Elle n'est plus candidate à l'investiture démocrate. Mais Hillary Clinton est encore dans la campagne.

C'est John McCain qui l'a lui-même ramenée hier, en allant chercher une femme comme colistière. Tentant évidemment, ainsi, d'aller courtiser les pro-Clinton amers.

Le jour où Obama aurait enfin pu fermer le dossier Hillary et se dire à lui-même en soupirant: «Voilà une affaire de faite», la voilà qui rebondit encore dans sa vie avec un chignon, des lunettes et un sourire de presque Miss Alaska qui semble dire: «Croyais-tu vraiment qu'on allait oublier ces 18 millions de personnes qui n'ont PAS voté pour toi?»

Combien de temps, pensez-vous, a-t-il fallu aux stratèges de John McCain, en séance de remue-méninges, pour arriver ainsi à tirer parti de la division Obama-Clinton dans les troupes démocrates?

On peut très bien se les imaginer en réunion. Quelqu'un lance à la blague: «Prenons Hillary comme colistière!

- Hillary?

- Oui, oui, on prend Hillary! Pas vraiment elle, mais on trouve une autre Hillary, une autre mère de famille genre madame qui regarde le pays comme un bungalow en désordre et qui a un plan pour tout ranger et tout réparer, devenir amie avec les voisins et préparer à souper aux enfants en même temps.

- Sarah?

- Bingo!»

Il faut dire que Sarah Palin, 44 ans, gouverneure républicaine d'Alaska, en jette tous azimuts. Réformiste, elle n'a pas peur de brasser le statu quo -elle s'est fait connaître en s'indignant contre des pratiques douteuses du gouvernement de l'Alaska. Elle aime la chasse (et donc n'est pas du tout anti-fusil), son mari est d'origine autochtone, l'aîné de ses cinq enfants sera sous peu en Irak et le cadet, né au printemps, est trisomique (elle est totalement pro-vie et a choisi de le porter sachant qu'il était handicapé). Ah oui, elle pilote un hydravion, engin sur lequel elle était appuyée quand le magazine Vogue l'a photographiée l'hiver dernier.

Une petite boîte à lunch avec ça?

Hier, sur les blogues politiques américains, on parlait d'un pari risqué de la part de McCain, qui met de l'avant une femme, oui, mais une vraie conservatrice, alors que Mme Clinton était à l'opposé de Palin sur la question de l'avortement, du mariage des couples homosexuels et du contrôle des armes à feu, notamment. Jeu dangereux, donc?

Certains démocrates, cependant, n'hésitaient pas à parler d'une décision «apeurante», sous-entendu «bien visée», alors que d'autres contre-attaquaient déjà en soulignant le peu d'expérience politique de cette femme qui serait à un battement de coeur de la présidence, alors qu'elle a été élue gouverneure de l'Alaska il y a à peine un an et demi, après avoir été maire de Wasilla, une banlieue d'Anchorage, pendant six ans.

Mme Palin, elle, ne s'est pas gênée hier pour parler directement aux 18 millions de personnes qui ont appuyé Mme Clinton, en se proposant pour poursuivre la marche d'une femme vers la Maison-Blanche. «It turns out that the women in America aren't finished yet», a-t-elle dit.

Non, elles n'ont pas fini et ne sont pas arrivées au sommet. Mais doivent-elles continuer cette marche en n'importe quelle compagnie?