Des élections pour bientôt? J'ai du mal à y croire.

Ni les Libéraux, ni les caquistes ne pourraient tenir une seule assemblée sans la voir envahie par des manifestants survoltés, voire par les casseurs qui s'y agglutinent.

Leurs pancartes et leurs autobus seraient vandalisés. Ils devraient s'adresser aux électeurs derrière d'épais barrages policiers armés de matraques et de bombonnes de gaz lacrymogène. Jolies images de campagne pour la télé!

Ou alors, le gouvernement décréterait une loi spéciale pour interdire tout rassemblement et serait vite accusé de rééditer la loi des mesures de guerre de 1970!

Non, vraiment, je ne vois pas comment l'on pourrait tenir des élections dans un climat pareil.

Il est vrai que théoriquement, le gouvernement pourrait bénéficier du contexte... mais cela m'apparaît comme une vue de l'esprit. En fait, la population pourrait bien renvoyer les rebelles étudiants et le gouvernement dos à dos, et voter pour le PQ ou pour la CAQ.

C'est pourquoi je doute que M. Charest fasse un pari aussi téméraire que de déclencher des élections alors que la contestation étudiante bat son plein.

Il aurait plutôt intérêt à attendre à l'automne, le temps que la CAQ reprenne du poil de la bête et recommence à gruger le vote péquiste, et avant que la commission Charbonneau ait eu le temps de déballer trop de scandales de corruption.

Quant à la crise des droits de scolarité, je n'y vois aucune issue sauf le temps... le temps qui finira bien par ramener à l'école des étudiants qui voudront finir leur semestre, avoir un emploi d'été et ne pas bousiller leur prochaine année scolaire, ne laissant dans la rue que des ultra-radicaux de plus en plus isolés.

D'ici là, le gouvernement doit tenir bon, tout simplement. On ne négocie pas avec des gens qui refusent le principe même de la négociation et qui trouvent «insultantes» les concessions importantes et avantageuses que vient de faire le gouvernement.

Les leaders étudiants radicaux veulent la gratuité, premier pas, croient-ils, vers le renversement du «système». On ne pourra jamais les accommoder. Les leaders modérés, eux, veulent une médiation, mais ce serait bien la pire des abdications. Qu'on l'aime ou pas, ce gouvernement a été élu et c'est à lui de gérer les finances publiques jusqu'à ce qu'un autre le remplace... ce qui du reste, ne saurait tarder si l'on en juge par le taux d'insatisfaction phénoménal de l'électorat.

Si le PQ gagne les prochaines élections, ce sera pour toutes sortes de bonnes raisons, mais certainement pas à cause de son appui démagogique et inconsidéré à la révolte contre les droits de scolarité.

Non seulement Mme Marois et ses députés arborent-ils le carré rouge dans leurs apparitions publiques, mais le logo du PQ, sur son site web officiel, s'orne maintenant d'un petit carré rouge, comme si cela faisait partie de l'identité même du parti, au même titre que le fleurdelisé!

Le PQ se trouve ainsi à cautionner tous les excès de la révolte étudiante, des visées politiques de la CLASSE (qui ne correspondent nullement au programme du PQ) aux pratiques «syndicales» antidémocratiques (comme les votes à main levée), en passant par les manifestations à haut risque.

Toute manifestation nocturne dont l'itinéraire n'est pas communiqué à la police est par définition susceptible d'engendrer de la violence, indépendamment des intentions des organisateurs. Les manifs pacifiques, comme celles du 22 mars ou du Jour de la Terre, se déroulent toujours durant la journée, avec préavis quant à l'itinéraire. Faire le contraire, c'est jouer avec le feu.