Les chroniqueurs de cinéma ne savent plus trop où donner de l’oeil ces jours-ci. De nombreuses productions très attendues arrivent en effet dans les salles commerciales au cours des prochaines semaines. Seulement aujourd’hui, 10 nouveaux films prennent l’affiche. Il y en aura 12 autres vendredi prochain.

De surcroît, Montréal accueille ces jours-ci plusieurs festivals de cinéma. Ce ne sont pas des festivals dits «généralistes» (comme le sont le FFM ou le FNC), mais des manifestations exploitant des créneaux plus spécialisés, généralement délaissés par les distributeurs.

Et c’est bien là l’ironie de la chose. Rarement l’offre aura-t-elle été aussi abondante dans nos salles. Les durées de vie des films sur grand écran étant de plus en courtes (tout comme le délai de la parution de ces titres en DVD), le roulement est devenu étourdissant. Il faut de plus en plus de films pour nourrir une machine qui s’emballe à force de jeter tout de suite ses produits après usage. Mais quels films?

Je ne suis pas de ceux qui estiment que la situation est tout à fait désespérante en ce qui concerne la programmation dans les salles montréalaises. Bien entendu, je trouverai toujours aberrant que le Québec fasse partie du marché intérieur américain. Il est tout aussi ridicule que la moindre comédie boutonneuse à sortir de l’usine à cancres de Hollywood prenne l’affiche chez nous sur 80 écrans. N’empêche que, dans les circonstances, Montréal reste quand même un endroit relativement «protégé» sur le plan de la diversité cinématographique. Un cinéphile montréalais peut généralement avoir accès à du bon cinéma. Il devra y mettre un peu d’efforts, c’est entendu, mais il y parviendra.

Tous ces festivals plus modestes, créés pour répondre à une demande à laquelle les chaînes d’exploitation n’ont jamais pu vraiment faire écho, jouent ainsi un rôle nécessaire. Dans la mesure où ils octroient aux films qu’ils sélectionnent un caractère événementiel qu’ils ne pourraient probablement pas atteindre autrement.

Jusqu’à demain a lieu le Festival SPASM, consacré aux courts métrages de genre québécois (www.spasm.ca). Depuis hier, le festival Cinémania, dont la programmation est constituée de longs métrages francophones, bat son plein à l’Impérial, le plus beau cinéma de la ville (www.cinemaniafilmfestival.com).

Le Festival du film roumain à Montréal commence par ailleurs aujourd’hui au cinéma du Parc et se poursuit jusqu’à jeudi (www.cinemaduparc.com). Dès mercredi, les essentielles Rencontres internationales du documentaire de Montréal se tiendront jusqu’au 18 novembre (www.ridm.qc.ca). Juste au moment où nous arrivons au bout de notre souffle arrive alors le 20e Festival Image et Nation (www.image-nation.org), lequel, du 15 au 25 novembre, propose du cinéma «lgbt» (lesbien, gai, bi, trans). Et pourquoi ne pas terminer l’aventure par une petite vite au Darryl’s Hard Liquor and Porn Film Festival le 24 novembre à la SAT? Consacré à des courts métrages comiques destinés aux adultes, ce «festival» d’un soir (www.hardliquorandporn.com) ne promet pourtant rien de réellement pornographique. Et s’excuse d’avance auprès des pervers de tout acabit. Une tenue vestimentaire «appropriée» – lire star du porno – est toutefois suggérée…

À vrai dire, je ne sais trop si cette concentration de festivals spécialisés est souhaitable. Surtout que celle-ci se produit à une période où l’offre cinématographique – je ne parle même pas de l’offre culturelle en général – est déjà saturée. En revanche, ces manifestations méritent l’attention des cinéphiles car elles sont généralement nées dans l’adversité. Et portées à bout de bras par des gens allumés qui, à force d’entêtement et d’obstination, sont parvenus à les faire exister.

Mais le cinéphile peut-il vraiment être partout à la fois? Et le chroniqueur, lui?