Ce n'est pas sans raison que la cote du Parti québécois a progressé à tel point que le gouvernement Marois peut maintenant voir se profiler à l'horizon la possibilité d'une victoire majoritaire.

La raison de cette avance, surprenante quand on se rappelle le désarroi du même gouvernement il y a un an, tient essentiellement au fait qu'après une assez longue période où elle semblait peu sûre d'elle, Pauline Marois - presque la seule à avoir une expérience gouvernementale dans cette équipe de néophytes et de seconds couteaux - a finalement bien joué ses cartes.

L'an dernier, sous l'influence de son aile gauche et dans la foulée de son absurde participation à la fronde des carrés rouges, le gouvernement semblait obsédé par le désir de jouer sur le terrain de Québec solidaire, qui pourtant ne menaçait le PQ que dans deux ou trois circonscriptions de Montréal.

Depuis, le gouvernement a fini par réaliser ce qui était l'évidence même, soit que les élections se gagnent au centre, et que le véritable adversaire était la Coalition avenir Québec.

Aux dernières élections, QS avait récolté un maigre 6% des voix, et nui marginalement au PQ dans certaines circonscriptions. Le gros morceau était la CAQ, qui avait remporté 27% du vote populaire et arraché au PQ des circonscriptions dans la couronne nord de Montréal, dont celle de L'Assomption, l'ancienne circonscription de Jacques Parizeau que François Legault avait remportée de justesse.

Au prochain scrutin, ce dernier risque la défaite, comme du reste une bonne partie de ses députés, la CAQ ayant baissé, selon le dernier sondage CROP, à 16%.

Cela ne tient aucunement à des erreurs que M. Legault aurait pu commettre. Au contraire, il a été beaucoup plus présent que le chef libéral Philippe Couillard, plus agressif et aussi plus constructif sur toutes les questions en jeu. À la fin de la session, c'est lui qui était devenu le véritable chef de l'opposition, alors que Philippe Couillard, mal à l'aise dans son rôle de leader, s'avérait aussi évanescent qu'hésitant.

La chute graduelle de la CAQ est due au fait qu'à partir de l'été dernier, le gouvernement a fait taire son aile radicale et commencé à récupérer le vote caquiste.

Mme Marois a réussi à calmer les ardeurs militantes de sa ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, sans même avoir à la démettre du cabinet, pour finalement faire la paix avec les minières et amorcer un programme d'exploration pétrolière. Conversion analogue sur l'enjeu de l'oléoduc d'Enbridge. Suivit une tournée en Europe et une halte à Davos, où la première ministre a voulu montrer qu'elle était en faveur du développement et des investissements étrangers. Cela allait marquer, sinon la réconciliation, du moins la fin de l'hostilité envers les milieux d'affaires.

Autre signal lancé aux nationalistes modérés égarés à la CAQ: le budget. Même si ce n'est pas un vrai budget, le message politique est clair: le gouvernement promet des politiques d'austérité et un certain réalisme économique. Surtout, symbole très fort, il s'engage à augmenter les tarifs des garderies et à les indexer au coût de la vie - allant même plus loin que ce que les libéraux envisageaient!

Parallèlement au recentrage idéologique sur le front économique, le gouvernement Marois s'est activé à séduire l'électorat nationaliste conservateur. La Charte de la laïcité, avec tout ce qu'elle contient de non-dit et d'instincts inavouables, a fait remonter la cote du PQ dans les régions. La moralité d'une stratégie consistant à faire campagne sur le dos des minorités est plus que douteuse, mais sous l'angle purement électoral, ce fut un calcul rentable.