Ceux qui me lisent ont entendu parler de ma nouvelle phobie pour la première fois sur Twitter. Quelque chose qui ressemblait à : «Cosmétiques, produits chimiques Super inquiète. Tout jeté.»

Pourquoi ai-je écrit ça, ce jour-là et pas avant? Je ne pourrais vous dire. Je venais peut-être de lire l'énième article qui m'avait finalement convaincue de m'inquiéter des parabènes, ces agents de conservation utilisés dans les produits cosmétiques qui soulèvent la controverse à cause de liens possibles avec le cancer du sein.

 

Ou peut-être m'avait-on parlé la veille des phtalates, ces ingrédients utilisés notamment dans la composition des parfums ajoutés aux produits cosmétiques, dont certains s'inquiètent aussi.

Ou peut-être ai-je tout simplement allumé, ce jour-là, sur le fait que ce qu'on met sur notre peau peut tout à fait entrer dans notre corps. Pensez à ça en lisant une liste d'ingrédients les fabricants doivent les afficher sur les produits depuis la fin de 2006 où on nous parle de phénoxyethanol, de cyclopentasiloxane, de butyrospermum C'est peut-être tout à fait inoffensif, tout ça, mais peut-on être rassuré quand on flotte autant dans le noir?

Les effets pratico-pratiques de ma nouvelle crise de confiance ont déboulé ensuite assez rapidement. Recherches sur l'internet pour comprendre quels ingrédients étaient les plus suspects, identification des marques et des produits qui passaient l'examen

La gamme de Stella McCartney, évidemment, a retenumon attention. Super packaging, super philosophie nature, super qualité. On en mettrait sur nos tartines. Le prix? 88$ les 50ml. Ouille!

A suivi ensuite, évidemment, le ménage. Une bonne chose puisqu'une bonne partie de ma collection de petits pots avait l'air d'avoir traversé la guerre de 14-18 et aurait dû être à la poubelle depuis longtemps, si ce n'est que pour des raisons de dates de péremption.

Qu'ai-je gardé?

Un pot de baume maman-bébé de l'Occitane en Provence dont je me sers comme baume à lèvres. Il reçoit une note parfaite sur le site www.cosmeticsdatabase.com où on peut enquêter sur une tonne de produits. J'ai aussi gardé une bouteille de bain moussant California Baby, mon démaquillant Klorane (je ne l'ai pas vu évalué sur les sites web écolo mais il n'y a pas de parabènes dans les ingrédients), ma crème de jour Dr. Hauschka

Après ce grand peeling de ma pharmacie, j'ai finalement appelé Mike Patton, le porte-parole de l'Association canadienne des cosmétiques, produits de toilette et parfums, qui m'a dit, en gros, que je m'en faisais pour rien. Santé Canada, m'a-t-il expliqué, surveille ça de près et ne fait pas de cadeau. «Croyez-moi, ils sont très sérieux.» Selon lui, s'inquiéter de certains produits chimiques en petites doses dans les cosmétiques c'est comme s'inquiéter de la présence en minidoses de chlore dans notre eau. On sait que le chlore est très toxique en fortes doses. Mais on sait aussi que c'est un mal nécessaire dans l'eau, à très faible concentration, pour contrôler les bactéries.

J'ai trouvé une oreille plus inquiète, comme la mienne, chez Sean Gray, un des analystes principaux au Environmental Working Group, un organisme installé à Washington qui veut faire changer la réglementation américaine sur les ingrédients permis dans l'industrie cosmétique. C'est ce groupe qui a mis sur pied sur la base de donnée internet www.cosmeticsdatabase. com. Selon lui, parabènes, phtalates et compagnie ne devraient pas être tolérés et les citoyens ne devraient pas avoir à se battre pour qu'on les enlève.

Le EWG demande en outre que la réglementation américaine soit élevée au même niveau qu'enEurope, beaucoup plus stricte.

Et le Canada? «La liste des ingrédients prohibés n'est pas aussi longue qu'en Europe et la plupart de ceux qui le sont ne sont pas utilisés par l'industrie. Mais au moins, c'est sur papier, et aussi, les quantités permises sont limitées.»

Vincent Letertre, qui dirige la division du développement des produits chez Dr. Hauschka, un fabricant allemand de produits cosmétiques naturels depuis 40 ans, trouve quant à lui que ma nouvelle obsession n'a rien d'exceptionnel.

«C'est normal qu'on se demande «qu'estce que je mets sur ma peau?», de la même façon qu'on se demande «qu'est-ce que je mange?»», dit-il.

Les produits de cette entreprise «granole « depuis toujours n'ont pas que des notes parfaites sur le site du EWG, mais la philosophie de la boîte met en confiance ceux qui craignent le synthétique. Pour vous donner une idée, ils ont leurs propres jardins bio où ils font pousser une partie des plantes utilisées pour faire leurs crèmes...

Sean Gray ne veut pas appuyer d'entreprises, mais il m'a rassurée: de bons produits, il y en a.

Comme le beurre de karité de l'Occitane en Provence, qui provient vraiment de coopératives du Burkina Faso? (Je le sais parce que des dames burkinabées me l'ont déjà dit.)

«Je ne peux vraiment pas endosser de marque. Mais je peux vous dire une chose: pour se laver, il n'y a rien comme un bon, solide, pain de savon.»