Allons-y, Alonzo! comme dirait Jean-Paul Belmondo. La saison des galas commence officiellement demain, avec la tenue de la 68e soirée des Golden Globes, la plus décontractée des remises de prix télévisées (20 h, CTV).


La cérémonie organisée par l’Association des journalistes étrangers de Hollywood (Hollywood Foreign Press Association) a beau être souvent critiquée pour son manque de représentativité (moins de 100 électeurs contre 6000 pour les Oscars), son caractère informel - un banquet toujours bien arrosé - en fait l’événement le plus effervescent du genre.


Pour la deuxième année d’affilée, Ricky Gervais sera aux commandes de cette sympathique soirée strass et paillettes, qui attire tout le gratin hollywoodien. Avec son humour décapant et acerbe, l’acteur, auteur et réalisateur britannique avait entre autres égratigné sans pitié Mel Gibson l’an dernier. Bière à la main, empruntant le ton d’un maître de cérémonie de bien cuit, Gervais avait décoiffé l’assistance, sans faire l’unanimité.


En conférence de presse cette semaine, il a promis d’en rajouter une couche pour bonne mesure, estimant que, si les organisateurs l’ont réembauché, c’est parce qu’il n’était «pas allé assez loin» l’an dernier. «Cette fois, je garantis qu’ils ne me réinviteront pas», dit-il. Ça promet.


Grâce à des cotes d’écoute enviables (17 millions de téléspectateurs aux États-Unis en 2010) et un impact médiatique à l’avenant, les Golden Globes ont une incidence à la fois sur la carrière des films et sur leurs chances d’obtenir un Oscar, selon les observateurs. Les finalistes aux Academy Awards, qui seront dévoilés le 25 janvier, sont déjà déterminés, mais les membres de l’Académie des arts et des sciences du cinéma ont jusqu’au 22 février pour choisir les lauréats. La soirée des Oscars aura lieu le 27 février.


Ce qui ne veut pas dire que la cérémonie des Golden Globes est un indicateur fiable des futurs vainqueurs des Oscars. L’an dernier, The Hurt Locker a heureusement été préféré à Avatar pour l’Oscar du meilleur film, même si la baudruche écolomilitaire de James Cameron avait remporté le Golden Globe équivalent. Les électeurs des Golden Globes et des Oscars n’ont plébiscité le même «meilleur film» qu’une fois depuis six ans (Slumdog Millionaire en 2008).


Les 81 membres «actifs» de la Hollywood Foreign Press Association (HFPA), des journalistes étrangers peu connus et visiblement peu estimés par leurs confrères américains, ont été fort critiqués au moment du dévoilement des finalistes des Golden Globes, en décembre. La sélection de Burlesque et de The Tourist, des échecs à la fois critiques et commerciaux, parmi les cinq finalistes au prix de la meilleure comédie ou comédie musicale de l’année a nourri quantité de railleries.


Certains chroniqueurs ont insinué que puisque les membres de la HFPA étaient des habitués de voyages de presse payés par les studios, le «junket» de The Tourist, à Paris, n’avait pas dû nuire à sa candidature. La présence au générique d’Angelina Jolie et de Johnny Depp, qui doivent être de la fête demain, ne serait pas non plus étrangère à la sélection de ce film pourtant éreinté par la critique.


Bref, rien pour redorer le blason du gala des Golden Globes, qu’il faut à mon sens prendre pour ce qu’il est, c’est-à-dire un distrayant party de vedettes de cinéma à moitié saoules, récompensant généralement d’assez bons films.


Il y a d’autant plus d’intérêt pour la soirée cette année que rien ne semble joué d’avance. Si The King’s Speech de Tom Hooper, fort de ses sept citations, est officiellement le film à battre, en raison surtout de son classicisme consensuel, d’autres pourraient tout aussi bien être sacrés «roi de la soirée» (s’cusez-la), à l’instar de James Cameron en janvier dernier.


Si l’on se fie aux différentes associations de critiques des États-Unis, on ne serait pas surpris de voir The Social Network de David Fincher rafler tout sur son passage. Parions plutôt que la distribution de prix se fera de façon équitable entre plusieurs films méritants.


Les finalistes au Golden Globe du meilleur film, Black Swan, The Fighter, Inception, The Social Network et The King’s Speech, que l’on retrouve aussi dans toutes les principales courses aux prix des associations professionnelles (scénaristes, producteurs, acteurs, réalisateurs), devraient logiquement compter parmi les finalistes aux Oscars.


Dans la catégorie, tant décriée, de la meilleure comédie ou comédie musicale, je miserais un p’tit 20 $ sur la victoire du délicieux The Kids Are All Right, chronique familiale douce-amère de Lisa Cholodenko, un autre film favori de la critique américaine. Je verrais bien Natalie Portman être récompensée pour son étonnante performance dans le drame halluciné de Darren Aronofsky (sinon Jennifer Lawrence dans le sous-estimé Winter’s Bone).


Et si la victoire de Colin Firth semble presque acquise pour son rôle nuancé de roi bègue dans The King’s Speech, préférera-t-on Geoffrey Rush à Christian Bale (sidérant dans The Fighter) pour le Golden Globe du meilleur acteur dans un rôle de soutien, ou Helena Bonham Carter à Melissa Leo pour les mêmes films et la même catégorie en version féminine ?


Indicateur fiable ou pas, je serai à l’écoute.