Jusqu'à présent, de toutes les choses qui ont été dites par les dirigeants des pays les plus touchés par la grippe H1N1 (oui, la porcine, la mexicaine, l'Aléna-esque, la A comme dit Libération, bref, celle dont on parle depuis 12 jours) la palme de la clarté et de la nuance sur le degré d'inquiétude à avoir revient aux propos du président américain Barack Obama. Il les a prononcés vendredi à la sortie d'une rencontre de son cabinet, en s'adressant aux journalistes.

«Quelqu'un m'a demandé pourquoi celle-ci est différente des autres grippes. On ne sait pas avec certitude si elle sera plus grave que les autres grippes saisonnières. Quelqu'un faisait remarquer que plus de 36 000 personnes meurent chaque année, en moyenne, de grippe saisonnière. Et il y a 200 000 hospitalisations. Peut-être que le H1N1 va faire sa route comme une grippe ordinaire. Et nous nous serons préparés. Et nous n'aurons pas besoin de toute cette préparation. La raison pour laquelle les scientifiques sont inquiets, c'est que c'est une nouvelle souche, et ce qui se passe, c'est que les Américains et les gens de par monde ne se sont pas bâti une immunité comme ils s'en sont bâti une pour la grippe saisonnière à laquelle nous sommes habitués.»

 

Oui, le virus varie d'année en année, a-t-il ensuite ajouté. Mais là, on sort carrément de la famille de virus habituelle. Voilà pourquoi, croit le président américain, il faut se préparer à l'éventualité d'un dérapage, bien que, pour le moment, les sources d'inquiétude soient théoriques.

Cette grippe, a-t-il conclu, on doit s'en préoccuper, mais ne pas s'en alarmer.

Ce n'est pas parce que l'OMS est au degré d'alerte 5 (sur une échelle de 6) que nous, à la maison, devons faire la même chose.

En fait, tout semble indiquer que, sur nos patios printaniers, nous pouvons respirer calmement. On aimerait, avec la belle saison, ne pas avoir à se préoccuper de la contagion de la grippe de la même façon qu'à la veille des fêtes de Noël - zéro bisou aux amis le moindrement enrhumés, savon et Purell à portée de main en permanence - mais pour les masques, on oublie ça.

Non seulement la grippe ne se répand pas comme une traînée de poudre comme on l'a tous craint dans nos pires cauchemars, mais en plus, elle ne semble pas plus grave pour le moment, ici à tout le moins, que la grippe traditionnelle.

Et comme l'a fait remarquer le journaliste du Globe and Mail André Picard, spécialiste du journalisme médical, il y a à peine autant de gens qui sont morts de cette grippe depuis le début de la crise (23 en tout) que de gens morts de malaria dans la dernière... demi-heure.

Ce n'est pas le Tamiflu qu'il faut stocker, ce sont des moustiquaires qu'il faut acheter... pour les enfants africains. (Toutes sortes d'ONG mènent campagne en ce sens, une moustiquaire coûte 10$.)

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Cela ne veut pas dire que toutes les questions déclenchées par cette nouvelle grippe aient trouvé réponse.

De plus en plus de spécialistes disent que si les choses se calment maintenant, cela ne veut pas dire que le virus ne reviendra pas en force à l'automne avec le début de la saison traditionnelle de la grippe. (Le virus, habituellement, supporte mal le temps chaud de l'été, bien que, m'a fait remarquer un médecin, le Mexique n'ait pas exactement un climat sibérien, ce dont le H1N1 n'a pas semblé se plaindre...) Si la grippe revient en force, le vaccin sera-t-il prêt? Et nous, serons-nous capables de réagir adéquatement quand on criera (encore) au loup?

Ensuite, on ne sait toujours pas pourquoi les Mexicains ont été touchés aussi durement. On a fait grand cas de la jeunesse et de la santé de ceux qui en sont morts. Mais encore?

Est-ce que l'accès aux soins de santé est mis en cause?

Et en ce sens, que penser de nos perspectives au Québec? Si cette grippe est grave mais soignable à condition d'avoir des soins adéquats rapidement, serons-nous capables, avec nos réseaux d'urgences en surcapacité et le manque de médecins de famille en première ligne - ceux-ci sont cruciaux pour la détection des cas tôt dans le processus -, de faire face à une demande massive de services médicaux?