Il n'y aura pas d'encombrement de limousines sur la Grande-Allée. Pauline Marois s'est donné un cabinet mincissime, avec seulement 23 ministres - 17 ministres en titre si l'on exclut les six ministres délégués. Un gros contraste avec celui de son prédécesseur Bernard Landry, qui en comptait 36!

Détail qui va faire hurler les féministes les plus doctrinaires, ce conseil sera très majoritairement masculin, avec seulement huit femmes sur 23. Elles seront minoritaires, aussi, parmi les adjoints parlementaires (trois sur onze).

Cela s'explique par le faible nombre de femmes dans la députation péquiste - seulement 17 sur 54, dont plusieurs sont des néophytes -, et par le fait que Mme Marois devait privilégier des considérations bien plus importantes que le genre.

Au moins, on sait que celles qui se retrouveront autour de la table ministérielle, loin d'être des femmes-potiches ou des femmes-alibis, ont été choisies pour leur compétence et leurs états de service.

Il fallait une femme pour refuser de sacrifier le mérite au concept vide de la parité, un concept qui ne sert qu'à jeter de la poudre aux yeux des gogos. Qu'y a-t-il de plus insultant, pour les femmes, que de voir une femme promue pour l'unique raison qu'elle porte une jupe? (Voir à ce sujet ma chronique de jeudi dernier).

Ce premier cabinet Marois repose sur des valeurs sûres: un vice-premier ministre, le vétéran François Gendron, préposé à la sagesse; l'expérience et l'agilité parlementaires de Stéphane Bédard, qui hérite en outre du poste tout-puissant de président du Conseil du Trésor; Marie Malavoy (Éducation); les fidèles Agnès Maltais et Nicole Léger, nommées à des postes qui correspondent exactement à leurs qualifications.

Il reposera aussi sur de nouveaux venus prometteurs, dont Alexandre Cloutier (Affaires intergouvernementales), qui a derrière lui une impressionnante carrière en droit et hérite du dossier délicat d'une «gouvernance souverainiste» qui sera pour le moins évanescente sous un gouvernement minoritaire; Daniel Breton, un environnementaliste professionnel; Réjean Hébert (Santé), Véronique Hivon (Santé publique) et le trio des journalistes, les Drainville (Institutions démocratiques), Lisée (Relations internationales) et Duchesne (Enseignement supérieur).

Une grosse faille: l'absence totale de ministres dotés d'une connaissance, serait-elle minimale, du milieu des affaires, des PME ou de l'entreprise privée. Le nouveau ministre des Finances, Nicolas Marceau, a un doctorat en économie, mais n'a jamais travaillé ailleurs qu'à l'université. Élaine Zakaïb (Politique industrielle et Développement économique) est avocate et vient du Fonds de solidarité de la FTQ. Martine Ouellet (Ressources naturelles), ingénieure, a travaillé à Hydro-Québec avant de militer dans l'environnement. Bref, les ministres «économiques» viennent du secteur public ou du milieu communautaire. Mais cela aussi reflète la composition de la députation péquiste.

Deux bonnes nouvelles pour Montréal, la perpétuelle délaissée de nos gouvernements, au surplus banalisée par les bureaucrates basés à Québec, pour qui la métropole n'est que «la région 06»: c'est à un poids lourd de son cabinet, Jean-François Lisée, que Mme Marois a confié la responsabilité de la région de Montréal.

Lisée est un homme d'action et de passion: espérons qu'il fera du développement de Montréal sa priorité; ses autres attributions ne devraient pas l'occuper démesurément, puisque sous un gouvernement minoritaire, il perdrait son temps à concocter une stratégie référendaire ou à jouer les ambassadeurs de la souveraineté sur la scène internationale.

Autre bonne nomination pour Montréal, celle de Diane De Courcy à l'Immigration et aux communautés culturelles. Sa longue expérience à la Commission scolaire de Montréal, avec ses écoles multiculturelles et sa mixité ethno-religieuse, la rend particulièrement qualifiée pour ce poste.

Une incongruité: les Transports, un dossier crucial pour la métropole, vont à un ministre complètement étranger à Montréal, Sylvain Gaudreault ayant passé toute sa vie au Saguenay.