Il manquait quelque chose, non? De l’émotion, des rires, de l’imprévu, essentiellement. Cette 82e soirée des Oscars a été bien sage, prévisible et plutôt ennuyeuse.

Lisez le compte-rendu de Marc-André Lussier.

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Les cérémonies de remise de prix le sont toutes à différents degrés. Celle-ci l’a été en particulier.

En grande partie responsables, les animateurs Steve Martin et Alec Baldwin, qui avaient l’air (volontairement ou pas?) d’un duo de has-been évadé d’une revue d’hôtel défraîchi de Las Vegas. Plusieurs blagues de mononcle au compteur, entre autres autour du film The Hangover.

Shagalag. Je sentais leur Aqua Velva jusque dans mon salon.

Martin et Baldwin ont d’ailleurs été présentés d’entrée de jeu comme une nouvelle mouture de Dean Martin et Jerry Lewis par Neil Patrick Harris, animateur des Emmys, qui a ouvert le bal avec un numéro de musical. On a pu constater (hum...) que l’ex-Dr Doogie ne faisait pas de lip-sync comme Michael Bublé à la cérémonie de clôture des JO.

On s’attendait pourtant à mieux des animateurs. Le réseau ABC avait beaucoup misé sur leur complicité, évidente à plusieurs reprises à Saturday Night Live (qu’ils ont tous deux animée un nombre record de fois) et dans le récent film It’s Complicated, avec Meryl Streep. C’est d’ailleurs aux dépens de la grande actrice que Steve Martin a lancé l’une de ses meilleures blagues: «Chaque acteur qui joue avec Meryl Streep a deux commentaires à faire: Quelle actrice! Et pourquoi collectionne-t-elle tous ces souvenirs de Hitler?»

En général, le duo s’est beaucoup moins tiré la pipe que prévu, se contentant de casser du sucre très gentiment sur le dos des célébrités sur place au Kodak Theatre.

Avec plus ou moins de succès. Il fallait voir le visage éteint de George Clooney pour s’en rendre compte. On était loin du ton caustique – et jouissif en ce qui me concerne – de Ricky Gervais aux Golden Globes.

La meilleure nouvelle de cette soirée des Oscars, à mon sens? On nous a épargné les interminables et souvent mielleux numéros musicaux. J’ai encore frais à la mémoire le douloureux souvenir de Beyoncé interprétant dans un français phonétique la chanson-thème des Choristes.

On nous a quand même assommés, juste avant 23h, avec un numéro soporifique de danseurs dans une chorégraphie d’une sorte de taï-chi acrobatique, en présentation de l’Oscar de la meilleure trame sonore. À l’image du reste. Zzzzzzzzz.

Dès le début de la soirée, en constatant la longueur des extraits de films pour chaque candidature, on a su que la soirée serait longue. Elle nous a réservé, en prime, très peu de surprises. Parmi les lauréats que l’on attendait, Christoph Waltz, Oscar du meilleur acteur dans un second rôle pour Inglourious Basterds, a été suave comme toujours, et d’une humilité qui l’honore, remerciant surtout, comme au Festival de Cannes, Quentin Tarantino. Jeff Bridges, dit The Dude, a remercié ses parents en allant cueillir son Oscar du meilleur acteur.

Pour le reste, pas de déclarations politiques intempestives, pas de crises de larmes, même la comédienne Mo’Nique, que l’on attendait émotive et à fleur de peau, a été beaucoup moins expressive qu’aux Golden Globes. À force de se faire dire qu’elle allait l’emporter...

La première véritable émotion de la soirée a été fournie par l’hommage, senti et mérité, au regretté John Hughes. Images de ses films à l’appui  sur la musique, remuante, de Don’t You Forget About Me de Simple Minds. Souvenirs d’un adolescent ému.

«Est-ce que je l’ai réellement mérité, ou est-ce que je vous ai eu à l’usure?» a demandé Sandra Bullock à propos de son Oscar pour The Blind Side. Elle a bien manié l’humour et l’émotion, sans pour autant retenir ses larmes. Une lauréate rafraîchissante, qui a eu le culot d’aller cueillir son Razzie pour la pire performance d’une actrice dans un film (All About Steve) la veille.

Kathryn Bigelow semblait encore plus secouée par son Oscar de la meilleure réalisation, le premier remis à une cinéaste, pour l’excellent The Hurt Locker, meilleur film jamais réalisé sur la guerre en Irak. Et à court de mots au moment d’accepter l’Oscar du meilleur film, remis sans cérémonial, presque à la sauvette, par Tom Hanks.

À l’autre bout du spectre émotif, on espérait rire aux éclats grâce à Ben Stiller, déguisé en Na’vi, le «bonhomme bleu» de la planète Pandora d’Avatar. Mais sa présentation gentille et polie, à l’image du gala, nous a fait regretter l’absence de Sacha Baron Cohen, prévu à ses côtés. M. Borat aurait été «désinvité» la semaine dernière par les organisateurs des Oscars, afin de ne pas déplaire à James Cameron.

Quelques bons coups, quand même: cette idée, comme l’an dernier, de demander à des acteurs et actrices (ainsi qu’Oprah Winfrey) de présenter les candidats aux Oscars d’interprétation. Sauf qu’il était presque minuit, et que l’on commençait à espérer une conclusion à cette soirée sans éclats. Trop peu, trop tard.