Le 33e FFM passera-t-il à l'histoire? Pas sur le plan de la programmation en tout cas. Ni sur celui du rayonnement médiatique international. En revanche, force est de constater que les fidèles sont venus plus nombreux dans les salles cette année. Et y ont visiblement trouvé leur compte. Les choix de programmation, du moins ceux ayant trait à la compétition mondiale, semblent justement faits en fonction d'un public qui, depuis tant d'années, porte ce festival à bout de bras, contre vents et marées.

On pourra désormais évoquer un «style» FFM: un film venu d'ailleurs, fleurant bon les valeurs humanistes et l'académisme bon teint. Les observateurs auront beau faire des comparaisons avec les sections compétitives des grands festivals internationaux de cinéma, le fait est que cette approche semble désormais coulée dans le béton. Cette vision des choses a l'avantage de fidéliser un public qui en redemande. Mais elle comporte aussi un très gros revers.

Le rêve de voir (ou revoir) un jour à Montréal un grand festival de cinéma rassemblant toutes les fratries relève aujourd'hui du pur fantasme. Il faudra se faire à l'idée. Même si la division des troupes ne fait que creuser notre trou davantage, chacun restera désormais bien campé sur ses positions et ne comptera céder aucun pouce de terrain aux «camps ennemis».

On cible désormais des clientèles de façon très précise. Le FFM s'adresse ainsi aux gens en mal d'exotisme; le Festival du nouveau cinéma comble les cinéphiles branchés et la critique; Fantasia rallie les amateurs de films de genre. Sans compter les innombrables festivals spécialisés qui pullulent au cours de l'année. Les distributeurs locaux, sollicités de tous bords tous côtés, doivent jongler avec tous ces vases non communicants. Les plus importants d'entre eux consentent à montrer un ou deux de leurs titres au FFM, un festival où le milieu du cinéma, s'il n'est pas directement impliqué dans un événement, est virtuellement absent de la manifestation. Point d'effervescence ni d'esprit festif.

Le FFM peut-il espérer recruter de nouveaux adeptes en maintenant sa formule actuelle? Impossible. D'abord, il faudrait au départ une volonté en ce sens. Avec le retour du festival dans les bonnes grâces des organismes de financement, qui le subventionnent maintenant à très belle hauteur sans trop poser de questions, pourquoi même y songerait-il?

Oublions alors le FFM des grandes années. Oublions ce festival qui, jusqu'au milieu des années 90, faisait partie des rendez-vous cinématographiques importants sur le plan international. Au fil des ans, le FFM s'est transformé en manifestation essentiellement locale, répondant aux besoins du public qui le soutient. On aura beau, année après année, relever l'absence d'une ligne directrice dans une programmation fourre-tout, noter le peu d'efforts mis dans la recherche de films sous-titrés en français, déplorer la pauvreté de son site internet ou formuler toutes les critiques possibles et imaginables, le FFM ne changera pas. Et ne changera probablement jamais.

À chacun de se situer par rapport à lui. Et de faire ses choix.