Mettons que Guy Ritchie et Madonna ont connu de meilleurs mois. D'abord, a) le couple royal divorce, b) le film réalisé par la Madone, Filth and Wisdom, démarrera sa carrière directement en DVD chez nous et c) le nouveau film de Monsieur Madge, RocknRolla, roulera comme une roche vers les bas fonds du box-office.

Sorti le 10 octobre aux États-Unis dans un nombre limité de salles, RocknRolla, un western moderne à la sauce cockney, n'a toujours pas franchi la barre des 500 000 $ de recettes. Piètre et décevante performance pour une oeuvre qui a coûté plus de 18 millions à catapulter sur grand écran.

Pas que le film de l'ex-mari de Madonna, âgé de 40 ans, soit spectaculairement mauvais. Confus, brouillon et inutilement compliqué, voilà qui colle mieux à RocknRolla, une pâle copie d'une oeuvre précédente de Guy Ritchie, et pas mal plus intéressante, soit Lock, Stock and Two Smoking Barrels, sorti en 1998.

Avec RocknRolla, dont l'action se déroule à Londres, le réalisateur de Snatch et de l'infâme Swept Away chausse ses vieilles pantoufles cinématographiques en braquant sa caméra sur une hétéroclite bande de criminels dont le seul point commun consiste à s'arnaquer les uns et les autres.

Au coeur de l'intrigue: un immense projet immobilier dans lequel trempent le petit criminel à la solde One-Two (Gerard Butler), le milliardaire russe Uri Obomavich (Karel Roden), la comptable sexy Stella (Thandie Newton), l'influent patron d'un gang de la vieille école Lenny (Tom Wilkinson), un junkie et ex-star du punk (Toby Kebbell) et deux producteurs américains tentant de percer le marché de la musique britannique (Jeremy Piven et Ludacris).

Entre deux poursuites endiablées dans les rues de l'est de Londres, les personnages ingurgitent des pintes de bière, tirent du pistolet, se tapent sur la gueule et sacrent aux deux phrases. Ah oui, il y a aussi une peinture volée, dont on se fout éperdument, mais qui cause des frictions entre les parrains Lenny et Uri. «Londres est devenue une sorte de far-west, c'est le nouveau New York. Tellement de choses ont changé en 10 ans», souligne Guy Ritchie, plutôt timide lors d'une rencontre de presse en marge du Festival du film de Toronto.

Questionné sur l'aspect échevelé du scénario, l'acteur écossais Gerard Butler, vu dans 300 et P.S. I Love You, reconnaît que «c'est plus un casse-tête à regarder qu'à faire». Bien d'accord. Le fouillis s'explique aussi par les plages d'improvisation qu'accordait régulièrement Guy Ritchie à ses acteurs. Attention, danger.

«Dans les séances d'impro, je n'arrêtais pas de vouloir sacrer. J'étais entourée de gars qui sacrent, mais Guy Ritchie me rappelait à l'ordre: mon personnage, une comptable racée et très classe, ne peut échapper de gros mots», rigole l'actrice Thandie Newton, qui joue également Condoleezza Rice dans le film W d'Oliver Stone.

«Sérieusement, je crois que j'ai prononcé le mot fuck de toutes les façons possibles», glisse Gerard Butler, trop heureux d'enfin pouvoir s'exprimer avec son fort accent écossais dans RocknRolla. «J'ai trop tourné de films américains», ajoute-t-il, sourire en coin.

Évidemment, la célèbre Material Girl a souvent visité son Material Boy sur le plateau de RocknRolla. «Il n'y a pas eu de moments bizarres. Et personne ne mangeait de repas macrobiotiques apportés par une cigogne», ironise Thandie Newton à propos du mythique et draconien régime alimentaire de Madonna.

Guy Ritchie, qui s'attaque présentement à l'adaptation cinématographique de Sherlock Holmes avec Robert Downey Jr et Jude Law, n'a mis que six semaines à mettre en boîte RocknRolla. Malgré ses nombreux défauts, le film renferme une scène de danse délicieuse entre Thandie Newton et Gerard Butler, qui concluent une affaire louche en se trémoussant comme deux pantins désarticulés. Honnêtement, c'est la meilleure scène de danse au cinéma depuis Pulp Fiction. Vraiment. «Cette scène n'est tellement pas cool qu'elle devient cool», sourit Thandie Newton.

Mais est-ce que ça vaut un billet d'entrée à 12 $? Non. Attendez plutôt la sortie du DVD. Ou repassez-vous des vieux Tarantino. C'est bien meilleur.

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RocknRolla a pris l'affiche à Montréal en version originale anglaise seulement