performance des sociétés non pas du point de vue financier, mais du point de vue de la qualité de leur gouvernance et de leurs efforts sociaux et environnementaux, a trouvé que Saputo avait du chemin à faire.

Quelle sera la prochaine question de la BCGEU ? Et à qui ?

Bien des entreprises pourraient être interrogées sur leur sous-traitance outremer et sur les droits des travailleurs, sur l’utilisation du plastique dans leurs emballages, sur le peu de diversité sociale au sein de leurs équipes de direction…

Mme Smith n’ouvre pas son jeu. « On cherche à demeurer proactif, assure-t-elle. Et il restera toujours des questions à poser. »