Ce n'est pas qu'on veuille nécessairement toujours se comparer aux autres mais il y a des jours où, très franchement, on ne peut faire autrement que de regarder sa réalité avec un sentiment de dépit.

Quelques membres des comités de programmation du Festival de Toronto ont profité de leur passage à Montréal cette semaine - en mission pour visionner des productions québécoises - pour rencontrer quelques journalistes de façon informelle. Accompagnés de Pamela Mollica, la nouvelle directrice des communications du TIFF, les sélectionneurs ne pouvaient encore rien dévoiler de la programmation, mais ils s'extasiaient d'avance - avec raison - sur l'ouverture officielle, le 12 septembre (trois jours après l'ouverture du 35e TIFF) du Bell Lightbox. Ce complexe, sorte de méga eXcentris érigé au coût de 196 millions de dollars sur un terrain du centre-ville appartenant à la famille d'Ivan Reitman, abritera dorénavant les quartiers généraux du Festival mais aussi ceux de la Cinémathèque. Il comptera également cinq salles de projection, d'une capacité de 80 à 550 sièges, un atrium de trois étages, deux salles d'exposition (celle du MoMA consacrée à Tim Burton s'y installera en novembre), trois studios d'apprentissage, un centre pour étudiants et universitaires, un café, un restaurant et un salon. Toronto la pure se place à la fine pointe de la cinéphilie. Oui, il y a eu de légers retards dans la construction du complexe, des collectes de fonds ayant dû être organisées pour compléter le financement. Mais nos voisins ontariens y sont parvenus. Le rêve du Bell Lightbox deviendra bel et bien réalité. Et clenche de loin toutes les infrastructures du genre au pays.

Au même moment, le lendemain en fait, notre collègue Éric Clément nous apprenait que le ministère de la Culture du Québec refusait de subventionner le projet d'agrandissement du cinéma Parallèle dans l'édifice d'eXcentris et renvoyait platement la balle à la SODEC pour trouver une solution. Misère. Si on avait voulu anéantir tous les espoirs des distributeurs indépendants et des cinéphiles montréalais, on ne s'y serait pas pris autrement. Or, s'il y a un endroit où la diffusion d'oeuvres cinématographiques issues d'ici et d'ailleurs prend tout son sens, c'est bien à l'intérieur de nos frontières. À moins que la réputation de Montréal sur le plan de la cinéphilie ne soit plus qu'un leurre. «Québec doit prendre le relais et mettre ses culottes!» a déclaré dans la foulée Louis Dussault, président du Regroupement des producteurs indépendants de films du Québec (RDIFQ). Il y a, en effet, péril en la demeure. Et le danger s'incruste insidieusement, la pénurie de salles consacrées au cinéma dit «d'auteur» n'étant que la pointe de l'iceberg.

La fermeture des deux plus grandes salles de l'ancien Ex-Centris a en effet eu des conséquences tragiques sur l'offre de cinéma proposée chez nous, c'est entendu. Elle a aussi annoncé le présage d'un appauvrissement culturel collectif qui, je le crains, sera irrécupérable. Au-delà de la poignée de cinéphiles que les films plus «exigeants» attirent encore, le renouvellement du public n'est désormais pratiquement plus possible. L'absence d'accessibilité à des oeuvres non obligatoirement formatées pour atteindre le plus grand nombre constitue le chaînon manquant. C'est grave. Il est d'autant plus ironique de constater que Toronto, cinéphile le temps d'un festival de la même manière que nous sommes jazzophiles pendant 12 jours, sera dorénavant gratifiée d'une infrastructure à nous faire pâlir d'envie. Montréal, où, pourtant, l'investissement dans la culture relève carrément d'une question de survie, est encore une fois victime des tergiversations et de l'immobilisme de nos décideurs. Bientôt, les dégâts seront très lourds. Et personne dans la cabine de pilotage ne s'en rend compte. Cela devient désespérant à la fin.

Un éléphant, ça trompe

J'ai déjà écrit ici tout le bien que je pensais du projet Éléphant, ce programme de restauration et de numérisation du patrimoine cinématographique québécois (disponible sur Illico, le service numérique de Vidéotron). Ce projet, rappelons-le, est piloté par la productrice Marie-Josée Raymond, en collaboration avec Claude Fournier. Dans son blogue (intitulé «Dans la jungle»), le réalisateur de Deux femmes en or a récemment établi une liste des pionniers du cinéma québécois, sorte de «walk of fame» imaginaire dont les étoiles pourraient être posées sur Sainte-Catherine, entre de Bleury et Saint-Denis. Ce n'est pas tant le fait qu'il se soit lui-même inclus dans la liste (sa productrice a aussi droit à cet honneur) qui prête flanc à discussion que les omissions qu'on y trouve. Pierre Perrault et Gilles Groulx, entre autres, brillent en effet par leur absence. Il est vrai qu'entre Le chat dans le sac et Les chats bottés, le choix était très clair.

Ah ben...

Cinquante-sept vaillants travailleurs de l'information oeuvrant dans la salle de rédaction de La Presse ont participé au «pool» de hockey organisé à l'occasion des (longues) séries éliminatoires. Parmi lesquels plusieurs experts de notre section des Sports. Qui, d'après vous, est arrivé en tête au fil d'arrivée? Oui, mesdames et messieurs, un modeste chroniqueur cinéma. Triste de penser que L'attaque à 5 et La zone ne pourront même pas faire appel à mes humbles services. Peut-être L'antichambre?