Accueillie avec une chaleur et un enthousiasme qu'on n'avait pas encore vus depuis le début de la convention démocrate, même pas pour Michelle Obama ou l'apparition du sénateur Edward Kennedy qu'on croyait trop malade pour se déplacer, Hillary Clinton a relevé hier soir un double défi.

Elle a été capable de montrer fermement son appui inconditionnel à Barack Obama, tout en conservant intacte la force de son personnage politique.

Dans un discours prononcé tard en soirée, elle a dû répéter le nom de Barack Obama près d'une vingtaine de fois, chaque fois accueillie par des applaudissements nourris, chaque fois confirmant qu'elle n'avait aucunement l'intention de laisser planer le doute sur son esprit d'équipe.

Mais elle a en même temps livré un discours qui aurait très bien pu être celui de la candidate choisie, attaquant efficacement le candidat républicain John McCain tout en lançant les grandes lignes de ses projets politiques prioritaires, dont la mise en place d'un régime public en soins de santé, la fin de la guerre en Irak et une gestion de l'économie plus équitable pour les moins nantis.

Mme Clinton était dans une situation délicate. Elle ne pouvait se permettre d'avoir l'air moins que 200% derrière le candidat présidentiel démocrate. Mais elle devait en même temps reconnaître ces 18 millions d'électeurs qui l'ont choisie durant la course à l'investiture et dont un grand nombre n'ont toujours pas digéré sa défaite.

Rebecca Traister, qui a suivi de près la campagne de Mme Clinton, rapportait hier dans le webzine Salon que les manifestations de pro-Clinton amers, dont les fameux PUMÀ (Party Unity My Ass, Unité du parti, mon c...l) étaient en fait plus rares que l'impression créée par les médias américains.

Mais selon un récent sondage Wall Street Journal-NBC dont faisait état hier mon collègue Richard Hétu, le transfert des appuis Clinton vers Obama se fait effectivement difficilement: seulement la moitié des démocrates qui ont voté pour Hillary Clinton durant les primaires se disent prêts maintenant à voter pour Barack Obama.

Et que dire du texte d'opinion plutôt sombre de Susan Faludi, publié hier dans le New York Times et intitulé «Second-Place Citizens» - les citoyens qui arrivent en deuxième place - où l'auteur de Backlash et figure de proue du féminisme américain contemporain, se désole à 100% de la défaite de Mme Clinton.

Hier, le message dit et non dit qui se dégageait du discours de la candidate défaite était notamment pour tous ces gens déçus et aurait pu se résumer ainsi: «Appuyez Obama car nous avons absolument besoin de reprendre la Maison-Blanche et je crois sincèrement que cet homme peut nous aider. Mais vous avez eu raison de m'appuyer. Et ne vous inquiétez pas: je suis encore bien là.»