Un collègue américain vient à ma rencontre. Robin Williams vient de mettre un terme à une conférence de presse organisée à l'occasion de la sortie prochaine de la comédie sentimentale License to Wed. «Dis donc Mark *, il me semble avoir vu de la fumée sortir de tes oreilles, non?»

Fidèle à sa réputation, Williams avait offert un show d'improvisation délirant au cours duquel il fut notamment invité à se prononcer sur le sujet de l'immigration, un thème très sensible présentement au pays de l'oncle George.

Pendant 29 secondes, pas une de plus, il a tourné en dérision les aspirations souverainistes des Québécois. «Si vous allez au Canada, a-t-il expliqué, il n'y a qu'une seule province où il y a des francophones. C'est une bonne idée car ils peuvent ainsi râler à leur guise!» L'humoriste a ensuite emprunté un accent français (ce qu'il fait très souvent) pour faire un peu de kilométrage en comparant le mouvement souverainiste à une crise d'enfant gâté. «C'est comme un étudiant qui voudrait rompre les liens avec sa famille, mais qui tient à ce qu'on lui envoie encore du cash

«Alors, offusqué?» me demande l'Américain. Pas le moins du monde. Parce que Robin Williams est le produit de sa société. Et la société dans laquelle il vit ignore évidemment tout de notre histoire, de notre politique, de notre culture. Les vedettes de sa stature qui traversent la frontière afin d'aller tourner des films à Toronto ou à Vancouver sont d'ailleurs parfaitement étonnées d'être accueillies par des affiches bilingues dans les aéroports de ces villes. Elles n'en comprennent pas la logique. Elles n'ont aussi du Québec, évidemment, que la vision que les médias anglophones en donnent.

Il faut aussi comprendre que la pseudo «sortie» de Williams s'inscrit dans un contexte politique particulier. L'avancée de la langue espagnole aux États-Unis est aujourd'hui l'objet de bien des discussions chez nos voisins du Sud. Dans les débats où participent les candidats éventuels en vue de l'élection présidentielle de l'an prochain, la question de l'officialisation de la langue de Shakespeare est régulièrement évoquée.

«Les pays bilingues ne fonctionnent pas!» a tonné Tommy Thompson, candidat à l'investiture républicaine. «On ne veut pas finir comme Québec et Toronto!» a de son côté commenté l'animateur Chris Matthews dans le cadre de son émission Hardball au réseau MSNBC en évoquant la question de la langue. Soit dit en passant, Matthews, le rédacteur des discours de Jimmy Carter, recyclé en journaliste présentateur, est régulièrement l'objet, gracieuseté de Darell Hammond, d'une imitation hilarante à Saturday Night Live.

Autrement dit, s'il fallait monter sur ses grands chevaux dès qu'une ânerie est dite ou écrite sur le Québec à l'extérieur de nos frontières, s'il fallait se scandaliser chaque fois que quelqu'un, quelque part, se paie gentiment notre gueule, notre pression artérielle collective risquerait constamment l'explosion. Et puis, ai-je expliqué au collègue, aucune fumée n'est sortie de mes oreilles car Robin Williams a d'abord été drôle. N'est-ce pas ce qu'on lui demande? Cela dit, bonne Fête nationale à tous.

Le monde est petit

Je ne savais pas que la game pouvait être aussi féroce, aussi violente. Juste au moment où je m'apprêtais à sortir de l'hôtel où venait d'avoir lieu la conférence de presse de Robin Williams, j'ai vu de l'intérieur du hall une foule de paparazzis à l'extérieur sortir de nulle part pour mitrailler avec leurs objectifs une jeune femme qui descendait d'une voiture. Ils se sont bousculés entre eux, se sont battus avec les gardiens de l'hôtel et avec les gardes du corps de la demoiselle, certains sont tombés par terre avec leurs appareils, bref, c'était le chaos total.

La jeune femme est passée à quelques mètres de moi après être entrée en courant dans le hall. Elle arborait de longs cheveux blonds, portait des verres fumés, et ressemblait à peu près à toutes les «pitounes» interchangeables qu'on croise dans le sud de la Californie. On m'a dit qu'il s'agissait de Britney Spears. Certains sites spécialisés suggèrent en outre que la distinguée vedette aurait délibérément cherché à attirer l'attention des paparazzis à l'endroit même où se trouvait ce jour-là une ancienne «rivale» de la chanson pop, Mandy Moore. Miss Moore, sachez-le, est l'une des têtes d'affiche de License to Wed, ce film dans lequel joue aussi Robin Williams...

Le monde n'est pas seulement fou, il est aussi très petit.

* Mark est mon prénom désigné aux States. «Marc-André», c'est vraiment trop compliqué...